La commune de Lux, située en Saône-et-Loire, possède un terrain planté de cerisiers situé entre la rue Joseph Bara et l’allée du 19 mars 1962. Son projet de céder une partie de la parcelle AI no 320 et la parcelle AI n° 293 qui le composent à l’OPAC de Saône-et-Loire en vue d’y construire une résidence seniors destinée à favoriser le maintien à domicile de la population vieillissante de la commune, a suscité l’ire de nombreux habitants.
Pour autant, par délibération du 22 avril 2021, le conseil municipal a, à l’unanimité de ses membres, autorisé la cession à l’OPAC, à l’euro symbolique, d’environ 27 des 40 ares qu’occupent ces deux parcelles, autorisé le maire à signer tout document en lien avec ce projet et accepté de consentir au profit de l’OPAC toutes les servitudes nécessaires à la desserte et au fonctionnement de la construction.
Il s’agit de la délibération que contestent Mme X., dont la maison se situe à quelques mètres du parc et l’association Sauvons les cerisiers de Lux, présidée par Mme X. elle-même.
Avant même de cadrer le litige, ce qui impliquera nécessairement de qualifier aussi bien le contrat dont la conclusion fut autorisée par la délibération en litige que le terrain communal objet de la cession, nous vous proposons de répondre aux fins de non-recevoir opposées en défense.
La commune et l’OPAC de Saône-et-Loire soutiennent que l’association Sauvons les cerisiers de Lux serait dépourvue d’intérêt à agir contre la décision querellée et que sa présidente ne disposerait pas d’un mandat valide pour ester en justice.
D’abord, quand bien même l’association a été créée pour les besoins de la cause, nous ne sommes pas ici en urbanisme et l’existence de l’intérêt à agir s’apprécie à la date de l’enregistrement de la requête.
Rappelons que le lien entre le recours d’une association et son objet social doit être suffisamment direct (CE, 30 décembre 2014, association des familles victimes de saturnisme, n° 367523).
En l’espèce, l’association requérante a pour objet « la sauvegarde des espaces verts et arborés au centre de Lux et la lutte contre l’abattage des arbres, et toute action en faveur de la protection de la nature et de l’environnement ». Si la délibération contestée se borne à autoriser la cession du terrain à l’OPAC, tant la configuration des lieux que les développements qui motivent la délibération démontrent qu’une partie des arbres situés sur le terrain seront « perdus ». Dès lors, l’association requérante a incontestablement un intérêt à agir contre la décision en litige.
Les statuts de l’association sont muets sur la question de la représentation en justice. Dans une telle hypothèse, le Conseil d'Etat juge que seule l’assemblée générale peut décider d’engager l’association (CE, 16 février 2001, association pour l’égalité aux concours et examens (APECE), n° 221622, p. 67 ; CE, 19 juillet 2010, commune de La Chapelle-Saint-Luc, n° 318126, C). Or, la présidente de l’association a été initialement habilitée par une simple délibération du bureau du conseil d’administration. Cependant, d’une part, l’irrecevabilité a été couverte, en cours d’instance, par la production d’un mandat régulier issu d’une délibération de l’assemblée générale de l’association du 2 septembre 2022 (v. CE, 16 janvier 1998, association aux amis des vieilles pierres d’Aiglemont, n° 153558, T. p. 1081 ; CE, 11 mai 2011, société Barthas immobilier, n° 327690, B qui précise que sauf impossibilité, la régularisation doit intervenir avant la clôture de l’instruction). D’autre part, si vous deviez reconnaître l’intérêt à agir de Mme X. personnes physique, cette seule circonstance, s’agissant d’une requête collective, permettrait de déclarer la requête recevable dans son ensemble (CE, Section, 22 décembre 1972, n° 82385, p. 832).
Nous en venons ainsi naturellement à l’intérêt à agir de Mme X. Cette dernière, en qualité de contribuable de la commune, nous parait avoir intérêt à agir dès lors que la cession est envisagée pour un euro symbolique alors que le directeur départemental des finances publiques a évalué la valeur vénale du terrain à la somme de 200 000 euros. Sans entrer, à ce stade, dans le débat de fond sur l’existence et la légalité d’une libéralité au bénéfice de l’OPAC, la délibération en litige a vocation à diminuer les recettes de la commune (cpr. a contrario CAA Paris, 29 juillet 2011, société Magenta plage, n° 10PA03480 qui n’est autre qu’une application de la jurisprudence du Conseil d'Etat du 29 mars 1901, A).
Les fins de non-recevoir expressément opposées étant désormais écartées, vous allez devoir vous interroger très sérieusement sur une question que ne se sont pas posées les parties, à savoir la nature de la cession autorisée par la délibération contestée. En effet, de deux choses l’une : soit vous êtes devant un futur contrat administratif, auquel cas la jurisprudence Tarn-et-Garonne rend la requête dirigée contre l’acte détachable irrecevable (CE, Assemblée, 4 avril 2014, n° 358994, A) ; soit vous êtes devant un futur contrat de droit privé, ce qui aurait pour conséquence, d’une part, de rendre l’acte préalable à sa passation détachable de la convention et, d’autre part, de vous permettre, en tant que juge administratif, de l’analyser par la voie du recours en excès de pouvoir (CE, 15 mars 2017, SARL bowling du Hainaut et SARL bowling de Saint-Amand-les-Eaux, n° 393407, T.7 pp. 523, 601 ; CE, 7 mars 2019, commune de Valbonne, n° 417629, p. 57, aux conclusions de R. Victor).
