Le statut de l’occupant sans-titre du domaine public est invariable, que le contrevenant soit une personne morale de droit public ou une personne privée : en conséquence, l’État se doit, sans préjudice du déploiement éventuel de la police répressive, d’acquitter les redevances qu’un occupant régulier aurait dû régler au titre de sa période d’utilisation irrégulière.
L’État serait-il (occasionnellement) squatteur du domaine public local et (accessoirement) mauvais payeur ? Au regard du caractère – à notre connaissance – inédit du présent jugement, on aura quelque mal à valider l’idée mais les exceptions qui confirment la règle possèdent toujours une saveur (juridique) particulière, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand venant ici étendre à l’État – fautif – les règles traditionnelles applicables aux occupants sans titre et, entre autres, celles relatives à l’indemnité exigible compensant les loyers non-perçus lors de la période d’occupation irrégulière. De ce point de vue, la décision méritera donc une attention soutenue. D’une part, car le droit positif n’est pas avare « d’accommodements domaniaux » dans le cadre des relations patrimoniales « publiques-publiques », comme en témoigne notamment les conditions de circulation des biens entre patrimoines publics (régime des biens sans maître ; décentralisation patrimoniale ; cessions de biens faisant partie du domaine public ; aménagement au principe d’incessibilité à vil prix…). D’autre part car, parmi les personnes publiques, l’État jouit incontestablement de règles spécifiques et – schématiquement – plutôt favorables si on veut bien les comparer à d’autres, l’ensemble témoignant du maintien de sa propriété « éminente » (X. Bioy, La propriété éminente de l’Etat, RFDA, 2006, p. 963). Ainsi de la captation préférentielle ou exclusive de certains biens (domaine public maritime naturel, domaine public hertzien…) ; du monopole sur l’expropriation (Ch.-S. Marchiani, Le monopole de l’Etat sur l’expropriation : LGDJ, 2008) ; des poursuites en matière de répression quasi-pénale du domaine public (v. Ph. Yolka, Le couteau de Lichtenberg : remarques sur la protection pénale du domaine public : AJDA 2009, p. 2341 – S. Niquège, Propriété publique et droit pénal, in AFDA, La propriété publique, Dalloz, 2020, p. 251) ; des droits réels accordés par principe dans le cadre de l’utilisation privative (CGPPP, art. L. 2122-6) ; de la mise à disposition et des occupations domaniales gratuites (CGPPP, art. L. 2125-1) ; ou, encore, de la mobilisation du foncier local et des formes contractuelles complexes pour les besoins de son action…
C’est précisément aux confins de ces éléments que se love le contentieux dont avait à connaître le tribunal auvergnat, celui-ci venant par là-même tempérer le particularisme « étatique » des règles domaniales en promouvant une approche tout à la fois unitaire, homogène… et, à notre sens, salutaire et cohérente. En l’espèce, un bail emphytéotique administratif (CGCT, art. L. 1311-2 ; CGPPP, art. L. 2341-1) avait été conclu en 2008 (pour une durée de 40 ans) entre la commune d’Yssingeaux et une société foncière en vue de la construction d’une caserne de gendarmerie comprenant également des logements et locaux techniques (sur l’instrument, v. J.-B. Auby, Le bail emphytéotique sur le domaine public : CJEG, 1990, p. 67 ; G. Eckert, Bail emphytéotique administratif : JCl. Contrats et Marchés Publics, fasc. 610, 2017 ; Ch. Lavialle, L’article 13 de la loi du 5 janvier 1988 et l'évolution du droit de la domanialité publique : CJEG, 1988, p. 163 ; S. Plunian, La réception du bail emphytéotique administratif par le droit des contrats administratifs, in Contrats Publics. Mél. Michel Guibal, t. I : PU Montpellier, 2006, p. 719 ; J.-J. Bienvenu, L’esprit et les formes sur le bail emphytéotique : in Mélanges L. Richer, LGDJ, 2013, p. 493). L’opération prenait alors cadre dans une de ramifications les plus connus du BEA, le « BEA-sécurité », dont l’instrumentalisation fut prolongée à plusieurs reprises. L’on sait que la formule contractuelle, depuis l’adoption de l’article 101 de l’ordonnance du 23 juillet 2015, est en nette perte de vitesse, celle-ci ne pouvant (plus) avoir pour objet « l’exécution de travaux, la livraison de fournitures, la prestation de services ou la gestion d’une mission de service public, avec une contrepartie économique », faute de risquer la requalification en contrats de la commande publique (v. G. Clamour, Le sort des contrats domaniaux, in Les ordonnances marchés et concessions : RFDA 2016, p. 270 ; F. Llorens et P. Soller-Couteaux, Conventions domaniales : quel avenir pour les AOT et les BEA après l'ordonnance du 23 juillet 2015 ? : CMP 2016, repère 1). En bref, c’est dire que, depuis lors, un BEA doit prendre corps dans une opération d’intérêt général… mais en vue de satisfaire le seul titulaire du bail, ce qui complique nettement l’équation ; vraisemblablement, l’hypothèse ici commentée ne serait donc plus envisageable.
