TVA sur la marge des biens d’occasion et opposabilité des interprétations administratives

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Décision de justice

CAA Lyon, 2ème chambre – N° 21LY00475 – EURL Moto Méca Scoot – 10 novembre 2022 – C+

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 21LY00475

Numéro Légifrance : CETATEXT000046561239

Date de la décision : 10 novembre 2022

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

TVA, TVA sur la marge, Doctrine administrative, Opposabilité des interprétations administratives, L. 80 A du livre des procédures fiscales

Rubriques

Fiscalité

Résumé

La question tranchée ici porte sur le point de savoir si l’entreprise qui revend par lots des véhicules deux roues de type scooter ou motocyclette dont le cadre a été coupé, interdisant ainsi toute remise en circulation, sans certificat d’immatriculation provenant de fourrières à qui elle les achète, peut se prévaloir, pour l’imposition de ces opérations à la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime de la marge applicable aux ventes de bien d’occasion, du mécanisme de calcul de la base d’imposition institué par simplification en faveur des acquéreurs de lots hétérogènes par une instruction administrative publiée.

L’instruction administrative invoquée est publiée au BOFIP BOI-TVA-SECT-90-20 310. Elle est applicable aux « articles ou matières dont la nature est indéterminée au moment de l’acquisition » selon laquelle « Les acquéreurs de lots hétérogènes (usine désaffectée ou matériel destiné à la casse par exemple) sont obligés de procéder à un tri à la suite duquel ils déterminent la nature exacte des produits qu’ils revendent, certains de ces produits peuvent être des matières de récupération destinées à entrer dans un nouveau circuit de fabrication, d’autres constituent des articles d’occasion susceptibles de remploi. Pour ces derniers, à défaut d'une connaissance exacte du prix d’achat correspondant, il est admis que la base d'imposition soit fixée à la moitié du prix de cession. ».

Elle prévoit qu’à défaut d’une connaissance exacte du prix d’achat des biens issus d’un lot hétérogène acquis par l’entreprise revendus comme des articles d’occasion, admettant ainsi que la base d'imposition soit fixée à la moitié du prix de cession (et non pas par différence entre un prix de cession et un prix d’acquisition comme dans le régime de droit commun de la marge).

La cour administrative d’appel confirme le rejet de première instance au motif que l’entreprise ne remplit pas les conditions prévues par l’instruction administrative.

19-01-01-03, Contributions et taxes, Généralités, Textes fiscaux, Opposabilité des interprétations administratives (art. L. 80 A du livre des procédures fiscales).
19-06-02-08-01, Contributions et taxes, Taxes sur le chiffre d’affaires et assimilées, TVA, Liquidation de la taxe, Base d’imposition

Conclusions du rapporteur public

Sophie Lesieux

rapporteure publique à la cour administrative d’appel de Lyon

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DOI : 10.35562/alyoda.9658

L’EURL Meta Meca Scoot (MMS) a pour objet social l’achat et la vente de tous véhicules neufs ou d’occasion. Elle a fait l’objet d’une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 à l’issue de laquelle elle s’est vue notifier, selon la procédure contradictoire, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période vérifiée et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés au titre de l’exercice clos le 31 décembre 2016. Ces impositions ont été assorties des intérêts de retard et de la majoration de 40% pour manquement délibéré prévue au a de l’article 1729 du code général des impôts. En particulier, au cours des opérations de contrôle, le vérificateur a constaté que l’EURL MMS achetait régulièrement à la société Allo Casse Auto des lots de véhicules deux-roues, hors d’état d’usage et sans certificat d’immatriculation, en provenance de fourrières parisiennes pour un prix fixé forfaitairement à 55 euros l’unité, qu’elle revendait ensuite soit en pièces détachées, soit en l’état, en appliquant sur ces ventes le régime de TVA sur la marge, relatif aux lots hétérogènes. L’administration fiscale a remis en cause l’application de ce régime s’agissant des seules ventes de véhicules deux-roues en l’état, pour lui substituer le régime de TVA sur la marge « classique », prévu à l’article 297 A du code général des impôts, applicable aux livraisons de biens d’occasion par un assujetti-revendeur. L’EURL MMS, qui ne conteste que les rappels de TVA qui lui ont été réclamés à raison de la revente en l’état de ces véhicules deux-roues hors d’état d’usage, a néanmoins saisi le tribunal administratif de Dijon d’une demande tendant à la décharge de l’intégralité des rappels de taxe sur la valeur ajoutée réclamés au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2016 et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés au titre de l’année 2016. Elle relève appel du jugement du 15 décembre 2020 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Le ministre reprend devant vous la fin de non-recevoir déjà soulevée en première instance, tirée de l’irrecevabilité des conclusions visant l’impôt sur les sociétés et les chefs de redressement autres que la remise en cause du régime de taxation sur la marge des lots hétérogènes au motif qu’elles ne sont assorties d’aucun moyen. Mais le tribunal administratif de Dijon a déjà fait droit à cette fin de non-recevoir (points 2 et 3 du jugement) et l’EURL MMS ne conteste pas l’irrecevabilité opposée par les premiers juges à ces conclusions que vous pourrez donc rejeter pour ce motif (CE, 30 septembre 2002, n°220133, A) et ce, sans qu’il soit besoin d’examiner la fin de non-recevoir soulevée de nouveau par le ministre en appel.

