Le traitement du cancer, mentionné au 18° de l’article R6122-25 du code de la santé publique est au nombre des activités de soins soumises à autorisation en application des dispositions de l’article L6122-1 du même code. Il fallait donc définir cette activité de soins et ces conditions d’autorisation, ce qui été fait par le décret n° 2007-388 du 21 mars 2007, relatif aux conditions d’implantation applicables à l’activité de soins de traitement du cancer. L’article 1er de ce décret a inséré au chapitre III du titre II du livre 1er de la sixième partie du code de la santé publique une section 7, intitulée « Traitement du cancer », composée des articles R6123-86 à R6123-95 dudit code, et les articles 2et 3 du même décret ont prévu des dispositions transitoires pour la délivrance des autorisations nécessaires.
Des articles R6123-86 à R6123-95, insérés dans le code de la santé publique par l’article 1er du décret du 21 mars 2007, nous retiendrons simplement, pour les litiges que nous avons à examiner, les dispositions des articles R6123-87 et R6123-89. L’article R6123-87 dispose que l’autorisation nécessaire pour exercer l’activité de soins du cancer peut être accordée pour une ou plusieurs des pratiques thérapeutiques suivantes : 1° Chirurgie des cancers ; 2° Radiothérapie externe, curiethérapie, dont le type est précisé ; 3° Utilisation thérapeutique de radioéléments en sources non scellées ; 4° Chimiothérapie ou autres traitements médicaux spécifiques du cancer. L’article R. 6123-89 dispose que « L’autorisation ne peut être délivrée ou renouvelée que si le demandeur respecte les seuils d’activité minimale annuelle arrêtés par le ministre chargé de la santé (…). Ces seuils (…) prennent en compte le nombre d’interventions effectuées ou le nombre de patients traités sur les trois années écoulées. (…) / Toutefois, à titre dérogatoire, la première autorisation peut être accordée à un demandeur dont l’activité prévisionnelle annuelle est, au commencement de la mise en œuvre de cette autorisation, au moins égale à 80 % du seuil d’activité minimale prévu à l’alinéa précédent (…) ». Il convient en outre de préciser que les seuils d’activité minimale annuelle ont été fixés par un arrêté du 29 mars 2007, lequel distingue, en ce qui concerne la chirurgie des cancers, plusieurs pathologies en définissant un seuil d’intervention distinct pour chacune d’elles, un seuil de 30 interventions par an étant ainsi retenu pour le traitement chirurgical des pathologies thoraciques, sur lesquelles portent les litiges qui vous sont soumis.
Pour les dispositions transitoires, l’article 2 du décret n° 2007-388 du 21 mars 2007 disposait que les schémas régionaux d’organisation sanitaire en vigueur à sa date de publication devraient être révisés dans un délai de dix-huit mois à compter de cette date, ce qui n’a pas posé problème, et son article 3 disposait que les personnes qui exerçaient l’activité de traitement du cancer devaient solliciter l’autorisation prévue par l’article L6122-1 du code de la santé publique, cette autorisation pouvant leur être accordée sous diverses conditions, dont celle d’attester au moment de la décision de l’agence régionale de l’hospitalisation d’une activité minimale annuelle réalisée au moins égale à 80 % de l’activité minimale annuelle définie en application des dispositions de l’article R6123-89 du code de la santé publique accompagnée d’un engagement de remplir la condition d’activité minimale annuelle dans un délai de dix-huit mois.
Concrètement, il nous paraît résulter de ces dispositions que pour pouvoir présenter une demande d’autorisation en vue de la poursuite d’une activité de traitement du cancer par la chirurgie pour les pathologies thoraciques, il fallait avoir réalisé au moins 24 interventions par an au cours des trois années précédentes et s’engager à en réaliser au moins 30 par an avant le terme d’un délai de 18 mois suivant l’autorisation accordée.
Après la publication dudit décret, le schéma régional d’organisation sanitaire de la région Rhône-Alpes a été révisé par un arrêté du 30 avril 2008 puis une période de six mois a été ouverte afin que les établissements de santé puissent solliciter l’autorisation d’exercer l’activité de soins de traitement du cancer. C’est dans ce cadre que, s’agissant de l’agglomération de B..., la CLINIQUE DU ... et le centre hospitalier de B... ont sollicité l’autorisation de continuer à exercer cette activité.
