Cette affaire pose la question de l’application des dispositions du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi n° 086‑33 du 9 janvier 1986 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, en particulier de son article 30, ainsi rédigé : « A l'issue des congés prévus aux titres IV, V et VI, les agents physiquement aptes et qui remplissent toujours les conditions énumérées à l'article 3 sont réemployés sur leur emploi ou occupation précédente dans la mesure permise par le service. Dans le cas contraire, ils sont licenciés et disposent d'une priorité de réemploi dans l'établissement pour exercer des fonctions similaires assorties d'une rémunération équivalente ».
Le licenciement de Mme B., le 3 décembre 1993, a effectivement été prononcé sur le fondement de ces dispositions, le congé parental dont a bénéficié l’intéressée entrant dans les prévisions du titre V.
Après son licenciement, motivé par l’absence de vacance de poste, en particulier de celui qu’elle occupait avant la période de congé parental, Mme B. a été informée, le 28 novembre 1994, d’une éventuelle création de poste : elle a indiqué en réponse, par courrier du 7 décembre suivant, qu’elle serait éventuellement intéressée par ce poste. Apparemment, ce poste n’a pas été créé et il ne semble plus y avoir eu de contact entre Mme B. et l’ESTHI jusqu’au 30 juin 2000, date à laquelle l’agent reprenait contact avec l’établissement.
Il ressort du dossier que le poste occupé par Mme B. avant son départ en congé maternité puis parental a été pourvu par un agent contractuel, à compter du 1er juin 1988, lui-même remplacé à compter du 1er août 1998, par un autre psychologue contractuel.
Ce deuxième remplacement étant intervenu après le licenciement de Mme B. en 1993, elle soutient que l’ESTHI était tenue, en vertu des dispositions du décret de 1991 régissant les conditions de la priorité de réemploi, de l’informer de cette vacance de poste et de lui proposer le poste par priorité. L’ESTHI fait valoir, et il a été suivi par les premiers juges, qu’il incombait à l’intéressée de se manifester, ce qu’elle n’a fait qu’en juin 2000.
La jurisprudence administrative sur la mise en œuvre de la priorité de réemploi est rare et le Conseil d’Etat ne s’est pas prononcé sur la question de savoir si les textes font peser sur l’autorité administrative une obligation d’information des emplois vacants ou s’il incombe à l’agent de se porter candidat sur de tels emplois. Des arrêts des cours administratives d’appel de Bordeaux ne se prononçant pas explicitement, mais paraissant contradictoires (8 décembre 2003 « Dasseau ») et de Paris (24 janvier 2005 « Ministre de l’Equipement »).
L’ESTHI se prévaut de la jurisprudence de la Cour de Cassation en la matière, en faisant valoir que le juge judiciaire considère qu’un salarié ne peut invoquer l’inobservation par l’employeur de la priorité de réembauchage que s’il a manifesté le désir de bénéficier de cette possibilité. Même si le régime applicable aux agents publics est largement inspiré par les dispositions du code du travail, vous ne pourrez directement transposer cette solution, dès lors que les dispositions applicables aux agents publics et privés ne sont pas les mêmes : les articles du code du travail relatifs aux différentes hypothèses de priorité de réembauche (licenciement pour motif économique, réintégration d’un salarié candidat à certaines élections ou élu, réembauche après une démission pour élever un enfant …) prévoient en effet expressément que la priorité de réembauche est valable pendant une année et que le salarié doit solliciter sa réembauche).
S’agissant des agents publics, les garanties offertes pour le réemploi d’un agent à l’issue d’un congé constituent l’un des éléments essentiels du droit à congé lui-même (voir les conclusions du commissaire du gouvernement, Mlle Verot sous un arrêt du CE du 14 mai 2007 n° 0294908 « Union Fédérale Equipement CFDT ») . Les dispositions précitées du décret n° 091-155 du 6 février 1991 ne précisent, ni pendant combien de temps l’agent est susceptible de bénéficier d’une priorité de réemploi, ni s’il lui incombe de se manifester auprès de son employeur ou si celui-ci est tenu de l’informer des possibilités de reprise de fonctions.