Vous le savez le principe qui sous-tend le régime de la TVA est celui de la neutralité. Ainsi, pour chaque opération économique, l’opérateur, redevable de la TVA, peut déduire du montant de la TVA perçue sur la vente d’un produit le montant de la TVA qu’il a acquittée en amont sur les achats ayant servi à son activité commerciale, de sorte que le consommateur final est le seul à supporter la charge de la TVA. Dans ce système, une difficulté se pose lorsque l’acquéreur est un assujetti-revendeur, défini par le 5) du paragraphe 1 de l’article 311 de la directive TVA1 comme « tout assujetti qui, dans le cadre de son activité économique, achète ou affecte aux besoins de son entreprise ou importe, en vue de leur revente, des biens d'occasion, des objets d'art, de collection ou d'antiquité, que cet assujetti agisse pour son compte ou pour le compte d'autrui en vertu d'un contrat de commission à l'achat ou à la vente ». L’assujetti-revendeur a acquis un bien, sorti du circuit-commercial, sans acquitter de TVA mais lorsqu’il le revend, le bien est réintégré dans le circuit commercial, et l’assujetti-revendeur est redevable de la TVA sur cette vente. Le principe de neutralité est méconnu. Pour pallier cette difficulté, le régime de la marge bénéficiaire, intégré aux articles 311 et suivants de la directive TVA, vise à éviter les doubles impositions et les distorsions de concurrence entre assujettis, notamment dans le domaine des biens d’occasion (CJUE, 3 mars 2011, C-203/10 points 47 et suivants). En application de l’article 315 de la directive TVA, la base d’imposition des livraisons de biens est constituée par la marge bénéficiaire réalisée par l’assujetti-revendeur, diminuée du montant de la TVA afférente à la marge bénéficiaire elle-même. Cette marge bénéficiaire est égale à la différence entre le prix de vente demandé par l’assujetti-revendeur pour le bien et le prix d’achat.

Pour bénéficier de ce régime, il faut donc être assujetti-revendeur notamment de biens d’occasion dont la définition est donnée au 1) du paragraphe 1 de l’article 311 de la directive TVA comme étant « les biens meubles corporels susceptibles de remploi, en l'état ou après réparation, autres que des objets d'art, de collection ou d'antiquité et autres que des métaux précieux ou des pierres précieuses tels que définis par les États membres ».

En France, le 1° du I de l’article 297 A du code général des impôts précise que « La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion (…) qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (…) ». L’article 98 A de l’annexe III à ce code reprend la définition des biens d’occasion donnée par la directive TVA2.

