Etrangers : articulation des procédures d’OQTF et de remise à un autre Etat membre de l’UE

Décision de justice

CAA Lyon, 2ème chambre – N° 12LY02452 – 29 août 2013 – C+

Juridiction : CAA Lyon

Numéro de la décision : 12LY02452

Numéro Légifrance : CETATEXT000031857822

Date de la décision : 29 août 2013

Code de publication : C+

Index

Rubriques

Etrangers

Résumé

DECISION CE :

Asile - Demande d’admission à l’asile - Détermination de l’Etat responsable de l’examen - Procédure de réadmission - Procédure exclusive de la procédure d'OQTF - Existence.

Les stipulations de l'article 31-2 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés et les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile impliquent nécessairement que l'étranger qui sollicite la reconnaissance de la qualité de réfugié soit autorisé à demeurer provisoirement sur le territoire jusqu'à ce qu'il ait été statué sur sa demande. Dès lors, lorsqu'en application des stipulations des conventions internationales conclues avec les Etats membres de l'Union européenne, l'examen de la demande d'asile d'un étranger ne relève pas de la compétence des autorités françaises mais de celles de l'un de ces Etats, la situation du demandeur d'asile n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais dans celui des dispositions du premier alinéa de l'article L. 531-2 du même code. En vertu de ces dispositions, la mesure d'éloignement en vue de remettre l'intéressé aux autorités étrangères compétentes pour l'examen de sa demande d'asile ne peut être qu'une décision de réadmission prise sur le fondement de l'article L. 531-1, et non une obligation de quitter le territoire français (OQTF) prise sur le fondement de l'article L. 511-1.

Communautés européennes et Union européenne - Circulation et séjour des ressortissants de pays tiers à l’intérieur de l’Union.

Procédure de remise aux Etats membres de l'Union européenne (UE) ou parties à la convention de Schengen (art. L. 531-1 et suivants du même code) - Articulation avec la procédure d'OQTF (art. L. 511-1 et suivants du CESEDA) - 1) Principe - Procédures exclusives l'une de l'autre - Absence - Choix laissé à l'administration entre les deux procédures - Existence - Possibilité de mise en œuvre cumulative - Existence - 2) Cas particuliers - a) Cas des étrangers demandant à être éloignés vers l'Etat membre de l'UE ou de l'espace Schengen dont ils proviennent, des résidents de longue durée dans un Etat membre ou des titulaires d'une "carte bleue européenne" dans un tel Etat - Obligation pour le préfet d'examiner en priorité la possibilité d'une reconduite ou d'une réadmission dans cet Etat - Existence - b) Cas des demandeurs d'asile - Caractère exclusif de la procédure de réadmission - Existence.

1) Il ressort des dispositions des articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), relatives à l'OQTF, et des articles L. 531-1 et suivants du même code, relatives aux procédures de remise aux Etats membres de l'Union européenne (UE) ou parties à la convention d'application de l'accord de Schengen, que le champ d'application des mesures obligeant un étranger à quitter le territoire français et celui des mesures de remise d'un étranger à un autre Etat ne sont pas exclusifs l'un de l'autre et que le législateur n'a pas donné à l'une de ces procédures un caractère prioritaire par rapport à l'autre.

Il s'ensuit que, lorsque l'autorité administrative envisage une mesure d'éloignement à l'encontre d'un étranger dont la situation entre dans le champ d'application de l'article L. 531-1 ou des deuxième à quatrième alinéas de l'article L. 531-2, elle peut légalement soit le remettre aux autorités compétentes de l'Etat membre de l'UE ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, sur le fondement des articles L. 531-1 et suivants, soit l'obliger à quitter le territoire français sur le fondement de l'article L. 511-1. Ces dispositions ne font pas non plus obstacle à ce que l'administration engage l'une de ces procédures alors qu'elle avait préalablement engagée l'autre.

2) a) Toutefois, si l'étranger demande à être éloigné vers l'Etat membre de l'UE ou partie à la convention d'application de l'accord de Schengen d'où il provient, ou s'il est résident de longue durée dans un Etat membre ou titulaire d'une "carte bleue européenne" délivrée par un tel Etat, il appartient au préfet d'examiner s'il y a lieu de reconduire en priorité l'étranger vers cet Etat ou de le réadmettre dans cet Etat.

b) Il y a lieu, enfin, de réserver le cas de l'étranger demandeur d'asile, dont la situation n'entre pas dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 511 1 du CESEDA, mais dans celui des dispositions du premier alinéa de l'article L. 531-2 du même code. En vertu de ces dispositions, la mesure d'éloignement en vue de remettre l'intéressé aux autorités étrangères compétentes pour l'examen de sa demande d'asile ne peut être qu'une décision de réadmission prise sur le fondement de l'article L. 531-1.

ARRET CAA Lyon

La Cour saisit le Conseil d'Etat d'une demande d'avis sur les questions de savoir si la faculté pour le préfet de recourir à la procédure de remise prévue par l'article L. 531-1 du CESEDA, lorsqu'il constate qu'un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'UE est entré irrégulièrement sur le territoire français en provenance directe d'un Etat membre, est ou non exclusive de la possibilité dont dispose cette même autorité de prononcer à l'encontre de l'étranger qui ne peut justifier être entré régulièrement en France une obligation de quitter le territoire français en application des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

A – Les décisions d'éloignement d'un étranger prévues par les dispositions précitées constituent-elles des catégories de décisions distinctes ou une même catégorie de décisions mais susceptibles d'être fondées sur des bases légales différentes ?

B – Les champs d'application de ces catégories distinctes de décisions ou de ces différents fondements légaux sont-ils exclusifs les uns des autres ?

C – Si les champs d'application des dispositions précitées ne sont pas exclusifs les uns des autres, existe-t-il une hiérarchie entre ces dispositions ou peuvent-elles être mises en œuvre concurremment ?

D - S'il n'existe pas de hiérarchie entre les dispositions précitées et, dans le cas où le préfet engage une de telles procédures d'éloignement, est-il tenu de la mener à son terme avant d'en engager une autre ?

E - Dans le cas où les dispositions précitées devraient être regardées comme concurrentes et non hiérarchisées, les différences de catégories ou de fondements légaux influent-elles sur la décision d'éloignement ou seulement sur le choix des pays à destination desquels l'étranger peut être reconduit ?

F - Dans le cas où les dispositions précitées devraient être regardées comme concurrentes et non hiérarchisées, y a-t-il lieu de réserver le cas de l'étranger dont la demande de reconnaissance de la qualité de réfugié est en cours d'examen dans un autre Etat ?

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