Tentons de résoudre cette question fondamentale avec les éléments dont nous disposons au dossier. Pour cela, il convient de rappeler que les contrats entre personnes publiques sont présumés administratifs, sauf si, eu égard à leur objet, ils ne font « naître entre les parties que des rapports de droit privé » (v. TC., 21 mars 1983, n° 02256, Union des assurances de Paris (UAP), Lebon 537 ; AJDA 1983, conclusions de D. Labetoulle ; D. 1984.33, note J.-B. Auby et H.-G. Hubrecht ; Rev. adm. 1983. 368, note B. Pacteau). En l’espèce, la délibération contestée autorise le maire à conclure, au nom de la commune, un contrat portant cession à l’OPAC, c’est-à-dire à un établissement public, d’un terrain lui appartenant. Rappelons tout de même, pour reprendre la formule du professeur Ph. Yolka, que la jurisprudence UAP « sonne de plus en plus creux depuis les années 1990, les juridictions manifestant une nette tendance à vérifier l'existence des critères ordinaires du contrat administratif en la matière » (« Les contrats administratifs de vente immobilière entre personnes publiques », AJDA 2016, p. 1749 ; v. également, bien qu’il soit plus nuancé, D. Labetoulle, « Retour sur la jurisprudence UAP », AJDA 2013, p. 840 et surtout, appliquant les critères de l’objet et du régime exorbitant à un contrat conclu entre deux personnes publiques, TC, 6 juin 2016, commune d’Aragnouet c/ commune de Vignec, n° 4051 ; TC 4 juillet 2016, commune de Gélaucourt c/ OPH de la ville de Toul, n° C4057, B).
Le contrat dont la délibération contestée autorise la conclusion ne fait-il naître entre la commune de Lux et l’OPAC de Saône-et-Loire que des rapports de droit privé comme c’est le cas, le plus souvent, des contrats de vente relatifs au domaine privé ? C’est loin d’être évident car, outre le fait que nous n’avons pas encore abordé la question de la nature du terrain cédé, la délibération laisse à penser qu’un certain nombre d’obligations pèseront sur l’OPAC : création d’une Résidence Senior qui devra s’accompagner d’un projet social élaboré par le CCAS, impliquant de nombreux partenaires et la mise en place de services divers destinés à faciliter la vie et à éviter l’isolement des personnes âgées domiciliées dans l’immeuble à construire.
Mais comme la jurisprudence tend à appliquer les critères propres aux contrats conclus entre une personne publique et une personne privée, il convient de s’interroger sur l’objet du contrat et sur l’existence éventuelle de clauses qui impliqueraient, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs (sur les critères jurisprudentiels du contrat administratif, v. TC, 13 octobre 2014, société Axa France IARD, n° 3963, Lebon). L’objet du contrat d’abord : peut-on considérer qu’une simple cession de terrain emporte participation du cocontractant à l’exécution d’une mission de service public au sens de la jurisprudence Epoux Bertin de 1956 (CE, Section, 20 avril 1956, n° 98637, Lebon). Dans son article à l’AJDA de 2016 (préc.), le professeur Ph. Yolka, tout en constatant qu’il « est exceptionnel que la convention de vente fasse participer l'acquéreur à l'exécution d'une mission de service public », précise – sans pour autant développer ce point – qu’il « reste cependant permis de se demander dans quelle mesure certains contrats ayant pour objet la cession de terrains en vue d'opérations de construction de logements sociaux ne devraient pas être regardés comme administratifs par leur objet ». Cependant, cette idée est née de la rédaction de l’article L. 3211-7 du code général de la propriété des personnes publiques (CGPPP), modifié par la loi n° 2013-61 du 18 janvier 2013 relative à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, dite loi Duflot, qui permet à l’Etat – et à lui seul – sous de nombreuses conditions, de vendre des terrains en vue de la réalisation d’un programme de logement social au sens large avec une décote pouvant atteindre 100 % de leur valeur vénale (pour un commentaire de ces dispositions, v. G. Clamour, CMP 2013, comm. 58). En l’espèce, ni les caractéristiques de la personne publique propriétaire – en l’occurrence une commune et non l’Etat – ni l’encadrement de la cession – en l’état relativement faible – ne nous incitent à reconnaitre la participation de l’OPAC de Saône-et-Loire à l’exécution d’une mission de service public. Ce d’autant plus que si vous ignorez la nature exacte de la Résidence Senior que l’OPAC envisage de créer, les informations dont vous disposez laissent à penser qu’elle s’apparentera vraisemblablement à une résidence-services au sens de l’article L. 631-13 du code de la construction et de l’habitation, c’est-à-dire à un ensemble d’habitations constitué de logements autonomes permettant aux occupants de bénéficier de services spécifiques non individualisables et de services spécifiques individualisables et, par voie de conséquence, ne constituera pas un établissement médico-social au sens de l’article L. 312-1 du code de l’action sociale et des familles (v. TA Nantes, 25 février 2022, Mme A., n° 1914441). Les résidences-services n’ont, a priori, pas de vocation sociale, elles ne relèvent pas de l’hébergement mais – sauf cas particuliers – uniquement du logement et ne sont pas considérées comme des équipements nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif (v. concl. Skzryerbak sous CE, 13 déc. 2021 M. et Mme J. et autres n° 443815 en B, RDI 2022, p. 93, obs. A. Fuchs-Cessot où la résidence-services seniors fut considérée comme relevant de l’hébergement uniquement dans la mesure où elle devait être mitoyenne à un EPHAD qui revêtait ainsi un caractère attractif ; v. également CE, 13 février 2013, Commune de La Baule-Escoublac, n° 346554, concl. S. Von Coester qui indiquait qu’il fallait bien distinguer les résidences soumises à autorisation en vertu du code de l’action sociale et des familles des simples résidences avec services qui ne constituaient qu’une offre particulière de logements). Tout ça pour dire qu’eu égard aux éléments dont vous disposez, tout porte à croire qu’en érigeant une Résidence Senior au cœur de la commune de Lux, l’OPAC ne participera pas pour autant à une mission de service public stricto sensu.