Le centre hospitalier a sollicité cette autorisation pour les pratiques thérapeutiques de chirurgie des cancers, radiothérapie externe et chimiothérapie et il a bénéficié d’un avis favorable du comité régional de l’organisation sanitaire pour l’ensemble de ces pratiques, sous condition d’une coopération avec la CLINIQUE DU ... dans le cadre d’un groupement de coopération sanitaire pour la chirurgie du thorax, alors que la CLINIQUE DU ..., qui sollicitait cette autorisation pour les pratiques thérapeutiques de chirurgie des cancers et chimiothérapie, n’a bénéficié d’un avis favorable que pour les pratiques de chimiothérapie et de chirurgie, à l’exclusion de la chirurgie des cancers du thorax.
Par deux délibérations du 10 juin 2009, la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes a suivi ces avis du comité régional de l’organisation sanitaire, la délibération n° 02009/120 du 10 juin 2009 autorisant la société anonyme CLINIQUE DU ... à exercer l’activité de soins de traitement du cancer, pour les patients âgés d’au moins dix-huit ans, par chirurgie à l’exception des pathologies thoraciques et par chimiothérapie et celle n° 02009/121 autorisant le centre hospitalier de B... à exercer cette activité par chimiothérapie, radiothérapie externe et chirurgie, mais l’article 2 de cette délibération précise que l’autorisation de chirurgie concernant les pathologies thoraciques est accordée sous condition de mettre en œuvre des mesures de coopération avec la CLINIQUE DU ... pour une implantation finale sur le site du centre hospitalier dans les meilleurs délais.
Cette situation s’explique par le fait que la commission a estimé, en retenant une moyenne de l’activité exercée sur les trois années écoulées, que la condition relative au nombre minimum d’interventions chirurgicales pour les pathologies thoraciques n’était remplie ni par la CLINIQUE DU ..., ni par le centre hospitalier de B..., mais qu’il était néanmoins nécessaire de maintenir une offre de soins pour ces pathologies thoraciques dans le bassin hospitalier de B..., le nombre total des interventions pratiquées par les deux établissements étant supérieur au minimum requis. Cette solution nous paraît contestable puisqu’aucun des deux établissements ne remplissait la condition relative à une activité minimale de 24 interventions par an sur les trois années écoulées, sauf à considérer qu’il suffisait d’avoir atteint ce seuil au cours de l’une de ces trois années, le centre hospitalier ayant alors réalisé le nombre d’interventions nécessaires en 2006 et la CLINIQUE DU ... en 2008. Il nous semble donc que son application des textes, retenant une moyenne sur trois ans, devait conduire la commission à rejeter les deux demandes qui lui avaient été présentées, ce qui aurait entraîné une cessation de l’activité de soins des deux établissements. Il en serait résulté un déficit de l’offre de soins dans le bassin hospitalier de B.... Le centre hospitalier, la clinique ou un groupement de coopération sanitaire, constitué par ces deux établissements, aurait alors pu présenter une nouvelle demande d’autorisation selon la procédure permanente prévue par l’article R. 6123-89, en faisant état d’une activité prévisionnelle future d’au moins 80 % du seuil d’activité minimale. Eu égard à l’interruption de l’offre de soins qu’aurait entraîné cette application des textes, la commission exécutive a préféré autoriser le centre hospitalier à poursuivre son activité tout en le contraignant à mettre en place des mesures de coopération avec la clinique, ce qui laissait quand même planer une incertitude sur la légalité de la poursuite de l’activité du centre hospitalier dans l’attente de la mise en place des mesures de coopération avec la clinique. Toutefois, cette dernière n’a pas accepté cette situation.
D’abord informée de la délibération n° 02009/120 du 10 juin 2009 lui refusant l’autorisation qu’elle sollicitait pour le traitement chirurgical du cancer pour les pathologies thoraciques, la CLINIQUE DU ... a contesté cette délibération, en tant qu’elle lui refusait l’autorisation sollicitée, par un recours hiérarchique formé auprès du ministre chargé de la santé le 2 septembre 2009. Ce recours a fait l’objet d’une décision implicite de rejet à l’expiration d’un délai de six mois, conformément aux dispositions de l’article R. 6122-42 du code de la santé publique, dans sa rédaction alors en vigueur, suivie d’une décision expresse de rejet le 10 juin 2010. La CLINIQUE DU ... a alors saisi le Tribunal administratif de Lyon d’une première demande tendant à l’annulation de la délibération n° 02009-120 du 10 juin 2009, en tant qu’elle lui faisait grief, et à l’annulation de la décision ministérielle du 10 juin 2010 rejetant le recours hiérarchique formé contre cette délibération. Le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande par le jugement n° 1004840 du 11 janvier 2011 que conteste la CLINIQUE DU ... par la requête enregistrée sous le n° 11LY00664.
C’est par l’examen de cette requête que nous allons commencer.
