Le contribuable autorisé à agir pour le compte d’une section de commune n’a pas à supporter personnellement les frais d’expertise et les dépens

Lire les conclusions de :

Décision de justice

CAA Lyon, 3ème chambre – N° 13LY01337 – 09 juin 2015 – C+

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 13LY01337

Numéro Légifrance : CETATEXT000030742323

Date de la décision : 09 juin 2015

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

L.2411-8 du CGCT, L.761-1 du CJA, Section de commune, Autorisation à agir en justice, Partie à l’instance, Frais d’expertise, Dépens

Rubriques

Institutions et collectivités publiques, Procédure

Résumé

Selon l’article L2411-8 du code général des collectivités territoriales, « (…) Tout contribuable inscrit au rôle de la commune a le droit d’exercer, tant en demande qu’en défense, les actions qu’il croit appartenir à la section dans laquelle il est membre, dès lors qu’il ne dispose pas d’un intérêt à agir en son nom propre. (…) Si le contribuable a été autorisé à exercer l’action, la section est mise en cause et la décision qui intervient a effet à son égard (…) ».

Le contribuable d’une commune, qui a été autorisé par le préfet à agir en justice, devant les premiers juges, pour le compte d’une section de commune, n’a pas la qualité de partie à l’instance. Dès lors, les frais de l’expertise et les dépens de première instance visés par les dispositions des articles L761-1 et R761-1 du code de justice administrative ne peuvent, sauf dispositions législatives spécifiques, être mis à la charge personnelle du contribuable.

Conclusions du rapporteur public

Marc Clément

Rapporteur public à la cour administrative d'appel de Lyon

Autres ressources du même auteur

  • IDREF
  • ISNI
  • BNF

DOI : 10.35562/alyoda.6206

M. X. est ayant-droit de la section de commune de Courbières située sur la commune de Pradiers dans le Cantal. Il a obtenu du préfet le 27 novembre 2011 une autorisation d’ester au nom de la section de commune contre la commune. La section de commune soutenait devant le tribunal administratif que l’état spécial n’ayant pas été annexé au budget de la section par la commune entre 1985 et 2009, la commune avait commis une faute de nature à engager sa responsabilité. Sur cette base, la section de commune demandait une indemnisation devant le tribunal. Le tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté la requête par un jugement du 26 mars 2013. M. X. relève appel du jugement.

En vertu des dispositions de l’article L2411-8 du code général des collectivités territoriales, l’appel exercé au nom de la section de commune ne peut être recevable que si une nouvelle autorisation d’ester est accordée à M. X.. De ce fait, il ne fait pas de doute que vous devrez accueillir la fin de non-recevoir opposée par la commune s’agissant de la possibilité pour M. X. de représenter la section de commune en appel. Vous constaterez par ailleurs que dans son mémoire en réplique M. X. ne porte la discussion que sur le terrain de la condamnation personnelle qui résulte du jugement.

En effet, le tribunal administratif de Clermont-Ferrand après avoir rejeté les requêtes présentées pour la section de commune par M. X., a mis à sa charge les frais d’expertise soit 3 585, 13 euros et 1000 euros de frais irrépétibles.

Il nous semble que M. X. justifie d’un intérêt à agir contre cette partie du jugement dès lors qu’il est directement affecté. Les conclusions du jugement en ses articles 3 et 4 ne concernent plus la section de commune mais bien directement le requérant. La jurisprudence reconnait la qualité pour faire appel pour une personne non mise en cause en première instance mais à la charge de laquelle le jugement a mis une somme au titre des frais irrépétibles (CE, 18 février 1998, Université d’Auvergne c/ Mlle P., n° 162347 en l’espèce il s’agissait de l’Etat qui n’était pas une partie à l’instance) . Nous ne voyons pas comment le préfet pourrait accorder une autorisation d’agir au requérant pour son propre compte.

Le premier moyen porte sur la régularité du jugement. M. X. soutient que les conclusions du rapporteur public n’ont pas été communiquées avant l’audience qui s’est tenue le 13 mars 2013. La fiche Sagace contredit cette affirmation puisque les conclusions ont été mises en ligne le 12 mars 2013.

Il vous faut donc examiner si le tribunal pouvait mettre à la charge du requérant les frais d’instance en lieu et place de la section de commune. Rappelons que M. X. en tant que personne n’était pas partie à l’instance puisqu’il agissait seulement comme représentant de la section de commune. Le principe d’une condamnation aux frais d’instance des seules parties à l’instance nous semble acquis (voir par exemple CE 11 décembre 1991 Mme R. et X. n° 104923 pour l’impossibilité de condamner une commune délivrant une autorisation au nom de l’Etat, l’Etat seul étant en cause) .

Cependant, la question est un peu particulière dans le contexte de la représentation de communes par un contribuable. En effet, l’article 123 de la loi municipale du 5 avril 1884 a repris le régime commun pour les autorisations de plaider au nom de la commune et de la section de commune tel qu’il était issu de l’article 49 de la loi de 1837. Rémi Kessler fait remonter cette procédure d’autorisation à un édit royal du 12 avril 1683 (conclusions sous l’arrêt CE 22 juillet 1992 Commune de Neuilly s/ Seine n° 137344) . Ces actions se font aux frais et risques du contribuable. Nous retrouvons ces mêmes dispositions à l’article L2132-5 du code général des collectivités territoriales créé par la loi du 24 février 1996 et reprenant l’article L. 316-5 du code des communes.

Simplement dans ces textes, la mention des sections de communes présente dans la loi de 1884 a disparu et il n’est pas mentionné à l’article L2411-8 du code général des collectivités territoriales que l’action se fait aux frais et risques du représentant de la section de commune. Cette situation semble issue de l’intervention de la loi 85-30 du 9 janvier 1985, loi relative à la montagne qui a modifié le régime de gestion des sections de communes.

Certes, on peut dans un souci de cohérence essayer de rattacher au régime des autorisations d’ester pour la commune le régime des sections de communes. Mais il nous semble que le principe général étant celui de ne pas condamner une partie non présente à l’instance, ce n’est que dans la mesure où un texte de loi explicitement déroge au principe que vous pourriez mettre à la charge du requérant les frais d’expertise et les frais irrépétibles.

De ce fait, il vous faudra donc statuer sur les frais d’expertises qui ne pourront qu’être mis à la charge de la section de commune, partie perdante en vertu des dispositions de l’article R761-1 du code de justice administrative en absence de circonstance particulières (CE 20 avril 2005 M. et Mme C. n° 257580) . Pour ce qui concerne la demande de frais irrépétibles, ceux-ci en première instance n’étaient demandés par la commune qu’à l’égard de M. X., vous écarterez donc cette demande.

Par ces motifs, nous concluons à l’annulation des articles 3 et 4 du jugement attaqué et à la condamnation de la section de commune à s’acquitter des frais d’expertise.

Droits d'auteur

Ces conclusions ne sont pas libres de droits. Leur citation et leur exploitation commerciale éventuelles doivent respecter les règles fixées par le code de la propriété intellectuelle. Par ailleurs, toute rediffusion, commerciale ou non, est subordonnée à l’accord du rapporteur public qui en est l’auteur.