Et, plus rapidement cette fois, vous ne disposez d’aucun indice qui laisserait à penser que le contrat que la délibération litigieuse autorise le maire à conclure comporterait la moindre clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l'exécution du contrat, impliquerait, dans l'intérêt général, qu'il relève du régime exorbitant des contrats administratifs (v. TC, 13 octobre 2014, SA AXA France Iard, n° 3963, précité. et, pour une approche restrictive des clauses à même de faire basculer le contrat portant aliénation d’un bien du domaine privé dans un régime exorbitant, TC, 13 mars 2023, commune de Phalsbourg, n° 4266, B).
Ainsi, par application des critères classiques qui tendent à s’étendre aux contrats conclus entre personnes publiques, rien n’indique que vous seriez devant un contrat administratif et donc devant un recours contre un acte détachable nécessairement irrecevable en vertu de la jurisprudence Tarn-et-Garonne.
Mais la circonscription du litige ne s’arrête pas là. En effet, afin de contrer un des moyens soulevés par les requérantes, tiré de l’absence de déclassement préalable du terrain voué à être cédé, les parties en défense se prévalent de l’article L. 3112-1 du CGPPP qui permet de déroger à l’inaliénabilité des biens relevant du domaine public ; selon ces dispositions, « les biens des personnes publiques mentionnées à l'article L. 1 (c.-à-d. notamment des collectivités territoriale), qui relèvent de leur domaine public, peuvent être cédés à l'amiable, sans déclassement préalable, entre ces personnes publiques, lorsqu'ils sont destinés à l'exercice des compétences de la personne publique qui les acquiert et relèveront de son domaine public ». Cependant, et sans aller pour l’instant sur le fond, suivre la logique de la commune reviendrait à constater qu’il existe un transfert direct entre domaines publics, transfert se matérialisant par une convention destinée à céder un bien du domaine public à une autre personne publique qui l’aménagera spécialement en vue d’exercer une mission de service public. Pour reprendre, là encore, la formule du Professeur Ph. Yolka, « il est difficile d’y voir des contrats à objet de droit privé » (Juriscl. Propriétés publiques, fasc. 88 : Ventes d’immeubles des collectivités territoriales, n° 362). Certes, sauf que si vous nous avez suivi jusqu’ici, vous conviendrez qu’il parait difficile de reconnaître l’affectation de la future Résidence Senior à un service public ; cela d’autant plus que les immeubles de logements des OPH – et avant eux des OPHLM et des OPAC – ont toujours relevé du domaine privé de ces établissements publics (v. CE, 23 février 1979, RDP 1979, p. 1763 ; Dr. adm. 1979, comm. 121). Ainsi, à supposer que le terrain relève actuellement du domaine public de la commune, nous pensons que ni la condition de l’affectation à un service public, ni l’exigence d’un aménagement indispensable n’ont vocation à être satisfaites. L’opération n’entrant pas dans le champ de l’article L. 3112-1 du CGPPP, elle ne saurait revêtir, dans cette mesure, le caractère de contrat administratif.