Sur la régularité du jugement n° 1004840 contesté dans la requête n° 11LY00664, la requérante soutient que le Tribunal administratif n’a pas répondu à des moyens, soulevés par voie d’exception, tirés de la violation des articles 6 et 11 du règlement intérieur du comité régional de l’organisation sanitaire de la région Rhône-Alpes lors de l’examen par ce comité et le comité régional de l’organisation sociale et médico-sociale, réunis en formation conjointe, du projet de révision du schéma régional d’organisation sanitaire le 27 mars 2008. Le Tribunal administratif, qui a écarté plusieurs moyens relatifs à la méconnaissance de diverses dispositions du code de la santé publique lors de la procédure de révision du schéma régional d’organisation sanitaire, a effectivement omis de répondre aux moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du règlement intérieur du comité régional de l’organisation sanitaire lors de la procédure de révision du schéma régional d’organisation sanitaire. Vous ne pourrez toutefois retenir cette omission pour annuler le jugement attaqué que si vous estimez que la requérante pouvait exciper d’une illégalité du schéma régional d’organisation sanitaire à l’encontre de la délibération du 10 juin 2009 lui accordant l’autorisation de pratiquer une activité de soins de traitement du cancer par chirurgie sauf pour les pathologies thoraciques. En effet, si cette délibération vise le schéma régional d’organisation sanitaire, ce qui est normal puisqu’il résulte des dispositions de l’article L6122-2 du code de la santé publique que les autorisations accordées doivent, sauf dérogation à titre exceptionnel, être compatibles avec les objectifs fixés par le schéma régional d’organisation sanitaire, le refus qu’elle contient n’est pas fondé sur une méconnaissance des objectifs du schéma régional d’organisation sanitaire, mais sur le fait que la CLINIQUE DU ... ne remplissait pas la condition relative au seuil d’activité minimale défini par l’arrêté du 29 mars 2007 pour les pathologies thoraciques. Par suite, la délibération attaquée n’étant pas prise en application du schéma régional d’organisation sanitaire mais en application de l’arrêté du 29 mars 2007, nous vous proposons de considérer que les moyens tirés d’éventuelles irrégularités entachant la procédure d’élaboration du schéma régional d’organisation sanitaire étaient en tout état de cause inopérants et que les premiers juges n’ont pas entachés leur jugement d’irrégularité en s’abstenant de se prononcer sur ces moyens.
C’est donc dans le cadre de l’effet dévolutif de l’appel que nous vous proposons d’examiner les autres moyens de cette requête.
Sur la légalité de la délibération 2009-120 du 10 juin 2009, la requérante soutient en premier lieu qu’en application de l’article L6122-9 du code de la santé publique, un bilan quantifié de l’offre de soins devait être arrêté et publié par le directeur de l’Agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes avant l’ouverture de la période exceptionnelle de dépôt des demandes d’autorisation, ce qui aurait été fait dans toutes les autres régions. En effet, l’article L. 6122-9 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n° 2010-177 du 23 février 2010 disposait : « … Les demandes d'autorisation ou de renouvellement d'autorisation portant sur des activités de soins ou équipements de même nature sont reçues au cours de périodes déterminées par voie réglementaire. Elles sont examinées sans qu'il soit tenu compte de l'ordre de leur dépôt. / Dans le mois qui précède le début de chaque période, le directeur de l'agence régionale de l'hospitalisation publie un bilan quantifié de l'offre de soins faisant apparaître les territoires de santé dans lesquels cette offre est insuffisante au regard du schéma d'organisation sanitaire ».
D’après notre lecture des textes, les dispositions transitoires de l’article 2 du décret n° 2007-388 du 21 mars 2007 donnaient à l’agence régionale de l’hospitalisation un délai de 18 mois pour arrêter la révision du schéma régional d’organisation sanitaire, ce qui a été fait, puis les dispositions de l’article 3 du même décret lui donnait un délai de 2 mois pour ouvrir une période de dépôt de demande d’autorisation, afin de permettre aux personnes exerçant une activité de soins de traitement du cancer d’obtenir l’autorisation désormais nécessaire à cette activité, mais ces dispositions réglementaires ne dérogeaient en rien aux dispositions législatives de l’article L6122-9 du code de la santé publique qui imposent au directeur de l’agence de publier un bilan quantifié de l’offre de soins dans le mois qui précède l’ouverture de chaque période de dépôt de demande d’autorisation. La requérante nous paraît donc fondée à soutenir que la délibération attaquée est entachée d’un vice de procédure, même si elle s’inscrit dans le contexte particulier des dispositions transitoires prévues par le décret n° 02007-388, les dispositions législatives de l’article L6122-9 du code de la santé publique étant applicables à toutes les périodes de demande d’autorisation ou de renouvellement d’autorisation, quand bien même la demande d’autorisation serait une demande de mise en conformité d’une pratique existante avec une réglementation nouvelle. Nous sommes toutefois réticents à vous proposer d’annuler la délibération attaquée pour ce motif, car ce vice de procédure ne nous paraît pas substantiel dans les circonstances de l’espèce. En effet, le bilan quantifié de l’offre de soins doit faire apparaître les territoires de santé dans lesquels cette offre est insuffisante au regard du schéma d'organisation sanitaire, ce qui était sans incidence dans les circonstances de l’espèce où aucune insuffisance de l’offre de soins n’était encore à déplorer.