La parenthèse refermée, le BEA devait être assorti parallèlement d’une convention de mise à disposition (contre 558 000 € annuels) des ouvrages au profit de la municipalité laquelle, dans un second temps, en consentait la jouissance à l’État par convention (improprement dénommée « bail de sous-location de la caserne d’Yssingeaux »). Convention signée pour une durée de 9 ans et arrivant à échéance fin 2018, par laquelle l’État s’engageait à lui verser la même somme, la collectivité faisant, par là-même, une opération « blanche ». Cependant, à l’achèvement de cette convention, les négociations (sur le montant – à la hausse – du loyer) pour entériner son renouvellement allaient échouer, l’État décidant toutefois de se maintenir dans les locaux… sans acquitter la totalité des redevances afférentes. Pour parvenir au résultat déjà exposé (et parfaitement en phase avec les conclusions de la rapporteure publique), le tribunal clermontois devait donc braver trois difficultés à l’intensité toutefois diverse : en premier lieu, justifier de sa compétence, l’État invoquant – la mauvaise foi allant de pair… – la nature privée du titre d’occupation consenti (I) ; en deuxième lieu, le non-renouvellement de celui-ci acquis, caractériser l’utilisation sans titre du domaine public (II) ; en troisième lieu, en tirer les conséquences sur le plan indemnitaire, l’État devant, comme les autres, s’acquitter d’une indemnité venant compenser le montant des redevances qu’un occupant régulier aurait dû verser (III)
La compétence juridictionnelle déduite de la nature du titre
C’est par un raisonnement progressif et « à étages » que le tribunal est parvenu à écarter le premier moyen, tiré de l’incompétence de la juridiction administrative, au regard de la prétendue nature privée du titre d’occupation domaniale, support formel du litige en cause. Bien logiquement : le sous-contrat (sur le sujet, P. Blanquet, Le sous-contrat, Dalloz, NBT, 2022 – M.-G. Alhidja, Le sous- contrat en droit public : RFDA 2018, p. 915) prenait corps dans un bail emphytéotique administratif, les litiges afférents à ces derniers relevant expressis verbis de la compétence du juge administratif, ceci du reste, alors qu’ils seraient conclus sur le domaine privé (CGPPP, art. L. 2331-1, 5°). Certes, comme le relève la rapporteure publique, cette compétence se déduit d’une application parfois méconnue de la domanialité publique « virtuelle » ou « par anticipation » (v. en dernier lieu, F. Melleray, La domanialité publique virtuelle, RFDA, 2020, p. 921) : de fait, les biens édifiés par l’emphytéote ressortent – à l’instar de ceux construits par l’occupant privatif disposant d’un titre « sec » (CE, 27 avril 1997, n° 147602, Min. Budget c/ société Sagifa : Dr. adm. 1997, comm. 316, note Ch. Lavialle ; Dr. fisc. 1997, comm. 928, concl. J. Arrighi de Casanova ; RDI 1997, p. 418, chron. J.-B. Auby et Ch. Maugüé ; RFDA 1997, p. 935, note É. Fatôme et Ph. Terneyre ; GDDAB, Dalloz, 4e éd., 2022, n° 70, note C. Chamard-Heim) – de sa propriété (ou plus exactement de ses « prérogatives de propriétaires »), celle-ci n’étant pleinement transférée à la personne publique qu’à l’issue du bail (raison pour laquelle les liaisons entre BEA et maîtrise d’ouvrage public ont pu poser difficulté : CE, Section, 25 février 1994, Sofap-Marignan Immobilier, n° 144641 : RFDA, 1994, p. 510, concl. J. Arrighi de Casanova ; JCP N, 1994, II, p. 168, note Daval et Roussel ; D. 1994, p. 536, note M. Lombard ; CJEG 1994, p. 569, note É. Fatôme et Ph. Terneyre ; AJDA 1994, p. 550, note H. Périnet-Marquet). Il reste que ces derniers, un peu comme les « biens de retour » au sein des concessions, sont au gré d’une jurisprudence constante attraits ab initio au domaine public des collectivités, au moins lorsqu’ils sont affectés à l’exercice d’une mission de service public (comme il en va d’une caserne de gendarmerie : v. par analogie, CE, 7 mai 2012, SCP Mercadier et Krantz, n° 342107 : AJDA 2013, p. 1172, obs. N. Foulquier ; JCP A 2012, act. 327, obs. L. Erstein ; JCP A 2013, 2125, chron. C. Chamard-Heim ; RLCT juin 2012, p. 36, obs. E. Glaser).