Enfin, la cession pourrait constituer un contrat administratif si elle s’inscrivait dans une opération de commande publique (v. art. L. 6 et L. 1415-1 du code de la commande publique s’agissant spécifiquement des contrats de concession de travaux publics). Cependant, tel n’est généralement pas le cas des contrats de vente immobilière des collectivités territoriales qui, contrairement à l’Etat, échappent aux règles de publicité et de mise en concurrence propres aux marchés publics et aux concessions, sauf lorsqu’ils imposent des charges au cocontractant. Mais pour cela, encore faut-il que la personne publique confie à son cocontractant la réalisation de travaux selon des spécifications précises qu’elle impose effectivement et que les ouvrages construits répondent à un besoin d’intérêt général (v. art. L. 1111-2 du code de la commande publique et, pour des illustrations, CAA Marseille, 25 février 2010, commune de Rognes, n° 07MA03620 AJDA 2010, p. 1200, concl. F. Dieu ; v. également CAA Lyon, 21 mai 2015, société Bobsleigh, n° 14LY01692). En d’autres termes, pour qu’il y ait un contrat mixte dont l’objet principal serait en réalité la réalisation de travaux, encore faudrait-il que la collectivité publique exerce une influence déterminante sur le programme de travaux et que ceux-ci répondent précisément à ses exigences (v. CJUE, 25 mars 2010, aff. C-451/08 auquel se réfèrent les Pr. E. Fatôme et L. Richer, « Contrats à objet immobilier et de travaux : le critère de l’objet principal, critère second », AJDA 2015, p. 1577). En l’espèce, vous disposez de très peu d’éléments relatifs à l’influence qu’entend exercer la commune sur le projet porté par l’OPAC. Ainsi, à l’instar de la cour de Bordeaux qui a écarté la qualification de marché public dans une hypothèse où le projet d’aménagement promu par la commune revêtait un caractère très général (18 juillet 2016, Société Lory, n° 15BX00192) ou encore de la cour de Marseille qui a récemment jugé, alors même que les locaux avaient vocation à être rétrocédés à la personne publique après aménagement, qu’en raison du manque de spécification précise de l’ouvrage envisagé, les travaux ne constituaient pas l’objet principal du contrat (CAA Marseille, 11 avril 2022, n° 21MA00539, obs. Etienne Muller, CMP n° 6, juin 2022, comm. 168 ; v. également CAA Douai, 9 février 2021, n° 19DA02146, obs. Etienne Muller, CMP n° 5, mai 2021, comm. 158), nous vous proposons de vous en tenir au principe régulièrement réaffirmé selon lequel aucune disposition législative ou réglementaire n’impose à une personne morale de droit public autre que l’Etat de faire précéder la vente d’une dépendance de son domaine privé d’une mise en concurrence préalable (CE, 26 octobre 1994, n° 121717, B sur un autre point ; CE, 8 février 1999, commune de Lourdes n° 168043, C) et, surtout, de considérer que vous n’êtes pas ici devant un contrat de la commande publique de nature administrative.
Au terme de ces trop longs développements, il nous semble que vous êtes bien devant un acte détachable d’un contrat de droit privé qui reste justiciable par la voie du recours en excès de pouvoir, de sorte que la requête est recevable (v. CE, Section, 26 nov. 1954, Syndicat de la raffinerie du soufre française, p. 620 ; CE, 27 octobre 2015, nos 386595-390657, aux Tables, éclairé par les conclusions de M.-A. de Barmon, AJDA 2015, p. 2062, obs. de Montecler, JCP A 2015, act. 916 ; JCP G 2015, act. 1296, obs. L. Erstein).
Venons-en aux moyens soulevés par les requérantes.
Le premier porte sur le défaut d’information des membres du conseil municipal. Il ressort des mentions portées sur la délibération, corroborées par la copie du courriel en date du 16 avril 2021, que les conseillers municipaux ont bien été convoqués plus de trois jours avant la séance au cours de laquelle fut adoptée la délibération contestée, comme l’exige l’article L. 2121-11 du code général des collectivités territoriales (CGCT) applicable dans les communes de moins de 3 500 habitants. L’ordre du jour mentionnant le projet de cession était bien joint au courriel et aucun conseiller municipal ne semble avoir demandé à être davantage informé ; cela parait assez crédible puisque la délibération annule et remplace une précédente délibération adoptée en juillet 2020 sans qu’ait alors été sollicité le service des domaines pour avis. Ces formalités suffisent, dans les petites communes, à satisfaire l’exigence d’information prévue à l’article L. 2121-13 du CGCT.
Enfin, si, en application de l’art. L. 2241-1 du code général des collectivités territoriales, le conseil municipal délibère, dans les communes de plus de 2 000 habitants telles que la commune de Lux, sur les cessions d’immeubles au vu de l’avis des domaines, l’absence de communication de cet avis ne constitue pas un motif d’illégalité de la délibération autorisant la réalisation de l’opération, à condition toutefois que sa teneur ait été utilement portée à la connaissance des membres du conseil municipal (CE 11 mai 2011, commune de Vélizy-Villacoublay, n° 324173, aux Tables). En l’espèce, la réponse n’est pas évidente car la commune n’établit pas avoir adressé, en amont de la séance, le projet de délibération contestée ; c’est dommage car s’agissant d’une petite commune dans laquelle le maire n’est pas tenu d’adresser une note explicative de synthèse aux élus avant chaque séance, cette transmission aurait pu suffire à assurer une bonne information des conseillers municipaux (CE, 2 octobre 2017, n° 399752 et s’agissant spécifiquement d’une délibération ayant pour objet d’autoriser la cession de dépendances du domaine privé d’une commune, v. CAA Douai, 1er octobre 2019, société Groupe Bigard, n° 18DA01316). Quant au compte-rendu de la réunion du bureau du 16 mars 2021, réunissant uniquement le maire et les adjoints et effectivement diffusé à l’ensemble des élus, il se borne à indiquer « estimation du terrain de la MAS par les domaines : 200 000 €, ceci parait très haut, à revoir avec eux », sans qu’on sache précisément de quoi il s’agit. Dans ce contexte, et compte tenu de la formulation particulièrement elliptique de l’ordre du jour sur la question de la cession des parcelles AI nos 320 et 293, vous pourriez considérer que le socle minimal d’information n’a pas été délivré aux conseillers municipaux (cpr. CAA Douai, 2 juin 2020, Mme S. et association Chez nous à Rivery, n° 18DA01589). Malgré nos hésitations, nous vous invitons à juger que la délibération contestée a été adoptée au terme d’une procédure irrégulière. Surtout, compte tenu de la différence entre l’estimation proposée par le service des Domaines et la cession envisagée à l’euro symbolique, nous pensons que cette irrégularité a, en l'espèce, privé les conseillers municipaux d'une garantie (voir. a contrario avec CAA Bordeaux, 17 décembre 2021, commune de Mimizan, n° 19BX03284).