La requérante soutient en deuxième lieu qu’il résultait des dispositions de l’article R6122-19 du code de la santé publique et de celles de l’article 11 du règlement intérieur du comité régional de l’organisation sanitaire que le directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation devait procéder par voie d’arrêté ou par un acte administratif à la désignation d’un rapporteur devant ce comité mais, s’il appartenait effectivement au directeur de l’agence régionale de l’hospitalisation de désigner un rapporteur, il nous semble que vous pourrez juger, comme l’ont fait les premiers juges, que cette désignation, qui pouvait être purement verbale, n’avait pas à être matérialisée par un arrêté ou un acte administratif publié. La situation nous paraît sur ce point comparable à celle prévue par l’article R611-16 du code de justice administrative pour la désignation d’un rapporteur devant la cour administrative d’appel.
La requérante soutient en troisième lieu que le comité régional de l’organisation sanitaire n’a pas été consulté sur un projet de délibération de la commission exécutive de l’Agence régionale de l’hospitalisation établi par ladite agence, puisqu’il n’a été consulté que sur un tableau récapitulant les demandes présentées avec un projet de dispositif sans que l’ensemble des motifs de ce projet de délibération ne soient indiqués. En l’espèce, il ressort des pièces du dossier et notamment de la pièce 9 que le comité régional de l’organisation sanitaire a été consulté sur un tableau indiquant la nature de la demande, la proposition de l’agence régionale de l’hospitalisation avec pour seule motivation la mention « pour les pathologies thoraciques : activité inférieure à 80 % (15 cas), à voir dans le cadre d’une coopération avec le centre hospitalier de B.... ». Dans les circonstances de l’espèce, cette motivation nous paraît suffisante, s’agissant d’un document préparatoire, malgré les lacunes qui l’entachent. En effet, il nous semble possible de considérer que les règles de droit étaient nécessairement connues des membres du comité régional de l’organisation sanitaire et n’avaient donc pas à être rappelées pour chacune des demandes examinées et qu’une éventuelle erreur dans les motifs de fait d’une délibération ne constitue pas une insuffisance de motivation. En revanche, la requérante nous paraît fondée à soutenir que le tableau transmis aux membres du comité régional de l’organisation sanitaire ne présentait pas la situation des établissements de soins de l’agglomération de B... de manière impartiale, puisqu’elle avait réalisé 26 interventions de chirurgie carcinologique thoracique en 2008 et 23 interventions sur les sept premiers mois de 2009, alors que le centre hospitalier n’en avait réalisé que 17 en 2008. Cette seconde branche du moyen nous conduit à revenir aux dispositions applicables en l’espèce. L’article 3 du décret n° 2007-388 du 21 mars 2007 précise que l’autorisation est accordée, sous réserve que les autres conditions soient remplies, aux personnes qui attestent au moment de la décision de l’agence régionale de l’hospitalisation d’une activité minimale annuelle réalisée au moins égale à 80 % de l’activité minimale annuelle applicable, établie conformément aux dispositions de l’article R6123-89 du code de la santé publique. Le problème est que l’article R. 6123-89 dispose que les seuils prennent en compte le nombre d’interventions effectuées ou le nombre de patients traités sur les trois années écoulées. Il fallait donc établir au moment de la décision de l’agence régionale de l’hospitalisation, laquelle est intervenue en 2009, une activité minimale annuelle de 24 interventions chirurgicales au titre des années 2006, 2007 et 2008. La requérante n’est donc pas fondée à se prévaloir de son activité sur les sept premiers mois de 2009 pour soutenir que des informations erronées ont été données aux membres du comité régional de l’organisation sanitaire, mais il reste une difficulté relative à la mention d’un seul chiffre, correspondant à la moyenne des interventions réalisées sur les trois années 2006, 2007 et 2008, alors que l’article R6123-89 prévoit une prise en compte du nombre d’interventions réalisées sur trois ans. Il nous semble qu’en prévoyant une période de trois ans, l’article R6123-89 a entendu éviter que des décisions soient prises au vu de situations exceptionnelles. On ne peut donc pas retenir une seule année, qui peut être caractérisée par une situation exceptionnelle du fait de l’absence d’un chirurgien ou d’un transfert massif de patients en provenance d’un établissement voisin temporairement sinistré, ni une moyenne de trois ans, qui peut être faussée par la présence d’une année exceptionnelle au cours de ces trois ans, ni exiger que le seuil soit atteint au cours de chacune des trois années, alors qu’en retenant le nombre d’interventions réalisées au cours des trois années écoulées, il est possible, au vu des explications éventuelles accompagnant ces chiffres, de discerner si l’activité est constante et de s’intéresser aux causes et conséquences des variations éventuelles pour apprécier les besoins des populations concernées. Il nous semble donc qu’en se bornant à fournir un chiffre par établissement, alors qu’elle aurait dû en donner trois, l’agence régionale de l’hospitalisation n’a pas mis les membres du comité régional de l’organisation sanitaire en mesure de se prononcer en toute connaissance de cause sur les autorisations sollicitées et que vous pourriez retenir ce vice de procédure, doublé d’une erreur de droit dans le fait d’avoir retenu une moyenne, pour annuler la délibération litigieuse.
