Fonctionnaire victime d'une rechute d'accident de service : compétence du dernier employeur pour fixer la date de consolidation

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Décision de justice

TA Grenoble – N° 1702024 – 20 juin 2019 – C+

Juridiction : TA Grenoble

Numéro de la décision : 1702024

Date de la décision : 20 juin 2019

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

Fonctionnaire, Accident de service, Accident de travail imputable au service, Rechute, Etat de santé, Date de consolidation, Succession d’employeurs, Compétence

Rubriques

Fonction publique

Résumé

Succession d’employeurs : compétence du dernier employeur pour se prononcer sur la consolidation de l’état de santé d’un agent, victime d’une rechute d’un accident de service survenu auprès de l’employeur d’origine

Un agent communal a été victime d’un accident de travail imputable au service. Puis, à sa demande, l’agent a été muté dans un EPCI. Il est victime d’une rechute. Le maire de la commune prend un arrêté pour fixer la date de consolidation de l’état de santé de l’agent, alors que celui-ci est désormais employé par l’EPCI. Le tribunal annule pour incompétence l’arrêté du maire : seule l’autorité territoriale d’accueil est compétente pour se prononcer sur la consolidation de l’état de santé de l’agent, quand bien même la rechute est consécutive à l’accident de service qui est survenu lorsque l’agent était au service de la commune.

Conclusions du rapporteur public

Mathieu Heintz

Rapporteur public au tribunal administratif de Grenoble

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  • IDREF

DOI : 10.35562/alyoda.6550

Mme X. est attachée principale. Elle était employée par la commune de Claix lorsqu’elle a été victime d’un accident de travail imputable au service le 30 octobre 2012, puis d’une rechute le 24 juillet 2015 qui a occasionné divers arrêts de travail consécutifs dans l’automne 2015 et jusqu’au 24 janvier 2016.

A sa demande, Mme X. a été mutée au 1er janvier 2016 dans les services de Grenoble Alpes Métropole.

Elle a alors été victime d’une nouvelle rechute occasionnant des arrêts de travail du 25 mai 2016 au 30 août 2016, puis à nouveau prolongés jusqu’au 31 janvier 2017.

Par ailleurs, le 22 septembre 2016, la commission de réforme a estimé que l’état de santé de Mme X. n’ayant pas été consolidé, les arrêts de travail antérieurs ne pouvaient pas être des rechutes de l’accident initial, mais devaient être considérés comme la prolongation des arrêts de travail antérieurs. Elle a également prescrit une expertise, qui a été réalisée par le docteur M. le 22 novembre 2016.

A la demande de la commune de Claix, la commission de réforme a à nouveau examiné le dossier de Mme X., et a estimé le 9 février 2017 que l’état de santé de l’intéressée était consolidé au 22 novembre 2016. En se fondant sur cet avis, le maire de Claix, par une décision du 13 février 2017, a décidé que l’accident de service du 30 octobre 2012 était consolidé à la date du 22 novembre 2016, et que l’agent serait placé en congé maladie ordinaire postérieurement à cette date.

C’est dans ce contexte que Mme X. vous demande d’annuler la décision du 13 février 2017.

Vous avez informé les parties de ce que votre jugement était susceptible d’être fondé sur un moyen d’ordre public tiré de l’incompétence de l’auteur de l’acte.

Nous pensons en effet, que le maire de Claix n’était plus compétent en février 2017 pour fixer la date de consolidation de l’état de santé de Mme X., dès lors que celle-ci est un agent de Grenoble Alpes Métropole depuis le 1er janvier 2016, et quand bien même la rechute est consécutive à l’accident de service qui est survenu lorsque l’agent était au service de la commune.

La mutation d’un agent titulaire, d’une collectivité locale à une autre, a pour effet que, à la date à laquelle la mutation prend effet, l’agent est radié des effectifs de la collectivité d’origine. La gestion statutaire de l’agent appartient à cette date à l’autorité d’accueil (CE, 10 octobre 2014 commune de Creil : n° 369533, B ; AJDA, 2014, p. 1974 : affaire qui concernait la situation d’un fonctionnaire territorial affecté dans un service d’une commune dont la compétence a été transférée à un établissement public de coopération intercommunale ; l’agent, bénéficiaire d'un congé de maladie à la date du transfert de compétences, doit être regardé, pour l'application de l'article L5211-4-1 du code général des collectivités territoriales, comme remplissant en totalité ses fonctions dans le service concerné par le transfert de compétences, nonobstant l'interruption d'activité qui résulte de son congé légal. Dans cette hypothèse, l'établissement public verse au fonctionnaire son traitement dans les conditions prévues par les dispositions précitées du 2° de l'article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et, le cas échéant, pourvoit à son reclassement en cas d'inaptitude temporaire ou définitive consécutive à l'accident de service qui a justifié le placement en congé de maladie).

Ce principe n’est pas remis en cause lorsque l’agent a subi un accident de service dans sa collectivité d’origine puis est victime d’une rechute alors qu’il est au service d’une nouvelle collectivité. Dans cette hypothèse, la collectivité au service de laquelle se trouvait l’agent lors de l’accident de service doit seulement supporter les conséquences financières, et non statutaires, de la rechute consécutive à cet accident, quand bien même cette rechute est survenue alors que l’agent est au service d’une nouvelle collectivité. Cette responsabilité financière s’opère par un mécanisme de reversement entre collectivités : l’employeur d’origine doit rembourser au nouvel employeur les traitements qui ont été versés à l’agent et qui sont liés à la rechute ainsi que les éventuels honoraires médicaux et frais que le nouvel employeur aurait pris en charge du fait de cette rechute (CE, 28 novembre 2011, commune de Roissy-en-Brie, n° 336635, B ; AJDA 2011. 2382 ; AJCT 2012. 216, obs. D. Krust ; JCP A mars 2012. com. 30, obs. A. Taillefait. Voir également CE, 24 novembre 2017, syndicat mixte pour l’étude et le traitement des ordures ménagères de l’Eure, n° 397227, B ; AJFP 2018, p. 107 ; conclusions E. Cortot-Bouchet, JCP A n° 6, 2048) . Et le pouvoir de décision de la date de consolidation de l’état de santé appartient à l’autorité administrative dont relève l’agent (CE, 27 mars 2015, commune de Bègles n° 362407, B).

En l’espèce, dès lors que Mme x. n’était plus dans les effectifs de la commune de Claix depuis le 1er janvier 2016, le maire de Claix était incompétent pour prendre une décision, le 13 février 2017, relative à la consolidation de l’état de santé de son ancien agent ; cette décision appartient au seul président de Grenoble Alpes Métropole. Le cas échéant, la commune de Claix devant uniquement supporter les conséquences financières de la rechute consécutive à l’accident de service du mois d’octobre 2012.

Vous annulerez donc la décision du 13 février 2017 pour incompétence de l’auteur de l’acte.

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