Échange de parcelles supportant un chemin rural et information du public

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Décision de justice

CAA Lyon, 4ème chambre – N° 23LY02172 – Commune de Communay – 20 mars 2025 – C+

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 23LY02172

Numéro Légifrance : CETATEXT000051363222

Date de la décision : 20 mars 2025

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

Chemin rural, Échange de parcelles, Information du public, L. 3222-2 du CGPPP, L. 161-10-2 du code rural et de la pêche maritime

Rubriques

Actes administratifs

Résumé

En vertu de la combinaison de l’article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques et de l’article L. 161-10-2 du code rural et de la pêche maritime, toute délibération autorisant un échange de parcelle servant d’assiette à un chemin rural doit être précédée d’une information du public réalisée par mise à disposition en mairie des plans du projet accompagné d’un registre destiné à recueillir les observations du public.

Méconnaît ces dispositions, la délibération autorisant le maire à signer avec un tiers une promesse d’échange, puis l’acte d’échange assorti d’une condition suspensive afférente à l’organisation de la mise à disposition du public. La promesse engageant irrévocablement la commune, l’organe délibérant, seul habilité à autoriser les opérations immobilières en vertu de l’article L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales, n’a plus la faculté de modifier les conditions de l’échange – ou d’y renoncer – afin de tirer les conséquences de la mise à disposition.

01-03-01, Actes, Validité des actes administratifs, Questions générales
71-02-006, Voirie, Régime juridique de la voirie, Aliénation de chemins ruraux

Chemin rural : le partage (d’information) avant l’échange

Christophe Roux

Professeur de droit public, Directeur de l’EDPL (UR 666), Université Jean Moulin Lyon 3

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DOI : 10.35562/alyoda.10033

En vertu de la combinaison de l’article L. 3222-2 du code général de la propriété des personnes publiques et de l’article L. 161- 10-2 du code rural et de la pêche maritime, toute délibération autorisant un échange de parcelle servant d’assiette à un chemin rural doit être précédée d’une information du public réalisée par mise à disposition en mairie des plans du projet accompagné d’un registre destiné à recueillir les observations du public.

Méconnaît ces dispositions, la délibération autorisant le maire à signer avec un tiers une promesse d’échange, puis l’acte d’échange assorti d’une condition suspensive afférente à l’organisation de la mise à disposition du public. La promesse engageant irrévocablement la commune, l’organe délibérant, seul habilité à autoriser les opérations immobilières en vertu de l’article L. 2241 -1 du code général des collectivités territoriales, n’a plus la faculté de modifier les conditions de l’échange – ou d’y renoncer – afin de tirer les conséquences de la mise à disposition.

Sauf à convoquer quelques manifestations épidermiques – et censitaires – (mécénat, crowdfunding…), la « démocratie domaniale » reste l’un des volets les moins (béatement ?) béant de la « démocratie administrative » (en ce sens, Ch. Roux, Droit administratif des biens : Dalloz, Mémentos, 3e éd., 2024, spéc. p. 52 et s. – v. aussi, plus largement, Ch. Testard, Pouvoir de décision unilatérale de l'administration et démocratie administrative : LGDJ, BDP, 2018), la formule faisant écho à la participation – directe ou indirecte – du public à la décision publique (et donc « domaniale » dans le cadre qui nous occupe ici). Il ne faut toutefois désespérer de rien et, quand bien même confineraient-ils à l’exception, quelques mécanismes juridiques épars tendent malgré tout à en assurer la floraison, ceci alors que, dans une visée plus large, la gestion participative forme l’un des piliers d’un « droit des biens communs » en gestation (V. not. J. Meersman, Contribution à une théorie juridique des biens communs, LGDJ, BDP, 2024 – du même auteur, Communs et propriété publique : RDP 2024-3, p. 6).