La requérante soutient, en quatrième lieu, qu’elle est fondée à exciper de l’illégalité du volet cancérologie du schéma régional d’organisation sanitaire mais, comme nous vous l’avons indiqué lors de l’examen de la régularité du jugement attaqué, il nous semble que les moyens afférents à l’illégalité du schéma régional d’organisation sanitaire sont inopérants, la délibération attaquée n’étant pas une décision d’application du schéma régional d’organisation sanitaire.
La requérante soutient, en cinquième lieu, qu’il n’appartenait pas au ministre de la santé de définir par un simple arrêté ministériel les conditions d’implantation et les conditions de fonctionnement d’activités, de disciplines ou de thérapeutiques particulières, puisque seuls des décrets simples ou des décrets en Conseil d’Etat peuvent prévoir de telles conditions. L’article L6122-1 du code de la santé publique dispose que la liste des activités de soins et des équipements matériels lourds soumis à autorisation est fixée par décret en Conseil d’Etat et l’article R6122-25 du même code soumet à autorisation l’activité de soins « traitement du cancer », sans autre précision, mais l’article R6123-87, issu du décret du 21 mars 2007, a distingué différentes pratiques thérapeutiques, dont la chirurgie des cancers, et l’article R6123-89 a indiqué que les seuils d’activité minimale annuelle, arrêtés par le ministre chargé de la santé, concernaient certaines thérapeutiques ou certaines interventions chirurgicales, éventuellement par appareil anatomique ou par pathologie. Il nous semble donc que cet article, autorisant des distinctions de seuils d’activité par appareil anatomique ou par pathologie, donnait compétence au ministre chargé de la santé pour distinguer diverses pathologies au sein des interventions de chirurgie, ce qui nous conduit à vous proposer d’écarter le moyen tiré de l’incompétence du ministre pour fixer des seuils par pathologie.
La requérante soutient, en sixième lieu, que sa demande devait également être regardée comme présentée sur le fondement du 2e alinéa de l’article R6123-89 du code de la santé publique, qui concerne les primo-demandeurs d’autorisation, à qui une première autorisation peut être accordée à titre dérogatoire s’ils font valoir une activité prévisionnelle annuelle au moins égale à 80 % du seuil d’activité minimale, sous réserve que l’activité atteigne ce seuil au plus tard dix-huit mois après la visite de conformité, mais la requérante, qui ne mentionnait pas ce fondement dans sa demande, présentée comme une demande de maintien d’une activité existante et non comme une demande de création d’activité pour satisfaire un besoin pour lequel l’offre de soins aurait été insuffisante, relevait bien des dispositions de l’article 3 du décret du 21 mars 2007 et non de celles du 2e alinéa de l’article R6123-89 du code de la santé publique puisqu’elle cherchait à poursuivre une activité existante. Nous vous proposons donc d’écarter ce moyen.
La requérante, soutient, en septième lieu, que le refus qui lui a été opposé est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation. Nous vous proposons de soumettre le refus d’autorisation contesté à un contrôle normal. Vous pourrez voir en ce sens CE 24 mars 2004 n° 249866 centre hospitalier privé Saint Martin. La difficulté en l’espèce est que si on examine l’activité de la requérante sur trois ans, comme l’exige l’article R6123-89 du code de la santé publique, elle ne remplissait pas la condition d’activité nécessaire pour présenter une demande d’autorisation au titre de l’article 3 du décret du 21 mars 2007, son activité étant insuffisante. Il nous semble donc difficile de retenir l’existence d’une erreur d’appréciation.
