Le préfet de la région Auvergne a, par huit arrêtés du 12 janvier 2012, délivré à la SNC MSE La Tombelle des permis de construire en vue de l’édification d’un parc éolien, composé de six éoliennes et deux postes de livraison, sur le territoire des communes de Courçais et Viplaix (Allier).
Par un jugement du 28 juin 2013, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la demande de l’association « Éolienne s’en naît trop » tendant à l’annulation de ces arrêtés ainsi que la décision du 12 mai 2012 rejetant le recours gracieux formé contre ces arrêtés.
Sur appel de l’association « Éoliennes s’en naît trop », la cour administrative d’appel de Lyon a, par un arrêt n° 13LY02395 du 28 octobre 2014, annulé ce jugement et lesdits arrêtés au motif qu’en méconnaissance de l’article R. 123-22 du code de l’environnement, le commissaire enquêteur ne peut être regardé comme ayant suffisamment motivé l’avis favorable qu’il a émis sur le projet et qu’il n’a pas respecté son obligation d’examen des observations recueillies au cours de l’enquête publique.
Par une décision n° 386624 du 20 janvier 2016, le Conseil d’État a toutefois annulé cet arrêt de la cour aux motifs qu’en jugeant que le rapport relatant le déroulement de l’enquête et procédant à l’examen des observations retenues aurait dû comporter la réponse du commissaire enquêteur aux observations du public, la cour a commis une erreur de droit et qu’en jugeant que le commissaire enquêteur n’avait pas suffisamment motivé son avis s’agissant de l’atteinte au paysage, la cour a dénaturé les pièces du dossier, et a renvoyé l’affaire devant la cour administrative d’appel de Lyon.
La cour a, par un arrêt n° 16LY00400 du 13 mars 2018, de nouveau annulé le jugement du tribunal administratif de Clermont Ferrand du 28 juin 2013, les huit arrêtés du préfet de la région Auvergne du 12 janvier 2012, ainsi que la décision du 12 mai 2012 rejetant le recours gracieux contre ces arrêtés au motif que l’avis de l’autorité environnementale a été émis dans des conditions irrégulières, en méconnaissance des exigences découlant de la directive 2011/92 du 13 décembre 2011, en particulier n’a pas été rendu par une autorité disposant d’une autonomie effective, dans des conditions garantissant son impartialité et son objectivité.
Par une décision n°s 420554, 420575 du 27 mai 2019, publiée aux tables du recueil, le Conseil d’État, saisi de deux pourvois présentés d’une part par le ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et d’autre part par la société MSE La Tombelle, a, d’une part, au motif que le vice de procédure que la cour avait jugé fondé, tiré de ce que l’autorité environnementale s’étant prononcée sur le projet ne répondait pas aux exigences de la directive 85/337/CEE du Conseil du 27 juin 1985 alors en vigueur, était régularisable contrairement à ce qu’elle avait jugé, annulé l’arrêt du 13 mars 2018 de la cour en tant qu’il avait rejeté les conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et, en conséquence, en tant qu’il avait annulé le jugement du tribunal administratif de Clermont-Ferrand ainsi que les arrêtés en cause et en tant qu’il statue sur les conclusions présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, d’autre part, en vue du règlement du litige au fond en application du second alinéa de l’article L. 821-2 du code de justice administrative, sursis à statuer sur la requête présentée par l’association « Éoliennes s’en naît trop » devant la cour administrative d’appel de Lyon pour permettre la régularisation du vice de procédure entachant les arrêtés attaqués par la consultation de la mission régionale de l’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable territorialement compétente et en portant ce nouvel avis à la connaissance du public, et ce jusqu’à l’expiration du délai de trois mois ou de six mois en cas d’enquête publique, à compter de la notification de sa décision, fixé pour la notification de ces mesures de régularisation.
À la suite de cette décision, la mission régionale de l’autorité environnementale du Conseil général de l’environnement et du développement durable territorialement compétente, saisie par l’administration le 10 juillet 2019, a rendu, le 9 septembre 2019, un avis différant substantiellement de celui qui avait été initialement émis.
Après une enquête publique complémentaire tenue du 8 au 21 mars 2021, le préfet de l’Allier a, par des arrêtés du 23 juin 2021, notifiés au Conseil d’État le 24 juin 2021, délivré à la société MSE La Tombelle des permis de construire visant à régulariser les permis initiaux.