La question de savoir si des pièces usagées, qui proviennent de véhicules automobiles hors d’usage acquis par une entreprise de recyclage auprès d’un particulier et qui sont destinées à être vendues comme pièces de rechange constituent des « biens d’occasion » au sens de l’article 311, paragraphe 1, point 1 de la directive TVA, a été posée à la CJUE. Par un arrêt du 18 janvier 2017, Sjelle Autogenbrug (C-471/15), la Cour a répondu par l’affirmative en considérant que si la qualification de « bien d’occasion » suppose une identité entre le bien acheté et le bien vendu, il convient de constater qu’un « véhicule automobile est composé d’un ensemble de pièces qui ont été assemblées et qui peuvent être détachées et revendues, en l’état ou après réparation ». Ainsi les pièces provenant de véhicules automobiles hors d’usage doivent être regardées comme constituant des « biens d’occasion » au sens de l’article 311, paragraphe 1, point 1 de la directive « avec la conséquence que les livraisons de telles pièces par des assujettis-revendeurs sont soumises à l’application du régime de la marge bénéficiaire » (points 35 à 37). La Cour de justice a cependant relevé une difficulté, dont faisaient état les gouvernements danois et grecs, en ce qui concerne la détermination de la base d’imposition de la marge bénéficiaire, conformément à l’article 315 de la directive, dans la mesure où le véhicule hors d’usage a été acheté pour un prix global et qu’on ne connaît donc pas le prix d’achat de chacune des pièces détachées revendues. Pour la Cour de justice, ces difficultés pratiques dans l’application du régime de la marge bénéficiaire ne peuvent justifier l’exclusion de certaines catégories d’assujettis-revendeurs de ce régime (point 42). Aux Etats-membres donc de trouver une solution pour déterminer le prix d’achat des pièces détachées revendues et calculer la marge bénéficiaire sur laquelle la TVA sera appliquée.

C’est ici qu’intervient le régime de TVA sur la marge, relatif aux lots hétérogènes, objet du présent litige, prévu par les paragraphes 310 et suivants de la documentation administrative référencée BOI-TVA-SECT-90-20 applicables aux « articles ou matières dont la nature est indéterminée au moment de l’acquisition ». Il y est précisé que « les acquéreurs de lots hétérogènes (usine désaffectée ou matériel destiné à la casse par exemple) sont obligés de procéder à un tri à la suite duquel ils déterminent la nature exacte des produits qu’ils revendent, certains de ces produits peuvent être des matières de récupération destinées à entrer dans un nouveau circuit de fabrication, d’autres constituent des articles d’occasion susceptibles de remploi. Pour ces derniers, à défaut d’une connaissance exacte du prix d’achat correspondant, il est admis que la base d’imposition soit fixée à la moitié du prix de cession ». Ce qui équivaut en pratique à faire application d’un taux de TVA de 10% au prix de vente HT du produit.

Selon une convention d’enlèvement d’épaves, conclue le 1er octobre 2010, la société MMS s’est engagée à retirer sous 48 heures, les véhicules de type deux-roues et voiturettes à la demande de la société Allo Casse Auto selon une procédure précise incluant l’identification et le traçage de tous les véhicules enlevés. Il était prévu qu’après accord de la société Allo Casse Auto, les véhicules seraient vendus à l’EURL MMS « pour démontage pour vente de pièces, en aucun cas pour vente en l’état ». Ainsi les numéros de série et/ou de châssis devaient être coupés et restitués à Allo Casse Auto, les cadres devaient être coupés et les châssis détruits et les véhicules ne pouvaient en aucun cas être remis en circulation.

En vertu des dispositions combinées des articles 256 bis, 297 A et 297 E du code général des impôts3, une entreprise assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée a la qualité d’assujetti-revendeur et peut appliquer le régime de taxation sur marge lorsqu’elle revend un bien d’occasion acquis auprès d’un fournisseur, qui en sa qualité d’assujetti-revendeur, lui a délivré une facture conforme aux dispositions de l’article 297 E et dont le fournisseur a aussi cette qualité ou n’est pas assujetti à la TVA (CE, 4 août 2006, Ministre c/ SA Warsemann automobiles, n°278274, A) En l’espèce, il résulte de l’instruction que les factures adressées à l’EURL MMS par la société Allo Casse Auto mentionnent explicitement que cette dernière a appliqué la taxe sur la valeur ajoutée selon le régime de taxation sur marge et il n’est pas contesté qu’elle peut revendiquer la qualité d’assujetti-revendeur. Cela induit que l’EURL MMS peut également faire application du régime de taxation sur la marge.

Il résulte de l’instruction que l’EURL MMS a, au cours de la période vérifiée, revendu sous forme de pièces détachées des véhicules deux-roues acquis auprès de la société Allo Casse Auto et qu’elle a appliqué le régime de la TVA sur la marge selon les modalités de calcul prévues par le paragraphe 310 de la documentation administrative référencée BOI-TVA-SECT-90-20, dès lors que le prix d’achat de chacune des pièces détachées revendues ne pouvait être établi avec exactitude. La TVA, ainsi calculée, n’a pas été remise en cause par l’administration fiscale.