Il nous semble donc que seuls les moyens tirés de l’existence d’un vice de procédure devant le comité régional de l’organisation sanitaire et d’une erreur de droit dans le fait d’avoir retenu une moyenne au lieu de retenir les chiffres des trois dernières années sont de nature à conduire à l’annulation de la délibération attaquée.
Nous passerons plus rapidement sur la légalité de la décision ministérielle du 10 juin 2010, que vous pourrez annuler, si vous nous suivez, par voie de conséquence de l’annulation de la délibération n° 2009/120 du 10 juin 2009.
La requérante soutient que cette décision ministérielle est entachée d’un vice de procédure car cinq personnes appartenant à la direction générale de l’offre de soins du ministère de la santé ont assisté à la séance de la section sanitaire du comité national de l’organisation sanitaire et sociale qui a été consulté, conformément aux dispositions de l’article R. 6122-2 du code de la santé publique sur son recours hiérarchique. Le procès-verbal de la réunion du comité national de l’organisation sanitaire et sociale atteste effectivement que cinq personnes qui n’étaient pas membres du comité ont assisté à la séance au cours de laquelle le recours hiérarchique de la requérante a été examiné mais il n’en ressort pas que ces personnes, clairement identifiées comme assistant également à la réunion, auraient participé aux débats ou aux votes. Leur seule présence ne nous paraît donc pas de nature à entacher d’un vice de procédure la décision ministérielle contestée. Vous pourriez éventuellement retenir un manque d’impartialité de l’administration lors de cette consultation, puisqu’il a été indiqué aux membres du comité qu’aucun recours n’avait été enregistré à l’encontre de la délibération autorisant le centre hospitalier de B... à poursuivre son activité de chirurgie pour les pathologies thoraciques, alors que s’il est vrai qu’aucun recours hiérarchique n’a été formé contre la délibération 2009/121 concernant le centre hospitalier, un recours contentieux avait été formé le 7 décembre 2009, avant la réunion du comité national le 4 février 2010, mais il n’est pas certain que le rapporteur du dossier en ait été informé.
En revanche, la requérante ne nous paraît pas fondée à soutenir que l’administration avait l’obligation de l’informer des noms et coordonnées du rapporteur devant le comité national de l’organisation sanitaire et sociale, ce qu’elle n’aurait pas fait, en méconnaissance des dispositions de l’article 19 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 et du décret n° 2001-492 du 6 juin 2001. En effet, si l’article 1er de ce décret dispose que l’accusé de réception du recours hiérarchique, considéré comme une demande au sens de l’article 19 de la loi du 12 avril 2000, doit comporter la désignation, l’adresse postale et le cas échéant, électronique, ainsi que le numéro de téléphone du service chargé du dossier, il n’en résulte pas que, s’agissant des recours hiérarchiques en matière d’autorisation d’activité de soins, le ministre doive en outre communiquer à l’auteur du recours hiérarchique le nom du rapporteur chargé de présenter ce recours au comité national de l’organisation sanitaire et sociale.
Si vous nous suivez pour considérer que c’est à tort que les premiers juges ont rejeté les demandes d’annulation présentées par la requérante, en considérant, soit que les décisions litigieuses sont intervenues au terme d’une procédure irrégulière du fait de l’insuffisance ou du manque d’impartialité des informations fournies au comité régional de l’organisation sanitaire et au comité national de l’organisation sanitaire et sociale, soit que l’administration a commis une erreur de droit en retenant le seul chiffre de 15 interventions correspondant à une moyenne du nombre d’interventions pratiquées par la requérante au cours des trois années précédentes, alors qu’elle aurait dû retenir le nombre d’interventions pratiquées au cours de chacune de ces trois années, nous vous proposons de considérer que votre arrêt n’implique pas nécessairement que l’administration accorde à la requérante l’autorisation qu’elle sollicitait mais qu’elle implique seulement un réexamen de sa demande d’autorisation.
Enfin la requérante demande la condamnation de l’Etat à lui verser une somme de 3 500 euros au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative. Comme l’Etat est partie perdante dans la présente instance, en ce qui concerne l’annulation de la décision ministérielle rejetant le recours gracieux, il ne nous semblerait pas inéquitable de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à ce titre au profit de la CLINIQUE DU ....