Les requérantes se prévalent ensuite d’un moyen tiré de l’insuffisance de motivation de la délibération et de l’incompétence négative du conseil municipal qui aurait délibéré sans avoir connaissance des caractéristiques essentielles, en particulier des limites et de la superficie, du terrain cédé. Là encore, vous pourriez hésiter car la surface cédée est approximative et le plan de bornage n’avait pas été réalisé au moment de l’adoption de la délibération en litige. En effet, si la parcelle AI n° 293 doit être cédée dans son intégralité, la parcelle AI n° 320 n’est cédée que dans sa portion enherbée et plantée d’arbres, à l’exclusion de la voirie communale puisque la rue Joseph Bara en fait actuellement partie. Selon la délibération contestée, la surface totale à céder est d’environ 2 700 m² sur les 39 ares 62 centiares de superficie totale formée par les deux parcelles concernées. Il parait évident que la consistance du bien cédé constitue une caractéristique essentielle de la vente au sens de l’article L. 2241-1 du CGCT et l’incertitude qui règne autour de la surface du terrain parait quelque peu contestable (vous pourrez lire sur ce point les conclusions de R. Victor sur CE, 16 novembre 2016, n° 385411, C et C. Chamard-Heim, « Cession d’immeubles par une collectivité territoriale ou un groupement. Qu’est-ce qu’une délibération motivée partant sur les conditions de la vente et ses caractéristiques essentielles ? », JCP A 2016, 2192, ces deux auteurs se référant à une circulaire du ministère de l’équipement du 12 février 1996 qui, bien que n’ayant pas été reprise sur le site gouvernemental dédié, peut servir de source d’inspiration pour savoir comment interpréter la notion de « caractéristiques essentielles »). Pour autant, eu égard à la configuration des lieux et aux termes de la délibération, il ne nous parait pas difficile de déterminer où se situera la limite entre la portion cédée à l’OPAC et la voirie ; dès lors, à l’instar de ce qu’a jugé la cour de Nantes, nous vous proposons de considérer que la délibération querellée est régulière dès lors qu’elle « fournit les explications nécessaires à la compréhension du projet et [permet] d’en mesurer les implications » (CAA Nantes, 12 oct. 2015, SCI Rozenn, n° 14NT01284). Bien que, on le répète, vous puissiez hésiter, il nous semble que la motivation de la délibération précise de manière suffisante les caractéristiques essentielles de la cession. Si vous nous suivez, vous écarterez le moyen dans ses deux branches.
Les requérantes reprochent à la commune de Lux de s’être abstenue de déclasser le terrain avant de décider de le céder. Pour que le moyen soit opérant, encore faudrait-il que les deux parcelles concernées relèvent du domaine public et soient ainsi soumises au principe d’inaliénabilité qui le protège, ce qui n’empêcherait d’ailleurs pas un déclassement postérieur à l’adoption de la délibération en autorisant la cession (CE, 25 juin 2018, société Groupe Bigard, n° 402078). Comme vous le savez, une affectation formelle, c’est-à-dire un classement résultant d’un acte juridique, n’est pas indispensable ; l’incorporation au domaine public peut résulter de simples éléments de fait. Cependant, l’affectation matérielle « ne saurait être fortuite » ou intervenir « à l’insu de son propriétaire » (v. P. Tifine, « Domaine public communal », Juriscl. Propriétés publiques, fasc. 32, n° 19 et E. Fatôme, « Pas d’incorporation au domaine public à l’insu du propriétaire », AJDA 2016. 204). En d’autres termes, une parcelle communale ne peut être regardée comme affectée à l’usage direct du public en l’absence d’intention de la commune en ce sens, nonobstant la circonstance que la parcelle soit empruntée par le public (v. CE, 2 novembre 2015, commune de Neuves-Maisons, n° 373896, AJDA 2016, p. 204, conclusions J. Lessi et note E. Fatôme ; DA 2016, comm. 13, note G. Eveillard ; RDI 2016, p. 286, note N. Foulquier ; v. également CE, 21 juin 2017, commune de Balledent, n° 406567 ou encore CE, section, 28 avril 2014, commune de Val d’Isère, n° 349420, A). Pour le dire encore autrement, « la notion d’affectation (…) implique une certaine intensité » (v. Ph. Yolka, « Structure des patrimoines administratifs – Distinction du domaine public et du domaine privé », Juriscl. Propriétés publiques, fasc. 20, n° 59). A cet égard, même si l’existence d’un aménagement indispensable n’est à rechercher que s’agissant de biens affectés à un service public – ce qui n’est pas le cas en l’espèce – la présence d’aménagements nécessaires constitue un indice permettant de caractériser la manifestation de volonté du propriétaire public d’affecter le bien lui appartenant à l’usage direct du public (v. TC, 