Installation Seveso : suspension du retrait d’un permis de construire en absence de caractérisation de la fraude du pétitionnaire

Décision de justice

TA Lyon, ordonnance – N° 1909057 – Société groupe Chimiméca – 18 décembre 2019 – C+

Requête jointe N° 1909548
Non-lieu sur le pourvoi en cassation : Conseil d'Etat, 4 mars 2020 - N° 437297
Affaire au fond jugée par le TA de Lyon, 3 juillet 2020 - N° 1909058  -  confirmé en appel : CAA de Lyon, 31 novembre 2021, N° 20LY02531

Juridiction : TA Lyon

Numéro de la décision : 1909057

Date de la décision : 18 décembre 2019

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

Acte administratif, Installation Seveso, Retrait de permis de construire, Suspension, Fraude, Risques

Rubriques

Urbanisme et environnement

Résumé

Par une ordonnance du 18 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon a suspendu l’arrêté du maire de la commune de Jonage retirant le permis de construire accordé à la société Chimiméca pour s’implanter dans le parc industriel des Gaulnes. Le maire de la commune de Jonage a délivré le 30 avril 2019 un permis de construire à la société Groupe Chimiméca pour la réalisation d’un bâtiment industriel appelé à recevoir une installation de type Seveso seuil bas sur le territoire de sa commune. Après enquête publique et avis favorable du conseil municipal notamment, cette société a également obtenu du préfet du Rhône, le 31 octobre 2019, l’autorisation d’exploiter une telle installation.

Mais entre-temps, le 23 octobre 2019, le maire de Jonage a procédé au retrait du permis de construire par le motif qu’il n’avait pu être accordé qu’à la faveur d’une fraude tenant au caractère délibérément insuffisant des informations fournies par la société sur les risques générés par son activité. Le préfet du Rhône et la société Groupe Chimiméca ont demandé au juge des référés la suspension de l’exécution de cet arrêté de retrait. Celui-ci, après avoir rappelé qu’une fraude suppose la réalisation intentionnelle par le pétitionnaire de manœuvres destinées à échapper à une règle d’urbanisme, a jugé que, en l’état de l’instruction, rien de tel n’était ici caractérisé et, en conséquence, a suspendu l’arrêté de retrait.

Le tribunal administratif de Lyon a, par jugement du 3 juillet 2020, annulé l'arrêté du 23 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Jonage a retiré le permis de construire délivré le 30 avril 2019 à la société Groupe Chimimeca pour la construction d’un bâtiment industriel avec bureau.

Extrait du jugement : " La société Groupe Chimimeca conteste l’arrêté en date du 23 octobre 2019 par lequel le maire de la commune de Jonage a retiré le permis de construire qu’il lui avait délivré le 30 avril 2019 pour la construction d’un bâtiment industriel avec bureau, étant précisé que l’exploitation de cette installation, relevant du régime des installations classées pour la protection de l’environnement, a été autorisée et soumise à prescriptions par arrêté du préfet du Rhône du 31 octobre 2019.

Sur la légalité du retrait de permis de construire : Aux termes l’article L. 424-5 du code de l’urbanisme : « La décision de non-opposition à une déclaration préalable ou le permis de construire ou d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peuvent être retirés que s'ils sont illégaux et dans le délai de trois mois suivant la date de ces décisions. Passé ce délai, la décision de non-opposition et le permis ne peuvent être retirés que sur demande expresse de leur bénéficiaire ». En outre, un acte administratif obtenu par fraude ne créant pas de droits, il peut être abrogé ou retiré par l’autorité compétente pour le prendre, alors même que le délai qui lui est normalement imparti à cette fin serait expiré.

La caractérisation de la fraude résulte de ce que le pétitionnaire a procédé de manière intentionnelle à des manœuvres de nature à tromper l’administration sur la réalité du projet dans le but d’échapper à l’application d’une règle d’urbanisme. Une information erronée ne peut, à elle seule, faire regarder le pétitionnaire comme s’étant livré à l’occasion du dépôt de sa demande à des manœuvres destinées à tromper l’administration.

En l’espèce, si l’arrêté de retrait litigieux évoque une insuffisance de précision sur les activités amenées à se dérouler sur le site, notamment s’agissant des produits utilisés, il ne ressort pas des pièces du dossier que le pétitionnaire aurait sciemment commis des manœuvres de nature à tromper l’administration, et en particulier sur des points relevant de la compétence de l’autorité chargée de délivrer les autorisations d’urbanisme. Les autres considérations évoquées par la commune de Jonage dans son mémoire en défense, tenant notamment à des manquements ou insuffisances quant aux conditions d’exploitation d’un site exploité par le pétitionnaire sur le territoire d’une autre commune, ne sont pas davantage de nature à établir l’existence de telles manœuvres.

Dans ces conditions, la fraude n’étant pas établie, la société requérante est fondée à soutenir que c’est à tort que le maire de Jonage a retiré, pour ce motif, le permis de construire dont elle était titulaire, et à demander, par le seul moyen invoqué, l’annulation de l’arrêté du 23 octobre 2019..."

Droits d'auteur

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