M. et Mme B ont une propriété à Champagne-au-Mont-d’Or, « La Châtaigneraie » qui, sur sa limite ouest, surplombe de 4 mètres avec un mur de soutènement en pierre le chemin vicinal n° 05, dit « chemin de Creuse ».
Depuis quelques années ce mur ancien génère quelques litiges : ainsi ressort-il du dossier de première instance que M. Joseph B avait saisi le président du TA de Lyon en juin 2000 d’une demande de référé expertise à la suite d’un éboulement d’une zone de parement inférieur de ce mur durant l’hiver 1999-2000. M. B imputait cet évènement aux différents réseaux situés sous le chemin (égout relevant de la COURLY, téléphone de France Télécom et canalisations d’alimentation en eau relevant de la Cie générale des eaux). L’expert, M. Christian R avait conclu que la cause du dommage était vraisemblablement liée à la poussée des terres situées derrière l’ouvrage, sans lien de causalité avec les travaux effectués sous la chaussée dont les plus récents dataient, alors (en 2001) d’au moins 10 ans. Toutefois, notait-il, la murette latérale du caniveau réalisée il y a une 20aines d’années par la COURLY est une circonstance aggravante. Le relevé du caniveau gênant le libre écoulement des barbacanes a pu contribuer à hauteur de 10 % à l’écroulement de la zone concernée.
Le 11 mars 2001, le mur s’effondre sur une vingtaine de mètres, aussi le maire interdit-il temporairement la circulation automobile et piétonne sur le chemin de Creuse.
Nommé par ordonnance du juge du tribunal d'instance de Lyon le 19 mars 2001, l’expert, M. R, constate dans son rapport déposé une semaine plus tard « qu’il existe un danger effectif de voir le mur s’écrouler en d’autres zones et que la hauteur du mur sur la chaussée et la potentialité de son écroulement constituent donc un danger grave réel pour les personnes ».
Le maire prend alors, le 10 mai 2001, un arrêté mettant en demeure M.B. de faire procéder d’urgence aux travaux de déblaiement, de réparation et de consolidation nécessaires du mur de soutènement et ce sur la longueur totale du mur afin de faire cesser le péril.
L’arrêté de péril précise que ces travaux devront être exécutés dans le délai de 3 mois afin que la voie puisse être réouverte à la circulation normale.
M.B. fait procéder à des travaux (enlèvement des gravats, nettoyage de la chaussée, dévégétalisation à l’arrière du couronnement du mur, curage des barbacanes) ; des inspections ont lieu régulièrement, et les travaux prescrits sont mis à la charge de M. B.
Ce dernier a dû également saisir un expert géotechnique, M.B., sur les conseils du maire de Champagne-au-Mont-d’Or (« l’ouvrage étant situé dans une zone à risques géologiques au POS, les travaux devront faire l’objet d’une étude géotechnique préalable à toute autorisation », lettre du 24 avril 2001).
Cet expert conclut son rapport (septembre 2001) par des « remarques d’ordre juridique » : « Le droit ou l’usage veut qu’un mur de soutènement appartient au propriétaire des terres qu’il soutient. En toute rigueur, et même si l’on accepte de qualifier le mur sinistré de mur de soutènement, il appartiendrait donc à M. B de prendre en charge le coût des travaux de confortement. Or, nous avons vu (…) que le chemin de Creuse a été taillé en déblai d’où son nom. Si ce chemin a été réalisé, probablement avant ou au cours du XIXème siècle, c’est bien évidemment pour créer dans ce secteur une voie de communication d’utilité publique entre le plateau de Champagne-au-Mont-d’Or et le chemin des rivières situé au nord. Seule une collectivité publique a donc pu décider et prendre en charge l’aménagement d’un tel chemin. On peut donc considérer que c’est elle, à l’époque, qui a construit un ouvrage qui s’avère aujourd’hui fragile, voire dangereux. On ne voit d’ailleurs pas pourquoi le propriétaire à l’époque du terrain appartenant aujourd’hui à M. Boghossian aurait éprouvé le besoin de construire un tel ouvrage alors que l’accès à la propriété se fait au sud à partir de la rue Dominique Vincent. Dans ces conditions, la collectivité publique responsable aujourd’hui du chemin de Creuse pourrait donc prendre en compte, au moins partiellement, le coût des travaux de confortement nécessaires ».
Par courrier du 1er juin 2004 (LRAR) M.B. informe le maire que le mur étant une dépendance accessoire du DP, la commune est seule responsable, qu’il n’entend plus réaliser de travaux et demande le remboursement des frais engagés, « soit environ la somme de 75 000 € ».