C’est ce que permet d’illustrer la décision du 20 mars 2025, par laquelle la cour administrative d’appel de Lyon a confirmé (TA Lyon, 11 mai 2023, n° 2204246) l’annulation d’une délibération du conseil de municipal de Communay. Celle-ci, d’une part, avait approuvé l’échange d’un chemin rural (en contrepartie d’une autre parcelle) ; d’autre part, avait acté la signature d’une promesse synallagmatique d’échange, assortie d’une condition suspensive tenant à la réalisation d’une information préalable du public, ceci (a priori) conformément à l’article L. 161- 10-2 du Code rural et de la pêche maritime selon lequel « l'information du public est réalisée par la mise à disposition en mairie des plans du dossier et d'un registre avant la délibération autorisant l'échange, pendant un mois. Un avis est également affiché en mairie. Les remarques et observations du public peuvent être déposées sur un registre ». On se contentera ici de rappeler à titre liminaire que de tels chemins sont classés par détermination de la loi au sein du domaine privé (CGPPP, art. L. 2212-2) là où, pourtant, leur affectation « à l’usage direct du public » (expressément relevée par l’article L. 161-1 du Code rural et de la pêche maritime) devrait les conduire à gagner le domaine public ; partant cet ersatz de « domaine privé affecté » renferme bien des particularismes (v. H. Devillers, À la croisée des chemins ruraux. Réflexions sur leur régime domanial : Dr. voirie 2021, n° 223, p. 224), jusqu’à friser l’a-domanialité (selon l’expression de C. Chamard-Heim, Les forêts publiques. A-domanialité ou domanialité atypique ? , in Mélanges J. Untermaier, Mare & Martin, 2018, p. 85).

Pour confirmer la censure, la cour a en effet estimé qu’une telle délibération était viciée, étant entendu que, en approuvant de manière irrévocable (via la promesse) l’échange du chemin rural, la commune de Communay avait méconnu son obligation procédurale d’information du public. De fait, quand bien même celle-ci aurait été opérée préalablement à l’échange, au gré de la condition suspensive intégrée dans la promesse, l’information du public aurait été, en tout état de cause, dépourvue d’effet utile puisqu’il aurait dû être procédé à l’échange sans tenir compte de ses résultats éventuels.

La présente décision vient ce faisant attester la montée en puissance des exigences tenant à l’information du public en matière domaniale, et la censure juridictionnelle qui peut résulter de leurs inobservations (v. plus largement Ch. Testard, Pour une sanctuarisation du traitement contentieux de la participation du public : Dr. adm. 2020, étude 8). D’aucuns pourront pointer accessoirement un paradoxe (apparent), le domaine privé (puisque les chemins ruraux en ressortent) se montrant ici plus accueillant que le domaine public (pourtant « chose publique » et « chose du public ». V. Ch. Lavialle, Le domaine public : chose publique ou patrimoine public ?, in Pouvoir et Gestion. Histoire, Gestion. Organisation. P.U. Toulouse, 1997, p. 281) pour se draper de transparence (II). La présente décision vient par ailleurs, et avant toute chose, illustrer pour la première fois sur le plan contentieux une faculté domaniale ouverte récemment : l’échange de chemin rural, dont, précisément, les conditions procédurales rigoureuses de mise en œuvre n’ont pas été respectées (I).

I. L’échange de chemin rural : innovation et conditions

À notre connaissance (v. postérieurement, CAA Lyon, 3 juillet 2025, n° 23LY03050), la présente décision constitue la première illustration contentieuse d’une novation actée par la loi 3DS et tendant à autoriser, depuis lors, la possibilité de procéder à l’échange d’un chemin rural (L. n° 2022-217, 21 févr. 2022, art. 103, – dite 3DS –, codifié à l'article L. 161-10-2 du Code rural et de la pêche maritime. – V. Ph. Yolka, Feu l'interdiction d'échanger les chemins ruraux : Dr. voirie 2022, n° 225, p. 51. – M. Boul, Loi 3D(s) : les chemins ruraux en réalité augmentée : Dr. et ville 2022/2, p. 121 ; du même auteur, Le passage des chemins ruraux à la loi 3DS : JCP N 2022, n° 1153 ; v. encore Ph. Nugue, La loi 3DS, les voiries et les chemins : Dr. voirie 2022, n° 225, p. 47 ; C. Chamard-Heim, Les apports de la loi 3DS au droit des propriétés publiques : JCP A 2022, n° 2140). Jusqu’à cette loi, en effet, le juge administratif s’en tenait à une lecture (constante) aussi littérale que scrupuleuse de l’article L. 161-10 du Code rural et de la pêche maritime faisant écho aux seules opérations de « vente » concernant de tels chemins. Partant, considérant visiblement la disposition comme dérogatoire par rapport à l’article L. 1111-4 CGPPP (ouvrant, à titre général et à toutes les personnes publiques sans exception, la possibilité de recourir à l’échange), le juge en déduisait l’impossibilité de procéder à l’échange de chemins ruraux (V. not. CE, 17 novembre 2010, n°  338338 : JurisData n° 2010-021504 ; AJCT 2011, p. 69, note A. Penaud ; JCP A 2011, 2003, note J.-Ch. Videlin et Ph. Yolka – CE, 20 février 1981, n° 13526, recueil Lebon, T. 637 ; Dr. adm. 1981, comm. 114 – CE, 23 mai 1986, n° 48303 ,recueil Lebon 147 ; AJDA 1986, II, p. 462, note J. C. ; Dr. adm. 1986, comm. 377 ; RDI 1986, p. 446 – CE, 6 juillet 1983, n° 23125, recueil Lebon, T. 831 ; Dr. adm. 1983, comm. 349).