En revanche, le service vérificateur a constaté qu’un certain nombre de factures, au nombre de 385 pour 2014, 436 pour 2015 et 517 pour 2016, ne correspondaient pas vraiment à la vente de pièces détachées mais à des ventes en l’état de véhicules deux-roues achetés à la société Allo Casse Auto pour un prix parfaitement identifiable de 55 euros par unité. L’administration n’a pas remis en cause la qualification de « bien d’occasion » de ces deux-roues ni l’application du régime de TVA sur la marge bénéficiaire mais a procédé à un nouveau calcul de cette marge par la différence entre le prix de vente de ces deux-roues et leur prix d’achat (55 euros), sur laquelle elle a appliqué le taux de TVA de 20%.

L’EURL MMS, qui a produit devant les premiers juges, des milliers de factures sans prendre le soin de trier celles concernées par le litige, pourtant listées par l’administration fiscale en annexe de la proposition de rectification et de la réponse aux observations du contribuable, fait valoir qu’il y a erreur sur la nature des articles vendus. Selon elle, il s’agirait de la vente d’un ensemble de pièces détachées reconstitué grâce aux différents lots acquis et aux pièces détachées en stock et présentant ainsi toutes les caractéristiques d’un deux-roues fonctionnel, à la réserve près qu’il est vendu sans châssis monobloc et sans certificat d’immatriculation. Elle vendrait donc un lot de pièces détachées, issues de véhicules deux-roues différents, réassemblées pour la vente, de sorte que le prix d’achat de chacune des pièces revendues sous la forme d’un véhicule deux-roues, ne peut être connu avec exactitude. Elle remplirait donc les conditions prévues par les énonciations de la documentation administrative pour le calcul de la marge bénéficiaire dont elle a fait application.

Mais ce n’est pas ce qui ressort des mentions figurant sur les factures ayant fait l’objet des rappels de TVA en litige. Même si ces factures évoquent des « lots de pièces », il y est précisé l’identification du véhicule deux-roues concerné, vendu en l’état sans cadre ou châssis, sans carte grise et sans garantie, et correspondant à un numéro précis d’ordre de fourrière. Lorsqu’il n’apparaît pas de référence à un ordre de fourrière, la facture reprend soit un numéro de châssis soit un numéro de moteur, permettant d’identifier précisément le véhicule acheté puis revendu. Il est difficile dans ces circonstances de donner du crédit aux affirmations de l’EURL MMS selon lesquelles elle ne procèderait qu’à des ventes de pièces détachées, issues de différents véhicules deux-roues, réassemblées et ce même si, nous l’avons dit, la convention d’enlèvement d’épaves lui interdit de vendre en l’état les véhicules qu’elle achète auprès de la société Allo Casse Auto.

Dans ces conditions, vous pourrez juger que l’EURL MMS ne pouvait faire application des énonciations de la documentation administrative que nous avons citées, dans la mesure où il ne résulte pas de l’instruction qu’elle aurait procédé à un tri pour déterminer la nature exacte des produits revendus et que le prix d’acquisition des véhicules deux-roues revendus en l’état était connu. C’est donc à bon droit que l’administration fiscale, qui n’a pas remis en cause l’application du régime de taxation sur la marge, a procédé à un nouveau calcul de la marge bénéficiaire pour chacun des véhicules vendus en faisant la différence entre le prix d’achat et le prix de vente et en appliquant aux résultats ainsi obtenus le taux de TVA de 20%.

Par son mémoire en réplique, enregistrée le 3 octobre 2022, la société MMS invoque un nouveau moyen tiré de l’irrégularité de la procédure d’imposition. Elle fait valoir que malgré sa demande, reçue le 22 mars 2019, l’administration ne l’a pas convoquée à un « entretien avec le directeur divisionnaire » et a procédé directement à la mise en recouvrement des impositions en litige et des pénalités y afférentes, le 14 juin 2019 et ce, en méconnaissance de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié.