Par ces motifs, nous concluons, dans l’instance n° 11LY00664, premièrement, à l’annulation du jugement attaqué, à l’annulation de l’article 1er de la délibération n° 02009/120 du 10 juin 2009 de la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes en tant qu’il refuse à la CLINIQUE DU ... l’autorisation de pratiquer l’activité de soins de traitement du cancer par la chirurgie pour les pathologies thoraciques et à l’annulation de la décision ministérielle du 10 juin 2010 rejetant le recours hiérarchique formé par la CLINIQUE DU ... contre cette délibération, deuxièmement, à ce qu’il soit enjoint à l’agence régionale de santé de Rhône-Alpes, ayant succédé à l’agence régionale de l’hospitalisation, de procéder au réexamen de la demande d’autorisation présentée par la CLINIQUE DU ... pour le traitement du cancer par la chirurgie s’agissant des pathologies thoraciques et, troisièmement, à la mise d’une somme de 1 500 euros à la charge de l’Etat au profit de la CLINIQUE DU ... au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative.
Nous en arrivons ainsi à la requête n° 11LY00687 qui concerne la délibération n° 2009/121 de la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes autorisant le centre hospitalier de B... à poursuivre son activité de traitement du cancer.
Cette délibération n° 2009/121 du 10 juin 2009 a été publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de la région Rhône-Alpes le 5 octobre 2009.
Dans cette délibération, la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes a notamment considéré que le centre hospitalier ne remplissait pas le seuil de 80 % de l’activité minimale pour les pathologies thoraciques mais que celles-ci pouvaient être prises en charge conformément aux seuils en mutualisant les données d’activité de la CLINIQUE DU ... et du centre hospitalier de B... afin de garantir une offre de proximité avec le regroupement en un seul lieu de l’activité alors développée sur deux sites. Elle a ensuite considéré que le nombre d’interventions constaté en moyenne sur la période 2006-2008 sur le site du centre hospitalier était supérieur à celui constaté sur le site de la clinique. Elle a en conséquence décidé, par l’article 1er de la délibération 2009/121, d’autoriser le centre hospitalier à exercer l’ensemble des activités de soins pour lesquelles il sollicitait une autorisation, et par l’article 2 de la même délibération, subordonné l’autorisation accordée pour le traitement chirurgical du cancer s’agissant des pathologies thoraciques à une condition de mise en œuvre de mesures de coopération avec la CLINIQUE DU ....
La requérante a demandé au Tribunal administratif de Lyon le lundi 7 décembre 2009 l’annulation de l’article 2 de cette délibération autorisant le centre hospitalier F..., dit centre hospitalier de B..., à pratiquer l’activité de soins de traitement du cancer par la chirurgie pour les pathologies thoraciques. Le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande par le jugement n° 0907463 du 11 janvier 2011 dont elle interjette appel par la requête n° 11LY00687.
Vous pourrez constater que l’autorisation a été accordée pour le traitement du cancer par la chirurgie de manière générale, sans distinction entre les organes, par l’article 1er de la délibération attaquée et que l’article 2 accorde l’autorisation sollicitée pour les pathologies thoraciques à la condition de mise en œuvre de mesures de coopération avec la CLINIQUE DU ..., conformément aux dispositions de l’article L6122-7 du code de la santé publique, pour une implantation de cette activité sur le seul site du centre hospitalier.
Comme en première instance, la requérante ne conteste en appel que l’article 2 de cette délibération. Le problème en l’espèce est que l’annulation de l’article 2 laissera subsister l’article 1er qui accordait une autorisation générale pour la chirurgie sans distinguer entre les organes et qu’il ne fera disparaître que l’obligation de mise en œuvre de mesures de coopération avec la CLINIQUE DU ... pour la chirurgie des pathologies thoraciques. Il nous semble cependant que les dispositions de l’article 2 sont divisibles du reste de la délibération attaquée et que la requérante a un intérêt suffisant à les contester puisqu’elles concernent le transfert de sa propre activité sur le site du centre hospitalier.
Dans cette instance, la régularité du jugement attaqué n’est pas critiquée mais vous retrouverez ensuite la plupart des moyens exposés dans l’instance n° 11LY00664.
La requérante soutient en outre que la délibération 2009/121 méconnait les dispositions des articles L6143-1 et R6144-1 du code de la santé publique relatifs aux compétences du conseil d’administration et de la commission médicale d’établissement, mais ces organes n’avaient pas à être consultés avant la délibération de la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation, même si la mise en œuvre de l’autorisation accordée était subordonnée à un engagement de coopération dont ces organes ont à connaître.