Ce premier point acquis, il restait à entériner la nature administrative du sous-contrat tripartite liant l’emphytéote, la commune et l’État. On sait leur nature juridique fluctuante dès lors que, par une interprétation autrefois (sous l’empire de la loi du 28 Pluviôse an VIII) et encore aujourd’hui (sous l’empire de l’article L. 2331-1 CGPPP) discutable, voire contra legem, il est jugé que seuls les sous-titres domaniaux dont le « primo-occupant » est gestionnaire d’un service public revêtent un caractère administratif (TC, 14 mai 2012, n° 3836 ; RFDA, 2012, p. 692, note L. Janicot ; RDI 2012, p. 629 note N. Foulquier ; BJCP 2012, p. 382, concl. L. Olléon. Sur le sujet, B. Plessix, Les sous-concessions domaniales : territoire d’un contentieux, Mélanges L. Richer, Lextenso, 2013, p. 247 ; M. Ubaud-Bergeron, Les sous-concessions domaniales, in G. Clamour [dir.], Contrats et propriété publics, LexisNexis, Colloques & débats, 2011, p. 111 ; Ph. Yolka, Les sous-concessions domaniales. Cartographie d’un contentieux, JCP A 2007, n° 2017). Ici, une difficulté s’ajoutait, les parties ayant, par la dénomination conventionnelle choisie, laissé entendre la nature privée du titre domanial, en évoquant la présence d’un « bail de sous-location ». Certes, le juge administratif n’est nullement lié par la qualification retenue par les parties, le tribunal pouvant parfaitement s’en évader. Il reste (quoique nous approuvions la décision) à relever que ce dernier a peut-être coupé court à la difficulté, en s’abstenant d’entrer dans les lignes de fuite de la jurisprudence relative aux titres de sous-occupation domaniale, sauf à considérer que celle-ci, à raison de la présomption d’administrativité des contrats entre personne publiques (TC, 21 mars 1983, n° 2256, UAP : Leb. 537 ; AJDA, 1983, p. 356, concl. D. Labetoulle – sur la question v. S. Caudal (dir.), Trente ans après la jurisprudence UAP : dossier AJDA 2013, p. 834 et s.) doit être mise de côté dans de telles circonstances. Revenant à la – bonne – épure de l’article L. 2331-1 CGPPP et constatant que le titre portait quoi qu’il en soit utilisation du domaine public, il vient donc retenir sa nature administrative et, partant, sa compétence pour connaître du litige afférent.
La caractérisation de l’occupation sans-titre
La difficulté était sans doute moindre sur le second volet, le tribunal devant, pour arriver à ses fins, caractériser l’occupation sans-titre de l’État suite à l’échec des négociations autorisant la délivrance d’une nouvelle convention. Là encore, certaines équivoques pouvaient germer du titre lui-même lequel, dans une lecture constructive, pouvait laisser entendre le renouvellement « automatique » du titre (ou, du moins, le maintien légal de l’occupant), quand bien même les négociations à échéance n’aboutiraient point.
