Précisions sur l’obligation d’affichage de l’avis sur l’enquête publique relative au PLU dans des communes de petite taille

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Décision de justice

CAA Lyon, 1ère chambre – N° 10LY01907 – Commune de Seyssuel – 29 novembre 2011 – C

Requêtes jointes : 10LY01908, 10LY01910, 10LY01911

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 10LY01907

Numéro Légifrance : CETATEXT000024910326

Date de la décision : 29 novembre 2011

Code de publication : C

Index

Mots-clés

PLU, Affichage, Publicité, Petites communes

Rubriques

Urbanisme et environnement

Résumé

L’avis d’enquête publique relative au plan local d’urbanisme, peut, dans de petites communes, recevoir un affichage unique en mairie. A condition, toutefois, que l’urbanisation de la commune ne soit pas organisée en pôles clairement distincts les uns des autres. Le cas échéant, un affichage serait nécessaire dans chacun desdits pôles. La population seule de la commune ne constitue, dès lors, pas un critère suffisant dans l’établissement des modalités de publicité.

Voir également : C.E. 10 février 2010, Commune de Saint-Lunaire, n° 327149 ; C.E. 12 mars 2010, Lille métropole communauté urbaine, n° 312108 ;  C.E. 18 juin 2010, Ville de Paris, n° 326708 ; C.E. 31 mars 2010, Commune de Chateauneuf-du-Rhône, n° 313762

Conclusions du rapporteur public

Jean-Paul Vallecchia

Rapporteur public à la cour administrative d'appel de Lyon

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DOI : 10.35562/alyoda.5930

Par délibération du 15 janvier 2008 le Conseil Municipal de Seyssuel – Commune du Département de l’Isère – a approuvé son Plan Local d’Urbanisme (PLU).

M.F.et autres, la SCEA Les Serines d’Or, M.L., la Société des Vins de Vienne et la SCEA Les Vignobles de Seyssuel ont – par quatre requêtes distinctes – demandé au Tribunal Administratif de Grenoble et obtenu de cette juridiction l’annulation de cette délibération du 15 janvier 2008 par jugement du 23 juin 2010 statuant sur les quatre recours.

La qualité pour agir de certains des demandeurs de première instance était contestée, seule celle de M. L. n’a pas été retenue par les premiers juges.

Sur le fond, les premiers juges ont relevé :

- l’insuffisance de l’affichage de l’avis informant le public sur le projet de PLU de la Commune notamment eu égard aux prescriptions de l’article R123-14 du Code de l’Environnement.

- des modifications apportées après l’enquête publique au projet de PLU et ne procédant pas de cette enquête ;

- l’existence d’une exception, relative à l’implantation des constructions, qui, en raison de son caractère trop général méconnaît l’article R123-9 du code de l’urbanisme.

Au travers de quatre requêtes distinctes que vous pourrez joindre, la COMMUNE DE SEYSSUEL interjette appel de ce jugement et vous en demande l’annulation.

Les intimés devant votre Cour sont les demandeurs de première instance.

Dans trois des quatre dossiers la défense est identique.

Seul M.F. se démarque de cette défense en présentant, d’une part, par la voie de l’appel incident, des conclusions indemnitaires qui, en tant que litige indépendant de l’appel principal, sont irrecevables, d’autre part, des conclusions reconventionnelles pour la réparation d’un préjudice moral, également irrecevables pour la même raison et qui – de surcroît – sont nouvelles en appel, ce qui représente un autre motif d’irrecevabilité.

Votre Cour a communiqué aux parties un moyen d’ordre public permettant de relever ces irrecevabilités.

Alors qu’en est-il des motifs d’annulation retenus par les premiers juges et que la COMMUNE DE SEYSSUEL conteste devant votre Cour… ?

En ce qui concerne d’abord la carence de la publicité de l’enquête publique… ce sont les dispositions de l’article R123-14 du Code de l’Environnement – auxquelles renvoie le code de l’urbanisme – qui traite de cet aspect et prévoit non seulement une diffusion dans la presse – un point qui n’est pas discuté ici – mais aussi une publicité « par voie d’affiches » (au pluriel) dit le texte… un pluriel qui pourrait peut-être donner une indication sur l’application de ces dispositions… mais sans que cela soit très déterminant, s’agissant d’un texte qui envisage des opérations portant sur plusieurs Communes…

Les juges du premier ressort ont, pour leur part, considéré que l’unique affichage en Mairie auquel il a été procédé est insuffisant… en raison d’une organisation de la COMMUNE DE SEYSSUEL – qui compte quelque 2000 habitants – en plusieurs hameaux distincts…

La taille de la Commune est évidemment à prendre en compte : voyez par exemple CAA de Bordeaux n° 10BX00259 du 14 octobre 2010 COMMUNE DE GUCHAN

Ici nous avons affaire à une petite Commune, de moins de 2000 habitants, ce qui pourrait plaider en faveur de l’affichage unique en Mairie.

Mais il faut aussi considérer la répartition des zones urbanisées sur le territoire communal. Et il est vrai que, pour des Communes organisées en hameaux, la jurisprudence opte généralement pour un affichage multiple : voyez par exemple CAA de Paris n° 10PA04346 du 19 mai 2011 Mme H.

Ici, comme cela apparaît notamment au travers du rapport de présentation du PLU, le village est organisé en plusieurs ensembles distincts, dont un notamment – le quartier Bon Accueil – est plus excentré du bourg que les autres et intégré à l’agglomération de Vienne.