Par une décision n° 420554 du 16 février 2022, le Conseil d’État a rejeté les requêtes de l’association « Éoliennes s’en naît trop » devant la cour administrative d’appel de Lyon et devant le Conseil d’État.
M. B., représentant unique au titre de l’article R. 751-3 du code de justice administrative, les communes de Courçais, Mesples et Viplaix, la communauté de communes du Pays d’Huriel, la société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France, six autres personnes physiques, et le groupement foncier agricole (GFA) du domaine des Y., demandent à la cour dans la présente instance l’annulation des huit arrêtés précités du 23 juin 2021.
La société MSE La Tombelle fait valoir que la requête est irrecevable dès lors que les requérants n’ont pas intérêt à agir contre les permis de construire litigieux, le recours étant formé contre des permis de construire modificatifs régularisant un vice de pure forme (avis de l’autorité environnementale) et, par conséquent, n’apportant aucune évolution au projet de parc éolien, alors que les intéressés n’ont pas formé de recours contre les permis initiaux.
En vertu de l’article L. 600-1-2 du code de l’urbanisme :
« Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision relative à l'occupation ou à l'utilisation du sol régie par le présent code que si la construction, l'aménagement ou le projet autorisé sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. (…). ».
Il résulte de cet article qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien (CE, 17 mars 2017, n° 396362 396366, aux tables).
L’article L. 600-1-3 du même code prévoit :
« Sauf pour le requérant à justifier de circonstances particulières, l'intérêt pour agir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager s'apprécie à la date d'affichage en mairie de la demande du pétitionnaire. ».
Les dispositions de l’article L. 600-1-2 précités ne sont donc pas applicables aux communes de Courçais, Mesples et Viplaix, à la communauté de communes du Pays d’Huriel, et à l’association « société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France ».
Concernant les communes, vous savez qu’une commune justifie toujours d'un intérêt propre lui donnant qualité pour demander l'annulation d'un permis de construire délivré sur son territoire (CE, section, 10 mars 1978, Commune de Roquefort-les-Pins, n° 03895, au recueil) alors que les communes voisines, pour justifier d’un intérêt leur donnant qualité pour demander l'annulation d’un permis de construire délivré par une commune limitrophe, doivent se prévaloir d'une incidence sur leur propre situation ou sur les intérêts dont elles ont la charge (CE, 22 mai 2012, SNC MSE Le Haut des Epinettes, n° 326367, aux tables).
Concernant une association, elle doit, au regard de son objet, statutaire, justifier d’un intérêt suffisant lui donnant qualité pour introduire un recours contre un permis de construire (CE, 12 avril 2022, n° 451778, aux tables ; CE, 17 février 2010, Société Loca Parc Loisirs, n° 305871, aux tables, prenant en compte également la portée de la mesure litigieuse). Il en est de même lorsque l’association est agréée au sens de l’article L. 141-1 du code de l’environnement en vertu de l’article L. 141-2 du même code dont il résulte que toute association de protection de l'environnement agréée au titre de l'article L. 141-1 justifie d'un intérêt pour agir contre toute décision administrative ayant un rapport direct avec son objet et ses activités statutaires et produisant des effets dommageables pour l'environnement sur tout ou partie du territoire pour lequel elle bénéficie de l'agrément, dès lors que cette décision est intervenue après la date de son agrément (Voyez CE, 18 décembre 2023, Association Patrimoine Environnement et autres, n° 464454, point 2, inédit au recueil).
Lorsque, comme en l’espèce, le requérant, sans avoir contesté le permis initial, forme un recours contre un permis de construire modificatif, son intérêt pour agir doit être apprécié au regard de la portée des modifications apportées par le permis modificatif au projet de construction initialement autorisé (CE, 17 mars 2017, n° 396362 396366, aux tables, précité, dont il ressort qu’avaient intérêt à agir contre un permis de construire modificatif des requérants établissant être propriétaires d’une maison à usage d’habitation située à proximité immédiate de la parcelle d'assiette du projet et ayant produit la décision attaquée, de laquelle il ressortait que le permis litigieux apportait des modifications notables au projet initial, affectant son implantation, ses dimensions et l’apparence de la construction, ainsi que divers clichés photographiques, pris depuis leur propriété, attestant d’une vue directe sur la construction projetée ; CE, 17 février 2023, n° 454284, aux tables).