Le tribunal vient ici en rejeter la survenance. D’une part en énonçant que nul ne peut, sans titre, occuper le domaine public (CGPPP, art. L. 2122-1). D’autre part en rappelant que l’utilisation privative d’un bien du domaine public ne saurait résulter de la tolérance de l’Administration et revêtir un caractère tacite (CE, 21 mars 2003, SIPPEREC, n°189191 ; AJDA 2003, p. 1935, note Subra de Bieusses ; Ann. Voirie 2003, n° 73, p. 55, note Duval ; BJCL 2003, n° 6, p. 414, concl. S. Austry ; Collectivités-Intercommunalité 2003, comm. 145, note L. Erstein ; JCP A 2003, p. 666, obs. J. Moreau ; RFDA 2003, p. 903, note Soulié, CMP 2003, comm. 128, note G. Eckert ; GDDAB, op. cit., n° 54, note C. Chamard-Heim – sur la question, F. Grabias, La tolérance administrative, Dalloz, 2018). Le caractère nécessairement écrit de ce dernier s’y oppose (CE, Section, 19 juin 2015, n° 369558, SCI du Port de Boulogne, Leb. 207 : JCP A, 2015, n° 2243, note Ph. S. Hansen ; CMP, 2015, comm. 220, note G. Eckert ; AJDA, 2015, p. 1413, chron. J. Lessi et L. Dutheillet de Lamothe) ; quant à la circonstance que des redevances soient le cas échéant versées, elle est jugée indifférente, quand bien même, relevons-le, il aurait été sans doute possible – de manière facultative – d’accorder une gratuité d’usage à l’État dans ce cadre (CGPPP, art. L. 2125-1, 3° : « Par dérogation aux dispositions de l'alinéa précédent, l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du domaine public peut être délivrée gratuitement : (…) lorsque l'occupation ou l'utilisation contribue directement à assurer l'exercice des missions des services de l'Etat chargés de la paix, de la sécurité et de l'ordre).
Ce faisant, c’est logiquement que les juges du fond viennent retenir que le principe de précarité – autant que « l'affectation normale du domaine public » et les « impératifs de protection et de bonne gestion de ce domaine » – s’opposent à toute forme de renouvellement automatique (que la formulation de « bail » pouvait certes laisser entendre) : le maintien dans les lieux ne s’y assimile pas (CE, 17 décembre 1975, société Letourneur Frères, n° 91873 : RDP, 1976, p. 1083), nul n’y ayant « droit » par ailleurs (CE, 14 oct. 1991, n° 95857 : Leb. T. p. 927). Le fait qu’il résulte de l’instruction qu’aucune des parties n’avait – comme l’appelaient les stipulations contractuelles – manifesté (dans les six derniers mois avant échéance) son souhait de faire cesser les relations conventionnelles est jugé, là encore, sans incidence. C’est dire, en somme, mais le droit positif n’était pas serti de doutes, que les stipulations des parties (fussent-elles toutes des personnes publiques) ne peuvent, en tout état de cause, faire échec à l’application du régime domanial, d’ordre public.
Les conséquences indemnitaires de l’occupation irrégulière
Sans préjudice du déploiement de la police répressive du domaine public (en ce sens, CE, 13 février 2015, n° 366036, VNF ; AJDA 2015, p. 1701, note N. Foulquier ; CMP, 2015, comm. 99, note M. Ubaud-Bergeron ; Dr. adm., 2015, comm. 42, note G. Eveillard ; JCP A 2015, act. 182, obs. E. Langelier) – contraventions de grande voirie –, il est constant que « le gestionnaire d'une dépendance du domaine public est fondé à réclamer à un occupant sans titre, à raison de la période d'occupation irrégulière, une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période » (CE, 16 mai 2011, n° 317675, commune Moulins : RJEP, 2011, comm. 56, concl. C. Legras ; JCP A, 2011, p. 224, note Ph. Yolka ; AJDA, 2011, p. 995, note R. Grand ; Dr. adm., 2011, comm. 68, note F. Melleray ; AJCT, 2011, p. 527, note D. Dutrieux ; JCP A, 2012, n° 2170, chron. C. Chamard-Heim). Connu autrefois pour le seul domaine public de l’État, ce principe a fort heureusement (on le mesure ici) été transposé au domaine des collectivités territoriales et de leurs établissements publics. L’on précisera que la sujétion possède un caractère « indemnitaire » et ne s’assimile nullement à une sanction (CE, 15 févr. 2015, n° 366036, VNF, préc.), comme il en va du reste – ce qui est contestable – ailleurs, c’est-à-dire même lorsque la redevance fait l’objet d’une majoration (CAA Paris, 22 avr. 2020, n° 17PA03926 : CMP, 2020, comm. 209, note P. Soler-Couteaux ; JCP A, 2020, n° 2221, note Ch. Roux). La qualification autorise alors habilement à écarter tout à la fois le contrôle de proportionnalité du juge, son pouvoir de modulation, autant que l’emprise d’un certain nombre de principes (droits de la défense, principe d’individualité de la peine, principe du contradictoire. Sur ce point v. CE, 10 juin 2020, n° 433276, 429414 et 427155 : Dr. voir., 2020, n° 215, concl. C. Barrois de Sarrigny ; CMP, 2020, comm. 269, note P. Soler-Couteaux).