Vous le savez, les dispositions de cette charte sont opposables à l’administration fiscale en application de l’article L. 10 du livre des procédures fiscales. Cette charte permet au contribuable, lorsque le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement, les rectifications envisagées, de solliciter des éclaircissements supplémentaires auprès du supérieur hiérarchique du vérificateur, puis, si des divergences importantes subsistent, de faire appel à l’interlocuteur départemental. Ces possibilités constituent une garantie substantielle pour le contribuable de sorte que leur méconnaissance entache la procédure d’imposition d’une irrégularité entraînant la décharge de l’imposition en litige. Ainsi que l’a rappelé récemment le Conseil d’Etat, cette garantie substantielle est ouverte au contribuable à deux moments distincts de la procédure contradictoire, en premier lieu, au cours de la vérification et avant l’envoi de la proposition de rectification, pour ce qui a trait aux difficultés affectant le déroulement des opérations de contrôle, et en second lieu, après la réponse faite par l’administration fiscale aux observations du contribuable sur cette proposition, pour ce qui a trait au bien-fondé des rectifications envisagées (CE, 25 mars 2021, Société RTE Technologies, n°430593, B). Par cette décision, le Conseil d’Etat précise que l’administration n’est pas tenue de donner suite à une demande d’entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur, présentée au cours d’une vérification de comptabilité, qui ne fait état d’aucune difficulté affectant le déroulement des opérations de contrôle. Nous pensons qu’il en est de même lorsque la demande d’entretien avec le supérieur hiérarchique ou avec l’interlocuteur départemental, postérieurement à la réponse faite par l’administration fiscale aux observations du contribuable, ne fait état d’aucun désaccord précis sur les rectifications envisagées.

En effet, est regardée comme régulière une procédure menée sans saisine du supérieur hiérarchique ou de l’interlocuteur départemental lorsque la demande du contribuable est implicite (CE, 26 mars 2008, n°280833, B sur un autre point) ou ambiguë (CE, 6 novembre 2002, SARL SETAA Distribution, n°221452, Inédit au recueil Lebon4).

En l’espèce, il résulte de l’instruction que la proposition de rectification adressée le 16 octobre 2017 à l’EURL MMS portait sur des rappels de TVA et des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés. Par son courrier du 13 décembre 2017, l’EURL acceptait les suppléments d’impôt sur les sociétés mais apportait des éléments concernant les rappels de TVA et en particulier ceux mettant en cause le régime de TVA sur la marge, relatif aux lots hétérogènes. Dans sa réponse aux observations du contribuable du 12 janvier 2018, l’administration fiscale a tenu compte de ces éléments et a modifié à la baisse les rappels de TVA. L’EURL MMS a ensuite sollicité un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur et a demandé la saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires (CDI) concernant uniquement le rappel de TVA sur les lots hétérogènes. Il n’est pas contesté que l’administration fiscale a fait droit à ces demandes et que la CDI s’est déclarée incompétente par un avis du 13 février 2019. Selon les écritures enregistrées récemment, l’EURL MMS a sollicité un entretien, a priori, avec l’interlocuteur départemental par courrier du 20 mars 2019 auquel il n’a pas été répondu. Mais nous pensons que vous ne pourrez en faire reproche à l’administration fiscale. En effet, la demande d’entretien tient en quelques lignes : « Je fais référence à l’avis de la Commission. / Je vous informe que je sollicite le bénéfice des voies de recours prévues par l’avis de vérification et notamment un entretien avec votre supérieur hiérarchique ». Ainsi, compte tenu de la formulation de ce courrier, qui ne fait pas expressément référence à l’interlocuteur départemental, ni état de divergences persistantes entre l’EURL et l’administration fiscale, nous vous proposons de juger que la procédure d’imposition n’est entachée d’aucune irrégularité.

Par ces motifs nous concluons au rejet de la requête et y compris les conclusions présentées au titre des frais liés au litige.

Notes

1 Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée Retour au texte

2 « I.- Sont considérés comme biens d'occasion les biens meubles corporels susceptibles de remploi, en l'état ou après réparation, autres que des œuvres d'art et des objets de collection ou d'antiquité et autres que des métaux précieux ou des pierres précieuses. » Retour au texte

3 « Les assujettis qui appliquent les dispositions de l'article 297 A ne peuvent pas faire apparaître la taxe sur la valeur ajoutée sur leurs factures. » Retour au texte

4 « ce courrier, qui, au demeurant, a été adressé au service postérieurement à la mise en recouvrement des impositions litigieuses, ne saurait, par sa formulation, être regardé comme tendant à ce que le différend opposant la société à l'administration fiscale soit porté devant l'interlocuteur départemental » Retour au texte

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