Nul doute que la protection des libertés publiques (liberté d’aller et venir, au premier chef), y trouvait son compte, autant que la préservation des activités de circulation pastorales et/ou agricoles y prenant siège. Nul doute, encore, qu’une telle faculté pouvait parfois mal se concevoir : comment préserver l’affectation et la « continuité » d’un chemin rural en présence d’un échange de parcelles (sauf à détourner ledit chemin) ? En pratique, néanmoins, la prohibition drainait son lot de contrariétés (v. Ph. Yolka, Feu l'interdiction d'échanger les chemins ruraux : Dr. voirie 2022, n° 225, p. 51), notamment lorsque l’emprise du chemin évoluait (et se déplaçait) au fil du temps, les opérations de remembrements étant par ailleurs inutilement entravées. Il fallait dès lors régulièrement s’en remettre aux bons offices du temps – et prier pour que les habitants ne soient pas tentés par le prétoire – et au bénéfice de la prescription acquisitive, sauf évidemment à emprunter des chemins de traverse, c’est-à-dire en opérant des ventes successives en sens contraires (y compris par rapport au droit positif…). C’est la raison pour laquelle, après quelques atermoiements, la loi 3DS devait mettre fin au statu quo ante, tout en assortissant le mécanisme, au sein de l’article L. 160-10-2 nouvellement créé, de nombreux garde-fous.

Le premier (et compte tenu des risques de privatisation, notamment par les riverains immédiats et/ou agriculteurs) tiré de la nécessité de préserver la continuité du chemin rural par le jeu de clauses en assurant la garantie, ce qui illustrera, d’une part, l’existence bien réelle d’un « domaine privé affecté » (v. en ce sens par exemple, J.-G. Sorbara, L’affectation et le domaine : Mélanges Ch. Lavialle, PU Toulouse, 2020, p. 691) ; d’autre part, le fait que les protections constitutionnelles tirées de la protection de la continuité du service public et/ou de l’exercice des libertés publiques excèdent de beaucoup les seules dépendances du domaine public (Cons. const., 26 juin 2003 , n° 2003-473 DC, Loi habilitant le Gouvernement à simplifier le droit – à ce sujet, v. not. É. Fatôme, À propos des bases constitutionnelles du droit du domaine public, AJDA, 2003, p. 1193 – Y. Gaudemet, Constitution et biens publics : NCCC 2012, n° 7 – É. Langelier, Existe-t-il un statut constitutionnel du droit administratif des biens ? : RDP 2011-6, p. 1493). En l’espèce, le projet d’échange semblait y répondre : le copermutant s’engageait en effet à créer, par substitution, un chemin dédié aux « mobilités douces », lequel répondait par ailleurs aux conditions de l’alinéa 2 du nouveau dispositif, l’échange, pour être légal, devant respecter « la largeur et la qualité environnementale, notamment au regard de la biodiversité, du chemin remplacé ».