Même si les enquêtes publiques ne mobilisent généralement pas les foules, cette situation – associée à un affichage unique en Mairie –  pourrait expliquer que peu de personnes se soient déplacées ou aient émis des observations écrites à l’occasion de l’enquête publique (seulement 36 selon le rapport du Commissaire Enquêteur…).

Dans ce contexte – et malgré la superficie réduite de la Commune – nous invitons votre Cour à considérer que le seul affichage en Mairie de la publicité de l’enquête publique ne répond pas aux prescriptions du code de l’environnement.

Cette approche vous conduira à confirmer le premier motif d’annulation retenu par les premiers juges.

En ce qui concerne ensuite la modification du projet après l’enquête publique en violation des dispositions de l’article L123-14 du code de l’urbanisme…

Ces modifications ont été nombreuses. Elles ont, pour la plupart, résulté des avis notamment émis par le Préfet de l’Isère, la Communauté d’Agglomération du Pays Viennois et la Chambre d’Agriculture.

Comme vous le savez, malgré l’intervention de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU), la jurisprudence a confirmé l’exigence de la double condition de modifications découlant de l’enquête publique et ne bouleversant pas l’économie générale du projet de Plan : pour mémoire Conseil d’Etat n° 312108 du 12 mars 2010 COMMUNAUTE URBAINE LILLE METROPOLE.

Sur le premier aspect, les avis dont ont été tirées les modifications en question étaient présents dans le dossier d’enquête publique. Cette seule circonstance pourrait, assez logiquement d’ailleurs, permettre de conclure que les modifications découlent, en conséquence, de l’enquête : voyez sur ce point CAA de Nantes n° 10NT02554 du 15 juillet 2011 COMMUNAUTE URBAINE NANTES METROPOLE.

Votre Cour semble s’être aussi orientée vers une approche similaire : voyez par exemple CAA Lyon n° 08LY00739 du 6 avril 2010 Mme G.

Dans notre affaire, il apparaît en outre que le Commissaire Enquêteur s’est prononcé en faveur de la prise en compte de ces avis en se les appropriant.

Et quand bien même ces avis auraient été irrégulièrement édictés – ce que les intimés tentent de démontrer – cela serait sans rapport avec la question qui doit être tranchée ici, à savoir le lien direct entre les modifications et l’enquête publique.

Ce lien nous paraît suffisamment établi pour conclure que les modifications apportées procèdent de l’enquête : ces avis ont été intégrés au déroulement de l’enquête public, le public pouvait s’en emparer pour les critiquer ou les approuver et le Commissaire Enquêteur s’en est lui-même saisi.

Il nous semble donc que, pour l’application de l’article L123-14 du code de l’urbanisme – sous son premier aspect – vous pourrez vous éloigner de la position des premiers juges et infirmer le deuxième motif d’annulation qu’ils ont retenu.

Sur le second aspect, de l’économie générale du projet – qui n’avait pas été retenu par les premiers juges – le nombre de modifications est en réalité inversement proportionnel à leur importance.

Sans entrer dans le détail, il s’agit surtout de report ou de mises à jour de servitudes d’urbanisme, de précisions rédactionnelles ; les modifications du zonage ou de la règlementation restant très limitées et ne concernant qu’une petite partie du territoire communal.

Pour ce qui est enfin du troisième motif d’annulation retenu en première instance, l’introduction d’une disposition relative à l’implantation des constructions méconnaissant l’article R123-9 du code de l’urbanisme…

Cette disposition est présente dans le dernier alinéa de la quasi-totalité des articles 6 et 7 du PLU de la COMMUNE DE SEYSSUEL et elle permet de ne pas exiger, pour les aménagements, reconstructions et extensions de bâtiments existants ainsi que pour les constructions à usage d’équipement collectif et les ouvrages techniques nécessaires au fonctionnement des services publics ou collectifs, de ne pas exiger les prescriptions applicables en matière d’implantation des constructions.

Il s’agit ici de savoir si nous sommes en présence d’une véritable exception à la règle, c'est-à-dire si la définition qui est donnée est suffisamment précise pour être acceptée dans ce cadre de l’exception, distincte de la notion de dérogation qui rejoint celle d’adaptation mineure : voyez sur ce point Conseil d’Etat n° 124532 du 10 novembre 1993 M. et Mme S. et Conseil d’Etat n° 78831 du 31 janvier 1990 Epoux L.

La disposition en question précise – de manière limitative – les constructions qui sont exemptées de la règle d’implantation. Elle ne nous paraît pas déroger au cadre normatif minimum dont votre Cour avait sanctionné l’absence dans son CAA Lyon n° 93LY01300 du 20 décembre 1994 Epoux D. La disposition qui avait été examinée par votre Cour à l’occasion de cette affaire était particulièrement floue et pouvait laisser envisager beaucoup d’abus : tel ne nous paraît pas être le cas ici.

Nous invitons votre Cour à infirmer le troisième motif d’annulation retenu par le Tribunal Administratif de Grenoble.

Ainsi, seul le premier motif d’annulation, relatif à la publicité de l’enquête publique – et qui est de nature à entraîner l’annulation totale de la délibération du 15 janvier 2008 d’approbation du PLU de la COMMUNE DE SEYSSUEL – nous paraît pouvoir être confirmé par votre Cour.

Par ces motifs nous concluons :

- au rejet des conclusions d’appel principal qui vous sont présentées, dans les quatre requêtes, par la COMMUNE DE SEYSSUEL :

- au rejet des conclusions d’appel incident, reconventionnelles et en injonction de M.F.;

- au rejet, dans les circonstances de l’espèce, des conclusions que les requérants présentent contre la Commune au titre de l’article L761-1 du Code de Justice Administrative.

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