C’est donc ce principe indemnitaire que le tribunal administratif vient étendre à l’État sans-titre et, vraisemblablement, à l’ensemble des relations « publiques-publiques ». D’aucuns y verront une vision « propriétariste » renforcée au bénéfice des collectivités territoriales, laissant entendre que s’il existe un unique et éminent domaine public, il coexiste en revanche plusieurs caisses enregistreuses publiques, celles des collectivités ne se confondant pas avec celle de l’État. D’autres, plus prosaïques, relèveront que c’est la moindre des choses, surtout dans le cadre d’une opération contractuelle où le foncier local avait été mobilisé pour les besoins de l’État. Juridiquement, en tout état de cause, rien ne s’opposait à une telle solution, laquelle vient simplement tirer toutes les potentialités du droit de propriété reconnu aux collectivités. Elle agit, au fond, dans la continuité de solutions antérieures rendues dans le cadre de la police de la conservation, le juge administratif ayant déjà admis que des contraventions de grande voirie soient infligées à des personnes morales de droit public pour le compte desquelles l’infraction aurait été commise (CE, 22 janvier 2014, n° 352202, FNAUT JCP A 2014, n° 2251, note J.-F. Giacuzzo). Elle agit encore, plus largement, dans le respect du récent principe d’interdiction des locations publiques à vil prix (CE, 28 septembre 2021, n° 431625, CCAS de Pauillac : Contrats-Marchés publ. 2021, comm. 354, note P. Soler-Couteaux ; RDI 2021, p. 662, note N. Foulquier ; JCP A 2021, 2349, note C. Chamard-Heim ; Dr. adm. 2021, act. 157, obs. A. Courrèges ; Dr. adm. 2022, comm. 5, note G. Eveillard ; AJDA 2021, p. 2579, chron. E. Glaser ; Dr. voir. 2022, n° 224, p. 16, note Ch. Roux ; AJCT 2022, p. 54, obs. J.-D. Dreyfus) lequel, fondé sur la protection des deniers publics et la prohibition des libéralités, ne semble donc souffrir d’aucun tempérament de principe en faveur des personnes publiques locataires (comme il en va du reste, dans le contentieux des cessions entre personnes publiques où la qualité « publique » du cessionnaire est jugée indifférente : CE, 15 mai 2012, n° 351416, commune de Herliès ; RLCT, 2012, n° 2263, note Ph. Yolka).
Restait au tribunal à déterminer le montant de cette indemnisation laquelle, selon la jurisprudence, doit être calculée soit au regard d’un tarif déjà existant applicable au bien concerné, soit de la même manière qu’une redevance légalement établie, sa fixation devant alors tenir compte de tous les avantages procurés par l’occupation (CE, 1er juillet 2019, n° 421403, Ville de Paris c/ SAS Café Georges V ; Dr. voir., 2019, n° 209, p. 158, concl. R. Victor ; JCP A, 2019, n° 2289, note Ph. Hansen ; CMP, 2019, comm. 323, obs. P. Soler-Couteaux), conformément aux principes du CGPPP (article L. 2125-3). Mobilisant les stipulations du contrat de sous-location, le tribunal vient se ranger à la première alternative. Ce dernier prévoyait en effet un montant annuel de 558 000 euros annuel susceptible d’être réévalué par le biais d’une révision triennale (tenant compte de la valeur réactualisée établie par la Direction immobilière de l’État mais également des indices de la construction publiés par l’INSEE), laquelle, en dernier lieu, avait fait porter le loyer à 632 000 € annuel. C’est dire, en guise de paradoxe conclusif, que les stipulations d’un contrat… éteint (justifiant le déploiement du régime protecteur de l’occupation sans titre), continuent malgré tout de servir d’étalon pour déterminer la valeur de l’indemnisation…