Dans cette dernière affaire, le Conseil d’État a jugé qu’eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction ou, lorsque le contentieux porte sur un permis de construire modificatif, des modifications apportées au projet.
Mais, en réalité, vous trancherez le litige qui vous est soumis comme juge de plein contentieux dès lors que les permis de construire initiaux du 12 janvier 2012 constituent désormais des autorisations environnementales et qu’il en va de même selon nous des permis de régularisation litigieux, bien que délivrés le 23 juin 2021, dès lors que ces permis se bornent à régulariser le vice de procédure entachant les permis initiaux et s’incorporent à ces derniers.
En effet, il résulte de l’article 15 de l’ordonnance n° 2017-80 du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale que les permis de construire en cours de validité à la date du 1er mars 2017 autorisant les projets d’installation d’éoliennes terrestres sont considérés, à compter de cette date, comme des autorisations environnementales (CE, 22 septembre 2022, Ligue pour la Protection des Oiseaux de l'Aude et autres, n° 443458, aux tables).
Cet article 15 prévoit que :
« Les dispositions de la présente ordonnance entrent en vigueur le 1er mars 2017, sous réserve des dispositions suivantes : 1° Les autorisations délivrées (...) avant le 1er mars 2017, ainsi que les permis de construire en cours de validité à cette même date autorisant les projets d’installation d’éoliennes terrestres sont considérées comme des autorisations environnementales relevant du chapitre unique du titre VIII du livre Ier de ce code, avec les autorisations, enregistrements, déclarations, absences d’opposition, approbations et agréments énumérés par le I de l’article L. 181 2 du même code que les projets ainsi autorisés ont le cas échéant nécessités ; les dispositions de ce chapitre leur sont dès lors applicables, notamment lorsque ces autorisations sont contrôlées, modifiées, abrogées, retirées, renouvelées, transférées, contestées ou lorsque le projet autorisé est définitivement arrêté et nécessite une remise en état ».
En vertu de l’article R. 181-50 du code de l’environnement, les décisions mentionnées aux articles L. 181-12 à L. 181-15 (qui visent l’autorisation environnementale) peuvent être déférées à la juridiction administrative par les tiers intéressés en raison des inconvénients ou des dangers pour les intérêts mentionnés à l'article L. 181-3, lequel vise les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1. L’article L. 211-1 visant la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau, et donc la protection de cette ressource, et notamment la prévention des inondations, la protection des eaux et la lutte contre toute pollution et l’article L. 511-1 la commodité du voisinage, la santé, la sécurité, et la salubrité publiques, l’agriculture, la protection de la nature, de l’environnement et des paysages, l’utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, l’utilisation rationnelle de l’énergie, la conservation des sites et des monuments historiques ainsi que des éléments du patrimoine archéologique.
L’intérêt pour agir des tiers contre les décisions prises en matière de police des installations classées pour la protection de l’environnement diffère selon la qualité du tiers.
Pour les associations, l’intérêt à agir se rapporte pour sa part à leur objet statutaire, selon une analyse désormais classique (voyez par exemple CE, 15 septembre 2004, SARL Lecouffe Darras, n°230665, aux tables ou encore CE, 22 mars 1996, Groupement agricole d'exploitation en commun du Vieux Bougy, n° 128923, aux tables), qu’il faut recouper avec le ressort géographique de son champ d’action, (voyez à ce propos, s’agissant du décret de démantèlement d'une centrale nucléaire, faisant également l’objet d’un recours de plein contentieux : CE, 25 juin 2012, Collectif anti-nucléaire 13 et autres, n° 346395, au recueil).
Pour les tiers personnes physiques, ils doivent justifier d'un intérêt suffisamment direct leur donnant qualité pour en demander l'annulation, compte tenu des inconvénients et dangers que présente pour eux l'installation en cause, appréciés notamment en fonction de la situation des intéressés et de la configuration des lieux (voyez CE, 13 juillet 2012, Société Moulins Soufflet et ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat, n° 339592 340356, aux tables).
Pour les collectivités territoriales, et plus largement les personnes morales de droit public, au sens des articles R. 181-50 et L. 511-1 du code de l’environnement, une personne morale de droit public ne peut se voir reconnaître la qualité de tiers recevable à contester devant le juge administratif une autorisation environnementale que dans les cas où les inconvénients ou les dangers pour les intérêts visés à l’article L. 181-3 sont de nature à affecter par eux-mêmes sa situation, les intérêts dont elle a la charge et les compétences que la loi lui attribue (CE, 1er décembre 2023, Région Auvergne-Rhône-Alpes et autres, n° 470723, aux tables et CE, 1er décembre 2023, Département de la Charente-Maritime, n° 467009, aux tables).