Le 15 mars 2007, M. et Mme B, la SA Elmas et la société « Les Grillons » saisissent le TAL d’une demande tendant à la condamnation de la COURLY à leur verser la somme de 48 318, 19 € assortie des intérêts légaux à compter de leur demande préalable avec capitalisation des intérêts + FNCD.
Le tribunal administratif donne satisfaction à M. et Mme B (quid des autres ?) à hauteur de 44 994, 44 € outre intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2004, et capitalisation des intérêts échus à compter du 15 mars 2007. Il met également à la charge de la COURLY les frais d’expertise liquidés et taxés à la somme de 2942, 63 €, ainsi que 800 € au titre des FNCD.
Tout d’abord, la circonstance que M. et Mme B n’aient pas contesté à temps l’arrêté de péril leur enjoignant de faire certains travaux ne saurait leur interdire de demander le remboursement des sommes indûment versées. Car toute leur argumentation consiste à dire qu’ils n’avaient pas à payer les travaux en question dès lors que le mur ne leur appartenait pas, puisqu’il est une dépendance du domaine public. Ce qui revient, selon nous, à invoquer l’illégalité de cet arrêté à l’appui de leur demande.
Si un ouvrage, en effet, fait partie du domaine public, la procédure de l’arrêté de péril ne peut être mise en œuvre (CE 28 mars 1969, Dames F et G, req. 72678, Leb. 189, Concl. Kahn AJDA 1969, p. 359 – 20 février 1987, Epoux A, Concl. E. Guillaume, req. 72662 - 7 juillet 2006, Mlle J, req. 275241.
En l’espèce, les titres de propriété produits en 1ère instance qui sont relatifs au terrain et à l’habitation de M. et Mme B ne mentionnent pas le mur de soutènement. Aucun titre de propriété relatif à ce mur situé, comme il a été dit en bordure de propriété, n’est produit.
Il ne nous semble guère contestable que ce mur fait partie du domaine public, sur ce point la jurisprudence n’est pas avare d’exemples, s’agissant des murs de soutènement, des levées de terre qui leur servent d’assiette, des talus et murettes nécessaires à leur soutien et à la protection des chaussées, des barrières et murs de protection. Pour des exemples très proches de notre dossier : CE 22 février 1980, J et Mutuelle assurance artisanale de France, req. 12130, B, concl. B. Genevois – 23 mai 1980, Ville de Falaise, req. 04639 et, déjà cité, 7 juillet 2006, Mlle J.
« En application de la théorie de l’accessoire, note Jean Dufau dans son ouvrage sur le domaine public, sont considérés comme dépendances des voies publiques de nombreux éléments naturels ou artificiels compris dans l’emprise des routes et qui sont, en principe, nécessaires à la conservation et à l’exploitation des routes, ainsi qu’à la sécurité et à la commodité des usagers ».
Si ce mur fait partie du domaine public, il n’appartient effectivement pas aux époux B de l’entretenir ni de procéder aux travaux rendus nécessaires par sa dégradation.
Aux termes de l’article L5215-28 du CGCT : « Les immeubles et meubles faisant partie du domaine public des communes appartenant à l'agglomération sont affectés de plein droit à la communauté urbaine, dès son institution, dans la mesure où ils sont nécessaires à l'exercice des compétences de la communauté. Le transfert définitif de propriété ainsi que des droits et obligations attachés aux biens transférés est opéré par accord amiable. A défaut d'accord amiable, un décret en Conseil d'Etat, pris après avis d'une commission dont la composition est fixée par arrêté du ministre de l'intérieur et qui comprend notamment des maires et des conseillers généraux, procède au transfert définitif de propriété au plus tard un an après les transferts de compétences à la communauté urbaine (…) ». Aux termes du I de l’art. L. 5215-20 du même code : « La communauté urbaine exerce de plein droit, au lieu et place des communes membres, les compétences suivantes : (…) création ou aménagement et entretien de voirie (…)
En application de ces dispositions, comme le relève le tribunal administratif de Lyon, la voirie du territoire de la commune de Champagne-au-Mont-d’Or relève de la propriété et des attributions de la Communauté urbaine de Lyon, constituée en 1969.
Il nous semble, dès lors, que les premiers juges n’ont pas eu tort de faire droit à la demande des époux B. en mettant à la charge de la COURLY la somme de 44 994, 44 € avec intérêts au taux légal à compter du 1er juin 2004 et capitalisation des intérêts échus au 15 mars 2007, ainsi que les frais de l’expertise.
Par ces motifs, nous concluons au rejet de la requête.