19 mai 2014, département du Nord n° 3942 ; CE, 5 décembre 2016, n° 401013 ; CAA Marseille, 9 avril 2021, n° 18MA03151, CMP 2021, comm. 188, obs. E. Muller confirmé par CE, 11 mars 2022, n° 453440, B). Et s’agissant spécifiquement des promenades publiques, le Conseil d'Etat a toujours refusé de regarder comme affecté à l’usage direct du public un terrain du seul fait qu’il soit librement accessible au public qui l’emprunte ou l’utilise (v. conclusions G. Pellissier sur CE, 5 décembre 2016, M. F., n° 401013, préc. rappelant les jurisprudences CE, 7 nov. 1979, n° 12915, Lebon T. et CE, 25 juin 1971, n° 78224, p. 480). A cet égard, l’extension du critère additionnel de l’aménagement spécial – devenu indispensable – dégagé pour l’affectation au service public à l’affectation à l’usage du public a justement été réalisée au sujet d’une promenade publique « affectée en cette qualité à l’usage du public et aménagée à cette fin » (CE, Assemblée, 22 avril 1960, au Recueil p. 264). L’exigence d’aménagement fut systématiquement réaffirmée s’agissant des espaces ouverts au public (CE, 14 juin 1972, p. 442 : le bois de Vincennes, qualifié de « promenade publique affectée à l’usage du public et aménagé à cette fin » ; CE, Section, 30 mai 1975, n° 83245 et CE, 7 déc. 1984, n° 35535 : plages publiques non aménagées ne relevant pas du domaine public ; CE, 20 mars 1991, confédération du cadre de vie de Longeville-les-Metz, n° 91990, inédite : terrain accessible au public non aménagé relevant par conséquent du domaine privé).
En l’espèce, il ne fait aucun doute que la commune tond la pelouse et taille les arbres plantés sur le terrain à céder…comme d’ailleurs elle entretiendrait n’importe quelle dépendance de son domaine privé. Mais à part ça, les photos parlent d’elles-mêmes : vous ne trouverez sur le terrain aucun banc – d’ailleurs un des clichés montre des personnes assises à même le sol – aucun chemin, pas la moindre poubelle, le moindre cendrier (CAA Toulouse, 21 février 2023, n° 21TL01684). Vous pourriez hésiter car la défense de la commune consiste à faire valoir que le terrain destiné à être cédé à l’OPAC « sert surtout de zone de déjections canines ». Cependant, outre le fait que les canidés peuvent difficilement être assimilés à du public – leurs maîtres plus certainement – nulle trace de la moindre clôture servant à délimiter un espace dédié à une telle activité ou encore d’un distributeur de sacs destinés à recueillir les étrons de nos animaux de compagnie ! La présence de portillons installés par les propriétaires privés dont les jardins jouxtent cet espace vert ne saurait évidemment caractériser une volonté de la commune. La circonstance que le dossier de création de la ZAC du quartier de la Croix blanche, approuvée en 1985 et dans laquelle s’insère cet espace évoque, a priori à un seul endroit de façon explicite, l’appartenance du bois au domaine public ne saurait davantage suffire, selon nous, à caractériser l’intention de la commune, d’autant qu’il ne ressort d’aucune pièce du dossier que cette dernière ait eu l’intention et/ou l’occasion de faire plus que d’y planter des arbres (a contrario TC, 14 novembre 2016, association « Mieux vivre à Béziers et son agglomération, tourisme et loisirs », n° 4068, B et les faits ayant donnant lieu à l’arrêt du Conseil d'Etat du 5 décembre 2016, M. F., préc. au sujet desquels G. Pellissier critique la décision du tribunal en estimant que « l’indication selon laquelle la parcelle est plantée d’arbres est une constatation de fait qui ne dénote aucun aménagement de la part de la commune »). Et, toujours s’agissant du dossier de création de la ZAC, l’adjectif « public », lorsqu’il se rapporte au bois correspondant au terrain en litige, vise principalement à le distinguer des jardins privés et ne saurait emporter de façon nette son appartenance au domaine public plutôt qu’au domaine privé de la commune. Nous avons d’autant moins de difficulté à vous proposer d’en rester là et de considérer que l’intention de la commune d’affecter le terrain à l’usage direct du public n’était pas suffisamment claire, que l’adoption du CGPPP en 2006 s’est accompagnée d’un net resserrement des limites du domaine public et du champ de la protection qui l’accompagne.
Reste la question de l’accessoire puisque les requérantes tentent, selon nous en vain, d’assimiler les parcelles situées au nord, de l’autre côté d’un chemin de terre, constituées de terrains de tennis et d’une aire de jeux, aux parcelles en litige. Sauf que, là encore, hormis la jolie vue que peuvent avoir sur les cerisiers les sportifs et les enfants, l’exigence d’indissociabilité à la fois physique et fonctionnelle est loin de sauter aux yeux.