En l’espèce, les communes de Courçais et de Viplaix se prévalent de leur qualité de communes d’implantation du projet et de l’atteinte à leur environnement en résultant, la communauté de communes du pays d’Huriel, dont sont membres les deux communes précitées, de ce que la construction et l’exploitation de six éoliennes sur une partie de son territoire est de nature à affecter son attractivité touristique en raison de la dégradation des paysages qu’elles emportent et du moratoire qu’elle a pris sur les énergies renouvelables, la commune de Mesples, du caractère limitrophe de son territoire de celui de la commune de Viplaix et de ce que l’implantation des machines va affecter son environnement, l’association « société pour la protection des paysages et de l’esthétique de la France », de ce qu’elle est titulaire de l’agrément prévu par l’article L. 141-1 du code de l’environnement et de son objet statutaire consistant notamment à empêcher que les sites naturels ou urbains qui font la beauté du visage de la France, soient dégradés ou détruits par des constructions, M. et Mme V. ainsi que M. L., de l’implantation respectivement de l’éolienne E7 sur leur parcelle cadastrée section C n° 321 située sur le territoire de la commune de Viplaix et de l’éolienne E6 et du poste de livraison n°2 sur sa parcelle cadastrée section C n° 371, ce qui, selon eux, affectera les conditions d’occupation, d’utilisation et de jouissance de leur bien puisqu’ils ne pourront pas librement en disposer, M. et Mme V. encore, de leur qualité de propriétaires d’une résidence située au lieudit La Bergerie à Courçais, qui serait à 720 mètres de l’éolienne E 8 et 779 mètres de l’éolienne E 7 , M. C. et le GFA du domaine des Bregères, dont il est le gérant, M. D., M. B., M. Mme H., de leur qualité de propriétaires de maisons d’habitation situées sur le territoire des communes de Courçais, de Mesples et de Viplaix, de l’impact visuel des éoliennes pour certains d’entre eux et de nuisances sonores résultant des éoliennes pour d’autres.
Or, en invoquant ces éléments, les requérants ne justifient pas de leur qualité de tiers intéressé au sens de l’article R. 181-50 du code de l’environnement et donc d’un intérêt leur donnant qualité pour agir au sens des jurisprudences précitées contre les arrêtés du 23 juin 2021 du préfet de l’Allier accordant au nom de l’État des permis de construire ayant uniquement pour objet, en exécution de la décision précitée du 27 mai 2019 du Conseil d’État, de régulariser les permis de construire initiaux du 12 janvier 2012 à la suite de la régularisation du vice relatif à l’irrégularité de l’avis de l’autorité environnementale et qui n’affectent pas la conception générale de la construction telle qu’elle a été initialement autorisée, en particulier ne modifient pas le projet de parc éolien, et ne portent donc pas atteinte aux intérêts qu’ils invoquent. Étant relevé que si le nouvel avis de l’autorité environnementale diffère substantiellement de celui qui avait été initialement émis, les requérants ne démontrent pas que cet avis révèlerait des impacts non connus du projet sur leur situation, alors que ce projet n’est pas modifié dans sa substance en ce qui concerne ses caractéristiques principales, en particulier sa configuration, son implantation, ses dimensions et son apparence.
Lesdits éléments étaient de nature à donner aux intéressés intérêt à agir contre les permis de construire initiaux, ce qu’ils n’ont pas fait.
Voyez à titre d’exemple : CAA Marseille, 18 juin 2020, n° 19MA05821, point 6 ; CAA Bordeaux, 27 juin 2023, n° 22BX02334, point 7, concernant des jurisprudences se plaçant sous l’angle de l’excès de pouvoir.
Il en irait de même selon nous si vous vous prononciez comme juge de l’excès de pouvoir des permis de régularisation litigieux, y compris les communes de Courçais et de Viplaix sur le territoire desquelles est implanté le projet de parc éolien, qui n’ont pas contesté les permis initiaux, qui seuls affectaient réellement leur situation (voyez sur l’exigence d’un intérêt réel : CE, 22 février 1995, Commune de la Ciotat, n°s 136900 et 136901, aux tables).