Il a été jugé, sur le fondement des textes applicables à l’Etat, que les agents non titulaires bénéficient de règles de protection sociale équivalentes à celles qui s’appliquent aux fonctionnaires (CAA Paris 2 mars 2006 « Mme Bogeat-Tardieu »).
C’est dans cette équivalence, selon nous, et dans sa réciprocité, qu’il convient de chercher la réponse à la question qui vous est posée. Les hypothèses dans lesquelles le lien d’un fonctionnaire avec son administration est, sinon rompu, du moins suspendu, est comparable à celui d’un agent non titulaire concerné par la priorité de réemploi.
Pour le fonctionnaire, il s’agit de la position de mise en disponibilité, à la demande de l’agent ou d’office. Pour la fonction publique hospitalière, qui nous intéresse par rapport à l’employeur de Mme B., l’article 62 de la loi n° 086-33 du 9 janvier 1986, prévoit que « Le fonctionnaire mis en disponibilité qui refuse successivement trois postes qui lui sont proposés en vue de sa réintégration peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ». Le décret n° 085-986 du 16 septembre 1985 modifié, venu compléter ces dispositions législatives, précise en son article 49 que « Trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité, le fonctionnaire fait connaître à son administration d'origine sa décision de solliciter le renouvellement de la disponibilité ou de réintégrer son corps d'origine. (…) . A l'issue de sa disponibilité, l'une des trois premières vacances dans son grade doit être proposée au fonctionnaire. S'il refuse successivement trois postes qui lui sont proposés, il peut être licencié après avis de la commission administrative paritaire. ».
Le fonctionnaire, ainsi confronté à certaines contraintes au moment de sa réintégration, doit notamment veiller à se manifester auprès de son administration avant l’expiration de sa disponibilité et, en cas de refus de trois postes, il peut définitivement perdre son statut. Sauf à admettre qu’un agent non titulaire pourrait se trouver dans une situation plus protectrice ou bénéficier de droits plus étendus qu’un fonctionnaire, vous devrez considérer qu’il incombe à un agent contractuel de la fonction publique hospitalière de manifester auprès de son employeur, en vertu des dispositions de l’article 30 du décret n° 091-155 du 6 février 1991, sa volonté de bénéficier de la priorité de réemploi instaurée par cet article, sans qu’aucune disposition n’impose à l’autorité administrative d’informer l’agent des éventuelles vacances d’emploi en l’absence d’une telle manifestation.
Contrairement à ce que fait valoir Mme B., la demande de réintégration qu’elle a formulée en 1993 ne vaut pas demande à bénéficier d’une priorité de réemploi. Cette demande est en effet antérieure à la date de mise en œuvre des dispositions de l’article 30 du décret de 1991 : du fait de l’absence de vacance de son poste, la demande de Mme B. a donné lieu à un licenciement, point de départ de la mise en œuvre de ces dispositions.
Le courrier de Mme B. de décembre 1994 nous paraît pouvoir être regardé comme une telle demande à bénéficier de la priorité de réemploi, mais sur un poste donné, celui que l’ESTHI envisageait de créer. La procédure n’ayant pas abouti à ce moment-là, vous devrez selon nous considérer comme les premiers juges, dès lors qu’il est constant que Mme B. ne s’est plus manifesté avant juin 2000, qu’au moment de la vacance de poste de 1998, son employeur n’avait pas été saisi par l’intéressée d’une demande à bénéficier de la priorité de réemploi, qu’il aurait été tenu de prendre en compte. Compte tenu de l’échange de courrier entre l’ESTHI et Mme B. à la fin de l’année 1994, l’appréciation aurait été plus délicate dans l’hypothèse d’une vacance d’emploi dans les premiers mois de l’année 1995, mais compte tenu du temps écoulé entre fin 1994 et la vacance d’août 1998, nous n’avons pas d’hésitation et …
Par ces motifs, Nous concluons au rejet de la requête.