Reste un doute que nous avons finalement pu balayer, issu d’un arrêt du Conseil d'Etat du 19 juillet 2010, n° 329199 qui applique la théorie de la domanialité publique globale à des unités foncières dont une partie seulement remplirait les critères de la domanialité publique ; en d’autres termes, si une portion d’une parcelle relève du régime de la domanialité publique, celui-ci devrait s’appliquer à l’ensemble de son emprise foncière. Cependant, outre que cette conception particulièrement large trouve difficilement sa place dans l’économie générale du CGPPP, il n’y a pas de raison d’étendre ce régime dérogatoire « en présence de limites physiques ou juridiques nettes permettant (…) de dissocier clairement deux parties au sein d’une même parcelle » (v. conclusions A. Lallet sur CE, 28 avril 2014, commune de Val d’Isère, préc.). Dès lors, pour les mêmes motifs que ceux qui nous conduisent à écarter le moyen tiré de l’incompétence négative des membres du conseil municipal qui n’auraient pas disposé d’une connaissance suffisante des caractéristiques essentielles de la cession autorisée, nous n’envisageons pas de faire application de la théorie de la domanialité publique globale.
Comme vous l’aurez compris, et nonobstant la maladresse de la commune qui a récemment autorisé Mme X. elle-même à occuper ponctuellement les parcelles en question – visiblement voirie comprise – afin d’y organiser une kermesse, le tout au terme d’une convention évoquant expressément le « domaine public », nous vous invitons à considérer que le terrain voué à être cédé ne fait pas partie du domaine public de la commune, de sorte que l’absence de déclassement formel ne saurait être utilement soulevé.
Comme nous avons déjà eu l’occasion de le développer, les pièces du dossier ne permettent absolument pas de considérer que la cession destinée à être conclue entre la commune et l’OPAC puisse être regardée comme un contrat de la commande publique. Le moyen parait d’ailleurs contre-productif puisque, si tel était le cas, la requête serait jugée irrecevable en vertu de la jurisprudence Tarn-et-Garonne. En outre, comme le reconnaissent à demi-mot les requérantes elles-mêmes, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à une personne morale de droit public autre que l’Etat de faire précéder la vente d’une dépendance de son domaine privé d’une mise en concurrence préalable dès lors que la collectivité publique a fait le choix d’y recourir librement (CE, 26 octobre 1996, n° 121717, B sur un autre point ; CE, 8 février 1999, commune de Lourdes, n° 168043 C ; CE, 27 mars 2017, sociétés Procedim et Sinfimmo, n° 390347 en C). Pour les mêmes motifs, et comme l’a clairement développé B. Bohnert dans ses conclusions sur l’arrêt sociétés Procedim et Sinfimmo (préc.), le moyen tiré de la rupture d’égalité entre cessionnaires potentiels ne saurait être accueilli, ne serait-ce qu’en raison de la liberté contractuelle dont dispose ici la commune dans le choix de son cocontractant.
Les requérantes soutiennent qu’en cédant le terrain à l’OPAC pour un euro symbolique, la commune de Lux lui aurait illégalement accordé une libéralité. Rappelons avant tout qu’on parle ici d’une cession entre personnes publiques, ce qui ne vous empêche pas d’opérer un contrôle de l’erreur manifeste d'appréciation sur le prix fixé (par ex. CE, 8 février 1999, ville de Lourdes, n° 168043). Cependant, si la Constitution s’oppose à ce que des biens issus du patrimoine public puissent être aliénés au profit de personnes poursuivant des fins d’intérêt privé sans contrepartie appropriée eu égard à leur valeur réelle et d’éviter ainsi toute libéralité en leur faveur (v. C. constit., 24 juillet 2008, n° 2008-567 DC, loi relative aux contrats de partenariat, AJDA 2008, p. 1164, note Dreyfus), la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui se borne à exiger des « contreparties suffisantes », parait plus souple (v. note H. Pauliat sous C. constit., 17 décembre 2010, n° 210-67/86 QPC, Région Centre, RJEP 2011, comm. 40 à laquelle renvoie S. Déliancourt, « Cession entre personnes publiques : des contreparties significatives exigées », JCP A, n° 42, 21 octobre 2019, 2282). Cette souplesse est déjà largement exploitée s’agissant des cessions au bénéfice de personnes privées en charge d’une mission d’intérêt général (v. CE, 25 novembre 2009, commune de Mer, n° 310208, Lebon ; AJDA 2010, p. 51, note P. Yolka ; et pour un mode d’emploi de la méthode à appliquer CE, 14 octobre 2015, commune de Châtillon-sur-Seine, n° 375577, Lebon, DA 2016, comm. 9, note G. Eveillard), au point que le Professeur Melleray a regretté que, dans certaines hypothèses, la condition propre aux contreparties suffisantes se confonde avec celle relative à l’intérêt général que tire la collectivité publique de la cession (v. DA 2010, comm. 23 sous CE, 25 novembre 2009, commune de Mer, préc. ; v. également l’arrêt du CE, 15 mai 2012, n° 351461, RDI 2013, p. 274, note N. Foulquier). Pour ce qui est des rapports entre personnes publiques, outre que les transferts à titre gratuit sont parfois prévus, voire imposés par le législateur (v. S. Déliancourt, « Cession entre personnes publiques : des contreparties significatives exigées », préc.), ils ne sont a priori pas concernés par le principe de prohibition des libéralités. Pour autant, le juge administratif tend à soumettre les cessions gratuites à l’existence d’un avantage pour la collectivité initialement propriétaire ou à tout le moins pour l’intérêt général au sens large dont elle a la charge (v. Ph. Yolka, « Vente d’immeubles des collectivités territoriales », Juriscl. Propriétés publiques, préc. n° 288 qui précise que de telles cessions sont rarement jugées illégales ; pour un ex. CE, 28 février 2007, commune de Bourisp, n° 279948, C). En l’espèce, à supposer que vous vous glissiez, comme a tendance à le faire le Conseil d'Etat, dans la logique de la jurisprudence commune de Fougerolles, 3 novembre 1997, n° 169473, Recueil), il nous semble que la cession s’inscrit sans conteste dans un objectif d’intérêt général compte tenu des caractéristiques de la population de la commune et des besoins exprimés par ses habitants les plus âgés et que le projet de Résidence Senior porté par l’OPAC constitue, en tant que tel, une contrepartie suffisante à la gratuité de la cession ( CE, 21 juin 2021, n° 434384, éclairé par les conclusions de L. Cytermann qui confirme tant l’application de la jurisprudence Commune de Fougerolles aux cessions entre personnes publiques que l’assimilation – assez évidente en réalité – de la création de logements sociaux à une finalité d’intérêt général). Si vous nous suivez, vous écarterez le moyen.
