M.X., avoir été initialement recruté par contrat, était titulaire du grade d’analyste programmeur relevant d’un statut propre créé par délibération du conseil d’administration des Hospices civils de Lyon par délibération du conseil d'administration du 24 juin 1988 sur le fondement de l'article 8 de la loi n° 086-33 du 9 janvier 1986 dans sa rédaction alors applicable.
Or, cet emploi a été constitué en cadre d’extinction en vertu des dispositions de l’article 49 de la loi n° 02007-148 du 2 février 2007.
M.X. a sollicité du directeur général des Hospices civils de Lyon un détachement dans le corps des techniciens supérieurs hospitaliers, par courrier du 17 mars 2008, sur le fondement de l'article 51 de la loi n° 086-33 du 9 janvier 1986, mais cette autorité a refusé de faire droit à une telle demande par une décision du 7 mai 2008.
Par un jugement n° 01509909 du 11 juillet 2018, le tribunal administratif de Lyon, sur demande de M. X. tendant notamment, d’une part, à l’annulation de la décision du 7 mai 2008 et à ce qu’il soit enjoint au directeur général des Hospices civils de Lyon, à titre principal, de faire droit à sa demande, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, et ce dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 300 euros par jour de retard, a en particulier, annulé cette décision du 7 mai 2008 (article 2) et enjoint au directeur général des Hospices civils de Lyon de réexaminer la demande de l’intéressé (article 3) .
I- Comme vous l’avez indiqué M. le Président, les Hospices civils de Lyon présentent, tout d’abord, des conclusions aux fins d’annulation dirigées tant contre les articles 2 et 3 du jugement n° 01509909 du 11 juillet 2018 que tendant au rejet de la demande de première instance de M. X. dans cette mesure.
S’agissant des questions préalables, nous n’avons pas noté de problèmes particuliers dans cette affaire.
Concernant la régularité du jugement attaqué, l’appelant ne l’a pas critiquée et nous n’avons pas observé de questions à relever d’office.
Venons-en donc maintenant au fond.
S’agissant des conclusions aux fins d’annulation.
Les Hospices civils de Lyon nous paraissent présenter un moyen unique à l’encontre du jugement attaqué tiré de ce que c’est à tort que les premiers juges n’ont pas rejeté les conclusions de la requête de M. X. tendant à l’annulation de la décision du 7 mai 2008 pour irrecevabilité, au regard du principe de sécurité juridique tel que rappelé par le Conseil d’Etat dans son arrêt du 13 juillet 2016 (CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 0387763), dès lors que cette décision, si elle ne comportait pas la mention des voies et délais de recours, a été cependant notifiée à l’intéressé par lettre recommandée avec accusé de réception, et doit donc être appréciée comme lui ayant été nécessairement notifiée, sans qu’il ne le conteste ni n’invoque une circonstance particulière, les premiers juges ne pouvant lui opposer la charge de la preuve de la date de notification, compte tenu des dispositions de l'article 2224 du code civil, cette preuve étant à l’heure actuelle impossible.
Vous devrez ici vous référer aux dispositions de l’article R. 421-1 du code de justice administrative que vous connaissez bien, dans leur rédaction applicable, selon lesquelles : « Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. / (…) . ». Vous devrez également vous référer aux dispositions de l’article R. 421-5 du même du code, qui précisent que : « Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu’à la condition d’avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision. ».
Comme vous le savez, selon la jurisprudence du Conseil d’Etat dans son arrêt du 13 juillet 2016 (CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 0387763, publié au recueil. Voir également les conclusions de M. Henrard), la Haute juridiction a, s’agissant des dispositions de l’article R. 421-5 du code de justice administrative, estimé que « Il résulte de ces dispositions que cette notification doit, s’agissant des voies de recours, mentionner, le cas échéant, l’existence d’un recours administratif préalable obligatoire ainsi que l’autorité devant laquelle il doit être porté ou, dans l’hypothèse d’un recours contentieux direct, indiquer si celui-ci doit être formé auprès de la juridiction administrative de droit commun ou devant une juridiction spécialisée et, dans ce dernier cas, préciser laquelle. », et que, s’agissant des dispositions de l’article R. 421-1 du même code, compte tenu des dispositions précédentes, « que lorsque la notification ne comporte pas les mentions requises, ce délai n’est pas opposable ; ». Mais, le Conseil d’Etat a dégagé une règle nouvelle selon laquelle « toutefois que le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance ; qu’en une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d’un délai raisonnable ; qu’en règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l’exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu’il en a eu connaissance ; », le Conseil d’Etat précisant que « la règle énoncée ci-dessus, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d’un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs ; qu’il appartient dès lors au juge administratif d’en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance ; ». De plus, comme vous le savez également, le Conseil d’Etat avait auparavant été amené à combiner la théorie de la connaissance acquise, notion ancienne développée par la jurisprudence, avec les règles plus récentes désormais prévues aux dispositions de l’article R. 421-5 du code de justice administrative que nous avons évoquées en estimant que « si la formation d'un recours administratif contre une décision établit que l'auteur de ce recours administratif a eu connaissance de la décision qu'il a contestée au plus tard à la date à laquelle il a formé ce recours, une telle circonstance est par elle-même sans incidence sur l'application des dispositions de l'article R. 104 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, selon lesquelles : "Les délais de recours contentieux contre une décision déférée au tribunal ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision." ; » (Voir CE Sect. du 13 mars 1998 n° 0120079, publié au recueil. Voir également les conclusions du Président Combrexelle) .
