Etranger – Certificat de résidence algérien – Santé – Résidence habituelle en France – Disponibilité et accès effectif au traitement – Irrégularité du jugement – Omission de statuer – Neutralisation de motifs – Accord franco-algérien – Article R313-22 du CESEDA – Pouvoir discrétionnaire – Mesure de régularisation
Les premiers juges qui rejettent les conclusions aux fins d’annulation d’une décision comportant deux motifs en répondant qu’un seul motif permet de justifier légalement la décision et sans examiner le moyen dirigé contre l’autre motif, entachent leur jugement d’une omission de statuer.
Par ailleurs, le préfet peut délivrer un certificat de résidence algérien à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l’ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. En effet, il dispose à cette fin d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l’ensemble des éléments de la situation personnelle de l’intéressé, l’opportunité d’une mesure de régularisation.
Mme K., ressortissante algérienne, est entrée en France en 2013 munie d’un visa de court séjour et a sollicité la délivrance d’un certificat de résidence algérien en raison de son état de santé. Pour rejeter sa demande, le préfet du Rhône s’est fondé sur le motif tiré de ce que le traitement suivi par l’intéressée était disponible en Algérie et de ce qu’elle y aurait effectivement accès, ce que contestait Mme K. devant le tribunal administratif de Lyon.
La Cour a estimé qu’en se bornant à constater que le préfet s’était également fondé sur le motif tiré de ce que Mme K. n’avait pas sa résidence habituelle en France et en estimant que ce seul motif était légalement suffisant pour fonder la décision attaquée, le tribunal administratif n’a pas examiné le moyen, qui n’était pas inopérant (1), tiré de l’erreur d’appréciation commise par le préfet sur la disponibilité du traitement et l’effectivité de son accès pour l’intéressée (2). En effet, il appartenait au tribunal administratif de vérifier si le motif tiré de la disponibilité du traitement et de l’effectivité de son accès pour l’intéressée avait légalement été opposé avant de procéder, le cas échéant, à la neutralisation de ce motif (3). Mme K. est donc fondée à soutenir que, ce faisant, le tribunal administratif a entaché son jugement d’irrégularité.
Au surplus, il appartenait non pas aux premiers juges de rechercher si le motif tiré de l’absence de résidence habituelle de l’intéressée était suffisant pour rejeter sa demande mais de rechercher s’il résultait de l’instruction que le préfet aurait pris la même décision s’il s’était fondé sur ce seul motif (4).
Par ailleurs, l’accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié régit de manière complète et exclusive les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, ainsi que la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. Ainsi, à la différence des dispositions procédurales que comporte l’article R313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui autorisent l’autorité administrative à délivrer une autorisation provisoire de séjour à un étranger malade n’ayant pas sa résidence habituelle en France, celles de son dernier alinéa ne sont pas applicables aux ressortissants algériens. Toutefois, le préfet peut faire usage de son pouvoir général de régularisation (5).
(1) Cf. CAA Lyon 5ème chambre, 28 avril 2016, N° 15LY04051, Préfet de la Loire c/ Mme D., C+.
(2) Cf. CE, Sect., 10 janvier 1958, Bourgin, p. 25 ; CE, Ass., 1er avril 1988, Mlle V., n° 55232, p. 135 ; CE, 28 janvier 1966, Bajon, p. 68.
Rappr. pour une substitution de motifs sans demande de l’administration CAA Lyon, 1ère chambre, 29 mars 2016, N° 15LY02368, M. Q. - Mme V., épouse Q., C+.
(3) Cf. CE, Ass., 12 janvier 1968, Dame Perrot, n° 70951, au Rec. p. 39. CE, 11 février 2015, Société Reims République Développement, n° 370089, aux Tables.
(4) Cf. CE, 30 juillet 2014, M. L., n° 361254.
(5) Cf. CE, 30 décembre 2002, Préfet de l’Hérault c/ M. B., n° 235972, aux Tables ; CE, Avis, 22 mars 2010, Mme S., n° 333679, au Rec
Comp. CE, 14 avril 1999, Ministre de l’intérieur c/ I. n° 153468, aux Tables ; CE, 15 décembre 2000, M. C., n° 220157, aux Tables ; CE, 5 décembre 2001, Préfet de Haute Garonne c/ Aissat, n° 222592, au Recueil, ou encore CE, 2 octobre 2002, Préfet des Yvelines c/ Mme X., n° 220013, aux Tables.
Comp. CAA Lyon 4ème chambre, 5 mars 2015, n° 14LY02347, M. H., C+ .