Par ailleurs, à supposer que l’article L. 1511-3 du CGCT, qui exige l’établissement d’une convention en cas d’aide telle qu’un rabat sur le prix de vente d’un terrain, soit applicable à une cession au bénéfice d’une personne publique, le moyen nous parait prématuré – et donc inopérant – au stade de la délibération attaquée.
Selon les requérantes, la délibération serait entachée d’erreur de fait dès lors qu’elle indique que les parcelles AI nos 320 et 293 sont les seules parcelles dont la commune est propriétaire sur lesquelles le projet est possible. Vous pourrez écarter ce moyen rapidement dès lors que si la parcelle AI n° 354 appartient bien à la commune, elle accueille actuellement un terrain de foot et est vouée à accueillir de nouveaux locaux périscolaires et que les autres parcelles mentionnées n’appartiennent pas à la commune mais à l’OPAC.
Les requérantes soulèvent un moyen tiré de l’erreur manifeste d'appréciation que constituerait la cession d’un terrain entraînant l’abattage de plusieurs arbres au cœur de la commune. Vous exercez en effet, sur le principe même de la cession, un contrôle minimum (CE, 11 juillet 1991, commune de Saint-Crepin, n° 73948, C ; CE, 11 mai 2011, commune de Vélizy-Villacoublay, n° 324173, aux Tables sur un autre point). En l’espèce, eu égard à la proximité d’autres espaces arborés au sein de la commune de Lux, la délibération ne nous parait pas, malgré les inconvénients consistant à abattre une partie des arbres plantés sur le terrain, entachée d’erreur manifeste d'appréciation.
Enfin, si les requérantes se prévalent de la méconnaissance de l’article L. 350-3 du code de l’environnement qui interdit, sauf dérogations, d’abattre les alignements d’arbres situés le long des voies de communication, d’une part, au stade de la délibération, rien ne permet de s’assurer que les arbres situés de long de l’allée du 19 mars 1962 seront effectivement abattus et, d’autre part, nous avons quelques doutes sur le fait que cette allée piétonnière puisse être qualifiée de voie de communication au sens de ces dispositions.
Si vous nous suivez, vous ne retiendrez qu’un seul moyen tiré de l’irrégularité de la procédure, au motif que la teneur la teneur de l’avis du service des Domaines n’a pas été utilement portée à la connaissance des membres du conseil municipal en amont de la séance, alors même que la cession a vocation à être réalisée à l’euro symbolique pour un terrain estimé à 200 000 euros. Toujours dans cette hypothèse, vous mettrez en œuvre la jurisprudence CE, 29 décembre 2014, commune d’Uchaux, n° 372477, A et jugerez que l’illégalité étant susceptible d’être régularisée, il n’y a pas lieu d’enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat afin qu’il tire les conséquences de l’annulation de l’acte détachable mais uniquement de lui enjoindre de régulariser le vice de procédure sus-évoqué. Elle pourrait également, à cette occasion, faire réaliser un plan de bornage afin de délimiter précisément le terrain objet de la cession. Si, au contraire, vous considérez que la commune a manifesté une intention suffisamment claire d’affecter le bois à l’usage direct du public, de sorte qu’il ferait partie intégrante de son domaine public, alors l’illégalité consistant à le céder sans l’avoir préalablement déclassé ne parait pas régularisable et vous prononcerez une annulation « sèche » de la délibération du 22 avril 2021, sans qu’il soit nécessaire d’enjoindre à la commune de saisir le juge du contrat, ce dernier n’ayant apparemment pas été conclu à ce jour (CAA Nancy, 22 déc. 2020, commune de Lamoura, n° 18NC01803).
Par ces motifs, nous concluons à l’annulation de la délibération, à ce que le vice de procédure soit régularisé si la commune entend conclure la vente et au rejet du surplus.