De même, si la requérante soutient que les mesures de coopération mentionnées par les dispositions de l’article L6122-7 du code de la santé publique doivent avoir été prévues par le schéma régional d’organisation sanitaire, ce moyen nous paraît pouvoir être écarté, l’administration pouvant imposer dans l’intérêt de la santé publique des mesures de regroupement, même si elles n’ont pas été prévues par le schéma régional d’organisation sanitaire.
Parmi les moyens déjà examinés dans l’instance précédente, ceux tirés du défaut de formalisme concernant la désignation du rapporteur du dossier devant le comité régional de l’organisation sanitaire, de l’absence de projet de délibération de l’agence régionale de l’hospitalisation lors de la consultation de ce comité régional ou de l’absence de texte imposant un seuil d’activité minimale pour la chirurgie thoracique nous paraitraient pouvoir être écartés par les motifs que nous vous avons exposés dans l’instance n° 11LY00664.
Nous vous proposerions également d’écarter le moyen tiré de l’existence d’une erreur d’appréciation car il nous semble qu’il ressort des pièces du dossier qu’eu égard au nombre des interventions pratiquées, il n’y avait pas lieu de maintenir deux sites de traitement du cancer par chirurgie pour les pathologies thoraciques dans le bassin hospitalier de B... et que, même si le centre hospitalier de B... a réalisé un peu moins d’intervention que la CLINIQUE DU ... en 2008, il n’était pas illogique de lui accorder l’autorisation sollicitée compte tenu du fait qu’il présentait une offre de soins plus large que la clinique, qui ne bénéficiait pas d’une autorisation pour la radiothérapie, alors que des rayons sont souvent nécessaires après la chirurgie, étant en outre précisé que le centre hospitalier avait réalisé plus d’interventions que la clinique sur l’ensemble de la période considérée.
Nous serions plus hésitants quant à ceux relatifs à l’absence de bilan quantifié de l’offre de soins et à la légalité du volet cancérologie du schéma régional d’organisation sanitaire, car contrairement au refus d’autorisation opposée à la CLINIQUE DU ..., l’autorisation accordée au centre hospitalier de B... pour la chirurgie thoracique, malgré le caractère insuffisant de sa propre activité, repose sur une appréciation des besoins de la population du bassin hospitalier de B... et sur les objectifs fixés par le schéma régional d’organisation sanitaire qui préconisait d’identifier au moins un site de cancérologie par bassin hospitalier.
Mais il nous semble toutefois préférable de retenir le même moyen d’annulation que dans l’instance précédente, celui tiré du défaut d’impartialité de l’administration dans la présentation des chiffres, ou de l’erreur de droit, consistant à ne retenir que la seule moyenne des interventions réalisées dans les deux établissements concernés, alors que le comité régional de l’organisation sanitaire et la commission exécutive auraient dû se prononcer au vu des chiffres de chacune des trois années précédentes afin de pouvoir tenir compte des tendances qu’ils révélaient, puisque pour les années 2006, 2007 et 2008, l’activité de la CLINIQUE DU ... a réalisé 10, 18 et 26 interventions de chirurgie du cancer pour les pathologies thoraciques alors que le centre hospitalier de B... en a effectué 26, 21 et 17 au cours des mêmes années, à moins que vous ne préfériez retenir celui tiré de l’existence d’une autre erreur de droit consistant à accorder par avance une autorisation à un groupement de coopération sanitaire encore inexistant. En effet, il nous semble que n’ayant pas été saisi d’une demande présentée par un groupement, la commission exécutive ne pouvait pas accorder l’autorisation sollicitée au centre hospitalier de B... en lui imposant par avance une coopération avec la CLINIQUE DU ..., ce qui ne correspondait pas nécessairement au souhait de ces deux établissements et ne manquait pas de poser problème quant à la poursuite de l’activité en attendant la mise en place de la coopération exigée.
Nous vous proposons donc de considérer que la requérante est également fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement n° 0907463 le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d’annulation de l’article 2 de la délibération n° 2009/121 de la commission exécutive de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes et d’annuler ce jugement et cet article 2.
Il vous restera alors à statuer sur les conclusions présentées au titre de l’article L761-1 du code de justice administrative par la requérante mais ces conclusions sont dirigées contre l’Etat, qui n’est pas partie à la présente instance, alors qu’elles devaient être dirigées contre l’agence régionale de l’hospitalisation désormais remplacée par l’agence régionale de la santé, ce qui nous conduit à vous proposer de les rejeter.
Par ces motifs, nous concluons, dans l’instance n° 11LY00687 à l’annulation du jugement attaqué et à l’annulation de l’article 2 de la délibération n° 2009-121 du 10 juin 2009 de l’agence régionale de l’hospitalisation de Rhône-Alpes et au rejet du surplus des conclusions de la requête.