Notons, dans un premier temps, que si les Hospices civils de Lyon invoquent, à l’appui de leur moyen visant à contester l’analyse des premiers juges sur la recevabilité de la requête de M. X., les dispositions de l’article 2224du code civil, ils ne sauraient utilement le faire à notre sens, ces dispositions, qui sont relatives à la notion de prescription, laquelle est une question de fond qui diffère de celle de la recevabilité des recours, étant ainsi étrangères aux règles spécifiques déterminant la recevabilité des recours, et notamment le recours pour excès de pouvoir, qui sont prévues par le code de justice administrative et en particulier les dispositions que nous venons de rappeler.
Dans un second temps, vous devrez ici, nous le croyons, combiner les différents principes textuels et jurisprudentiels, pour examiner le moyen soulevé par les Hospices civils de Lyon.
A notre sens, vous pourriez estimer, que dans une hypothèse où vous ne bénéficiez pas au dossier qui vous est soumis d’éléments qui établiraient une date de notification de la décision qui est contestée, cette décision ne comportant pas la mention régulière des voies et délais de recours, ce qui ne vous permettrait notamment pas d’apprécier le caractère raisonnable du délai dans lequel vous êtes saisis, pour l’application des principes dégagés par la jurisprudence du Conseil d’Etat (CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 0387763) que nous avons rappelée, vous ne pouvez pas vous borner à prendre en compte le temps qui s’est écoulé, puisque comme nous l’avons mentionné, la question du délai de recours est distincte de celle de la prescription, qui sont des notions de nature différente et ayant un objet distinct, et il vous incombe alors de vous prononcer au regard de tous les éléments qui vous sont apportés par les parties ou que vous pouvez régulièrement recueillir dans le cadre de l’instruction de l’affaire en cause, pour pouvoir déterminer le moment où l'intéressé a acquis une connaissance suffisante du contenu de la décision contestée pour lui permettre d’engager un recours contre cet acte, laquelle constitue alors le point de départ du délai de recours ouvert à l’encontre de cette décision.
Ainsi, appliquant une telle analyse en l’espèce, vous pourrez relever que s’il ressort de la décision du 7 mai 2008 contestée par M. X., produite par ce dernier à l’appui de ses écritures de première instance, sa requête ayant été enregistrée le 18 novembre 2015, et qu’elle indique expressément la mention « Recommandé A.R. », elle lui a cependant été envoyée à une adresse différente de son domicile tel que mentionné par lui sur sa requête.
M. X. n’indique pas, de quelque manière que ce soit, comment il se serait procuré cette décision.
Or, les Hospices civils de Lyon, alors qu’ils pourraient éventuellement être en mesure de le faire, n’apportent aucun élément susceptible de déterminer la date à laquelle M. X. pourrait être réputé comme ayant eu connaissance de cette décision, et ne peuvent pas, en tout état de cause, se limiter à invoquer la circonstance qu’intervenue le 7 mai 2008, la décision concernée aurait été nécessairement reçue par l’intéressé durant l’année 2008.
Dans de telles conditions, et bien que M. X. n’a formé un recours contentieux contre cette décision du 7 mai 2008 devant le tribunal administratif de Lyon que le 18 novembre 2015, il ne nous paraît pas que vous puissiez, faute d’être en mesure de déterminer un point de départ du délai raisonnable de recours pour l’application des principes dégagés par la jurisprudence du Conseil d’Etat CE, Ass., 13 juillet 2016, n° 0387763) que nous avons rappelés, soit, comme nous l’avons dit, le moment où l'intéressé aurait acquis une connaissance suffisante du contenu de cette décision pour lui permettre d’engager un recours contre cet acte, estimer que les conclusions de la requête de M. X. tendant à son annulation introduite devant le tribunal administratif de Lyon étaient irrecevables pour tardiveté.
Nous vous invitons donc à écarter ce moyen.
C’est pourquoi, si vous nous suivez, vous rejetterez au fond les conclusions aux fins d’annulation présentées par les Hospices civils de Lyon.
II- S’agissant des conclusions tendant à l’application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par les Hospices civils de Lyon, si vous nous suiviez, vous ne pourriez, en application même de ces dispositions, que les rejeter.
S’agissant des conclusions présentées au même titre par M. X., même si vous nous suiviez, il nous semble que vous pourriez estimer qu’en l’espèce, il n’y a pas lieu d’y faire droit.
C’est pourquoi, au regard de l’ensemble des circonstances dans lesquelles nous sommes amenés à conclure, nous concluons au rejet au fond des conclusions présentées par les Hospices civils de Lyon et au rejet au fond des conclusions présentées par M.X. au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.