L’avis d’inaptitude médicale d’un candidat à la réserve opérationnelle, fait grief

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Décision de justice

CAA Lyon, 5ème chambre – N° 25LY00966 – 16 octobre 2025 – C+

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 25LY00966

Numéro Légifrance : CETATEXT000052414996

Date de la décision : 16 octobre 2025

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

Inaptitude médicale, Acte faisant grief

Rubriques

Procédure

Résumé

L'avis d’inaptitude médicale rendu par le médecin du service médical statutaire de la police nationale, qui fait obstacle, en vertu de l’article 4 de l’arrêté du 25 novembre 2022 relatif aux conditions de santé particulières applicables aux réservistes opérationnels de la police nationale, à la poursuite du recrutement d’un candidat dans cette réserve, constitue un acte faisant grief qui peut être déféré au juge de l'excès de pouvoir1.

54-01-01-01-01, Procédure, Introduction de l'instance, Décisions pouvant ou non faire l'objet d'un recours, Actes constituant des décisions susceptibles de recours, Avis et propositions

Notes

1 Rappr., s'agissant de l’avis défavorable du conseil d’administration d’une université sur le recrutement d’un professeur, CE, 29 mai 2020, n° 424367; s'agissant de la délibération du comité de sélection écartant une candidature au concours de recrutement, CE, 9 février 2011, n° 317314, Tables du recueil Lebon pp. 956-1062-1100 Retour au texte

Conclusions du rapporteur public

Christophe Rivière

rapporteur public à la cour administrative d’appel de Lyon

M. B. a présenté sa candidature pour intégrer la réserve opérationnelle de la police nationale au titre de la session n°2024-2.

Par courriel du 11 avril 2024 du SGAMI Sud-Est, il a été informé qu’à l’issue des épreuves de sélection, les membres de la commission de sélection ont retenu sa candidature pour intégrer le stage de préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale.

L’intéressé a fait l’objet, à l’issue d’une visite médicale réalisée le 4 juin 2024, d’un avis d’inaptitude médicale définitive au recrutement dans la réserve opérationnelle de la police nationale du médecin inspecteur zonal le 15 juin 2024 pour le motif suivant : « récidive amétropique avec chambre antérieure de l’œil droit instable après nouvelle intervention sans recul suffisant ».

Il a alors présenté par courriers des 18 juin et 16 juillet 2024, un recours contre cet avis auprès du président du conseil médical interdépartemental.

Il a également, par courrier reçu le 5 septembre 2024, saisi le médecin chef de la police nationale d’un recours contre ce même avis, lequel a, par décision du 6 septembre 2024, rejeté sa demande et confirmé son inaptitude à la réserve opérationnelle de la police nationale.

M. B. a alors saisi le tribunal administratif de Lyon d’une demande tendant à l’annulation de l’avis médical émis le 4 juin 2024 par le médecin inspecteur zonal du SGAMI sud-est ainsi que le rejet par le médecin-chef de la police nationale de son recours contre cet avis.

Par une ordonnance du 17 janvier 2025 dont M. B. relève appel, la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable sur le fondement du 4° de l’article R. 222-1 du code de justice administrative au motif que ces avis ne constituent qu’une simple mesure préparatoire préalable à la prise de décision par l’autorité administrative compétente et n’ont pas la nature d’une décision administrative susceptible de faire l’objet d’un recours pour excès de pouvoir.

L’intéressé soutient que c’est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande comme irrecevable dès lors que l’avis médical d’inaptitude n’a fait que révéler la décision implicite de rejet de sa demande d’intégrer la réserve opérationnelle de la police nationale et qu’aucune autre décision ne lui a été notifiée après la déclaration d’inaptitude qu’il s’est vu opposer.

Or, il résulte des dispositions des articles L. 411-9 et R. 411-26 du code de la sécurité intérieure, de l’article 1er de l’arrêté du 13 juillet 2022 relatif au recrutement et à la préparation à la réserve opérationnelle de la police nationale et des articles 1er, 3 et 4 de l’arrêté du 25 novembre 2022 relatif aux conditions de santé particulières applicables aux réservistes opérationnels de la police nationale, que l’admission dans la réserve opérationnelle de la police nationale est subordonnée à la possession de l’aptitude physique requise pour exercer une activité dans la réserve, que le recrutement dans cette réserve est composée de trois phases de sélection distinctes dont le contrôle de l’aptitude physique, que ce contrôle afin d’apprécier le respect des conditions de santé exigées du policier réserviste est portée par un médecin du service médical statutaire de la police nationale au cours d'une visite médicale, et qu’en cas d’avis d’inaptitude médicale émis par ce médecin statutaire, qui communique par écrit au candidat la raison médicale de son inaptitude et qui peut être contesté auprès du médecin-chef de la police nationale, cet avis d’inaptitude fait obstacle à la poursuite de la procédure de recrutement, sans qu’une décision matériellement distincte ne soit prise. Ainsi, dans ce cas, l’avis rendu par le médecin du service médical statutaire de la police nationale et l’avis du médecin-chef, qui ne présentent pas le caractère d’actes préparatoire, font grief.

Voyez par analogie sur le caractère d’acte faisant grief pouvant être déféré au juge de l'excès de pouvoir de l’avis défavorable du conseil d'administration d'une université sur le recrutement d'un professeur par voie de mutation, qui fait obstacle, en vertu de l'article 9-2 du décret n° 84-431 du 6 juin 1984, à ce que le nom du candidat sélectionné soit communiqué au ministre chargé de l'enseignement supérieur : CE, 29 mai 2020, n° 424367, aux Tables du recueil Lebon.

En l’espèce, M. B. ayant été déclaré inapte par le médecin inspecteur zonal du SGAMI sud-est et son recours auprès du médecin-chef de la police nationale ayant été rejeté, il était, contrairement à ce qu’a jugé le tribunal, recevable à demander au tribunal l’annulation de ces avis, lesquels révélaient la décision de rejeter sa demande d’intégration dans la réserve opérationnelle de la police nationale.

C’est donc à tort que la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif a rejeté comme manifestement irrecevable la demande dont elle était saisie. Vous pourrez donc annuler son ordonnance du 17 janvier 2025.

Dans les circonstances de l’espèce, vous pourrez envoyer l’affaire devant le tribunal administratif de Lyon pour qu’il statue à nouveau sur la demande de M. B..

Par ces motifs, nous concluons à l’annulation de l’ordonnance attaquée n° 2410628 du 17 janvier 2025 de la présidente de la 7ème chambre du tribunal administratif de Lyon et au renvoi de l’affaire au tribunal administratif de Lyon

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