Vous pourriez alors transposer la jurisprudence sur les permis modificatifs aux permis de régularisation, ces derniers étant encore moins impactants et étant soumis au même régime juridique que les premiers en ce qui concerne leur contestation (voyez l’article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme et CE, 1er février 2023, n° 459243, aux tables) et les permis de régularisation ayant un régime proche des permis modificatifs en ce qui concerne leur objet puisqu’ils peuvent apporter au projet des modifications qui, sans changer la nature même de ce projet, ne se bornent pas à remédier au vice à régulariser (CE, 17 mars 2021, , n° 436073, aux tables) et voyez CE, section, 26 juillet 2022, n° 437765, au recueil, rapprochant l’objet du permis modificatif à celui du permis de régularisation en jugeant que l’autorité compétente, saisie d’une demande en ce sens, peut délivrer au titulaire d’un permis de construire en cours de validité un permis modificatif, tant que la construction que ce permis autorise n’est pas achevée, dès lors que les modifications envisagées n’apportent pas à ce projet un bouleversement tel qu’il en changerait la nature même. Cf., s'agissant de l'articulation entre les procédures des articles L. 600-5 et L. 600-5-1 du code de l’urbanisme, CE, Section, avis, 2 octobre 2020, n° 438318, au recueil.
Étant précisé que, comme le souligne en défense le ministre, il résulte de l'article L. 600-5-2 du code de l'urbanisme que les requérants partie à l'instance ayant donné lieu à un jugement avant dire droit sur le fondement de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ne peuvent contester la légalité de la mesure de régularisation, sur laquelle le tribunal administratif les a invités à présenter des observations, que dans le cadre de la même instance (CE, 5 février 2021, n° 430990, aux tables).
Voyez aussi CE, 1er février 2023, n° 459243, aux tables, précité, jugeant que :
« Il résulte de l’article L. 600-5-2 du code de l’urbanisme que les parties à une instance portant sur un recours dirigé contre le permis de construire, de démolir ou d'aménager initialement délivré ou contre la décision de non-opposition à déclaration préalable initialement obtenue sont recevables à contester la légalité d’un permis modificatif, d’une décision modificative ou d’une mesure de régularisation intervenue au cours de cette instance, lorsqu’elle leur a été communiquée, tant que le juge n’a pas statué au fond, sans condition de forme ni de délai. ».
Il appartenait donc aux parties de l’instance n° 420554, 420575 introduite devant le Conseil d’État, aux nombres desquelles ne figuraient pas les requérants de la présente affaire, de contester les mesures de régularisation que constituent les arrêtés préfectoraux du 23 juin 2021.
Vous pourriez même, enfin, vous interroger sur le point de savoir si la régularisation du vice de procédure en exécution de la décision précitée du 27 mai 2019 du Conseil d’État sous forme de nouveaux arrêtés préfectoraux octroyant des permis régularisant les permis initiaux du 12 janvier 2012 ne revêt pas un caractère superfétatoire compte tenu de la circonstance que ces derniers permis constituent des autorisations environnementales. Mais, même, pour de telles autorisations, lorsque les dispositions du I de l’article L. 181-18 du code de l’environnement sont mis en œuvre consistant dans un sursis à statuer en vue de la régularisation de l’autorisation initiale, équivalent du sursis à statuer en vue de la régularisation d'une autorisation d'urbanisme (art. L. 600-5-1 du code de l'urbanisme), la régularisation implique l'intervention d'une décision complémentaire corrigeant le vice dont est entachée la décision attaquée et que s’il constate que la régularisation a été effectuée, le juge rejette le recours dont il est saisi (CE, avis, 27 septembre 2018, Association Danger de tempête sur le patrimoine rural et autres, n° 420119, au recueil), régularisation du vice entachant l’autorisation initiale prenant la forme d’une autorisation modificative en vertu des dispositions mêmes du I, 2° de l’article L. 181-18 du code de l’environnement, dans sa version applicable en l’espèce.
Les permis de régularisation litigieux étant en réalité des autorisations environnementales modificatives ou plus précisément de régularisation, susceptibles de recours sous réserve de justifier d’un intérêt à agir réel et direct.
Par ces motifs, nous concluons au rejet pour irrecevabilité de la requête pour défaut d’intérêt à agir des requérants.