La seconde garantie apportée tient quant à elle tout entière dans l’exigence d’information du public, étant entendu que l’échange peut porter atteinte aux libertés publiques, au droit des riverains, voire entrainer une dépossession patrimoniale indue comme lorsque l’échange est constitutif d’une libéralité publique prohibée. Comme relayé précédemment, le nouvel article L. 160-10-2 du Code rural impose à cette fin que, a maxima un mois avant l’adoption de l’acte d’échange, une mise à disposition des plans du dossier et d’un registre soit assurée en mairie (en sus d’un affichage), le registre servant à consigner, le cas échéant, les remarques et observations du public. La disposition se fait par la suite taiseuse, mais l’on voudra probablement comprendre, entre les lignes (et quand bien même aurait-il été utile de se faire plus volubile), que c’est seulement après avoir tenu compte précisément de ces observations et remarques (dont on miserait sur le caractère négatif…) que l’échange pourra être valablement acté.

C’est ce que, prima facie, la collectivité semblait avoir mis en œuvre, la délibération entérinant la faculté de passer une promesse de vente assortie précisément d’une condition suspensive tenant à la réalisation préalable de cette information(-consultation) préalable. En pratique, il n’en était rien et c’est à juste titre que la cour lyonnaise est venue confirmer l’annulation de la délibération litigieuse.

II. La méconnaissance de l’obligation d’information préalable du public

Le respect des exigences procédurales issues de l’article L. 160-10-2 du Code rural constituait en effet un leurre. La délibération venait, qui plus est par le truchement d’une promesse de vente, cristalliser l’échange sans que l’information préalable du public puisse jouir, dans ces circonstances, du moindre effet utile. À l’instar d’une promesse de vente qui vaut vente (C. civil, art. 1589), une promesse d’échange… vaut échange, ceci conformément à la lettre de l’article 1703 du même code renvoyant au régime de la vente (« l'échange s'opère par le seul consentement, de la même manière que la vente »). Plus largement, le juge administratif applique aux personnes publiques le principe posé à l’article 1583 selon lequel la vente (ou l’échange) est « parfait(e) entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livré ni le prix payé » (CE, 26 janvier 2021, n° 433817, Sté Pigeon Entreprises c/ Cne Châteaubourg : Lebon, T. ; JCP A 2021, 2126 et Dr. Voirie 2021, p. 75, note Ph. Yolka ; Contrats-Marchés publ. 2021, comm. 121, note P. Soler-Couteaux ; AJCT 2021, p. 259, note Ch. Otero ; Dr. adm. 2021, comm. 48, note Z. Kambia – CE, 15 mars 2017, n° 393407, SARL Bowling du Hainaut : JCP A 2017, 2132, note Ph. S. Hansen ; Contrats-Marchés publ. 2017, comm. 142, note J.-P. Pietri – en dernier lieu, v. CAA Paris, 29 juillet 2024, n° 22PA01051, Cne Faa’a : JCP A 2024, 2302, note Ch. Testard. Sur la question, P. -M. Murgue-Varoclier, Les fausses promesses de vente publiques : JCP N 2024, act. 420). Il en résulte qu’une délibération comme celle en présence valait échange, ces préceptes étant en effet étendus à de telles modalités de cession (v. déjà TA Grenoble, 19 déc. 2024, n° 2201041, Cne Volvent), comme ils le furent déjà, autrefois, s’agissant des cessions sans désaffectation ni déclassement préalable des biens du domaine public (CE, 29 juillet 2020, n° 427738, SIVOM de la région de Chevreuse : JCP A 2021, act. 92 ; Contrats-Marchés publ. 2020, comm. 304, note P. Soler-Couteaux ; Dr. voirie 2020, n° 216, obs. Ph. Yolka ; RDI 2021, p. 161, note J.-Fr. Giacuzzo ; AJDA 2020, p. 2511, note G. Éveillard). Autrement dit, et sauf à ce que la collectivité s’engage dans une périlleuse procédure de retrait, elle ne pouvait plus se dédire de son engagement, l’information du public étant par elle-même condamnée à effet platonique.

On relèvera à la suite d’autres commentateurs (v. P.-M. Murgue-Varoclier, Échange de chemin rural : l’information du public avant tout ! : JCP A 2025, n° 2149 – v. également Ch. Psilakis, Information et consultation du public avant l’échange de parcelles du domaine privé communal : AJDA 2025, p. 758), que la cour a certes confirmé la décision du tribunal administratif de Lyon mais sans en reprendre pleinement l’argumentation. Préalablement, le tribunal avait en effet convaincu de l’illégalité de ladite délibération sur le fondement de la jurisprudence Danthony (CE Assemblée, 23 décembre 2011, n° 335033, recueil Lebon 649 : GAJA, Dalloz, 2023, 24e éd., n° 106). Il avait retenu ici que, en ne procédant pas à l’information préalable du public préalablement à l’échange (irrévocablement acté par la délibération v …), la délibération était affectée d’un vice procédural (substantiel) ayant eu une influence décisive sur son adoption et sa teneur.

D’aucuns pourront y percevoir une volonté implicite de considérer qu’il s’agissait, en réalité, toujours au sens de la jurisprudence Danthony, d’une véritable garantie dont la méconnaissance entraîne ipso facto l’illégalité de la décision en litige. Plusieurs éléments le laissent penser. Outre les commentaires (« autorisés ») de Christine Psilkatis (préc.) faisant référence à une décision du Conseil d’État en ce sens – cependant dans un tout autre domaine – et qui aurait joué en l’espèce (CE, 12 juillet 2019, n° 424600, Fédération nationale des chasseurs, recueil Lebon T. ; AJDA 2019, p. 2129, note L. de Fournous ; D. 2020, p. 1012, note V. Monteillet et G. Leray), la jurisprudence incline à considérer que le défaut d’enquête publique préalablement au déclassement d’une voirie communale (rurale ou routière) constitue une telle garantie (v. CAA Lyon, 7 juill. 2016, n° 15LY01962, Syndicat Des copropriétaires de l’immeuble « Le Signal » c/ Cne Huez-en-Oisans : JCP A 2016, n° 2266, note É. Untermaier-Kerléo ; Contrats-Marchés publ. 2017, chron. 2, note F. Llorens et P. Soler-Couteaux – CAA  Marseille, 22 février 2019, n° 17MA00319 – v. plus largement N. Dourlens et P. Cavaillon, Déclassement et vente de dépendances du domaine public routier : attention à l'enquête publique ! : Contrats-Marchés publ. 2022, fiche pratique n° 4). Il en va de même, plus généralement et désormais, de l’exigence d’information accrue des élus locaux qui, préalablement aux délibérations sur lesquelles ils se prononceront, devront se voir délivrer une information « éclairée » (CE, 13 octobre 2023, n° 464955, Collectif alétois gestion publique de l'eau actions sur le Limousin et le Saint Hilairois : Lebon T. : : Contrats-Marchés publ. 2024, comm. 20, note G. Eckert ; AJDA 2024, p. 435, obs. J. Martin ; BJCP 2023, p. 391, concl. M. Pichon de Vendeuil ; JCP G 2024, comm. 164, obs. F. Cafarelli).

Cependant, le juge administratif se montre autrement moins sévère dans d’autres hypothèses, soit qu’il neutralise temporellement les exigences procédurales liées à l’enquête publique (comme au sujet des promesses de vente sous conditions suspensives de déclassement : CAA Toulouse, 31 mars 2023, n° 21TL00417, M. A c/ Cne Leucate : JCP A 2023, n° 2143, note C. Chamard-Heim), soit qu’il procède au contraire à leur danthonysation. C’est ce que la même cour a, du reste, opéré récemment au sujet de l’absence d’enquête publique préalablement à une procédure de transfert (au sein du domaine public) d’une voie privée ouverte à la circulation publique (Code de la voirie routière, art. L. 318-3 ; v. CAA Lyon, 22 juin 2023, n° 21LY02813 : Dr. Voirie 2023, p. 144, note H. Devillers.). Il reste enfin à relever que – malheureusement – la rédaction de l’article L. 162- 10-2 du Code rural demeure équivoque, se contentant de poser l’obligation procédurale d’information sans obliger, du moins expressis verbis, à en tenir compte, la garantie paraissant mince en tout état de cause. De ce point de vue, sans doute aurait-il été utile que la cour se montre plus diserte en précisant sur quel terrain elle entendait placer le vice procédural, le silence ayant le défaut de laisser le champ libre à tous les plausibles. À commencer, peut-être, par l’éventualité d’une illégalité authentiquement matérielle, soit pour violation de la norme supérieure, soit pour erreur de droit, le vice de procédure demeurant, on le sait, l’antichambre du vice substantiel, sans doute car la forme, même silencieuse, sera toujours le fond qui remonte à la surface.

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