Travail dissimulé : critères établissant l’existence d’un lien de subordination

Décision de justice

TA Lyon – N° 1803116 – 20 novembre 2018 – C+

Jugement annulé en appel en tant que... : voir CAA, N° 19LY00254 - 1er octobre 2020
Pourvoi en cassation non admis: CE ordonnance du 7 mai 2021 - N° 447019

Juridiction : TA Lyon

Numéro de la décision : 1803116

Date de la décision : 20 novembre 2018

Code de publication : C+

Index

Mots-clés

Travail dissimulé, Fermeture d’établissement, Lien de subordination, Moniteurs d’auto-école, L.8211-1 du code du travail, L. 8272-2 du code du travail. 

Rubriques

Droits sociaux et travail, Police administrative

Résumé

La présomption de non-salariat prévue par les dispositions du I de l’article L. 8221-6 du code du travail bénéficiant aux personnes inscrites sous un statut d’indépendant peut être renversée par la preuve de l’existence d’un lien de subordination juridique permanente entre ces personnes et le donneur d’ordre, lequel se manifeste par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné, le contrat de travail ne dépendant ni de la volonté exprimée par les parties, ni de la dénomination de leur convention, mais des conditions dans lesquelles la prestation de travail est ainsi fournie.1

La société R&L exerce une activité dans le domaine de la formation à la conduite des véhicules à moteur sous l’enseigne « Le permis libre ». À ce titre, elle exploite un établissement bénéficiant de l’agrément pour l’enseignement de la conduite des véhicules à moteur et de la sécurité routière. Dans le cadre de cette activité, cette société exploite en outre une plateforme numérique se présentant comme mettant en relation, d’une part, des personnes souhaitant passer le permis de conduire et, d’autre part, des moniteurs d’auto-école.

Les moniteurs d’auto-école, titulaires d’une autorisation d’enseigner et qui ne peuvent enseigner que dans le cadre d'un établissement dont l'exploitation est subordonnée à un agrément délivré par l'autorité administrative, étaient liés contractuellement avec la société R&L par les stipulations des conditions générales d’utilisation du site internet applicables aux enseignants à la conduite s’inscrivant sur la plateforme « Le permis libre » et acceptées par ceux-ci. Ils exerçaient sous un statut d’indépendant et bénéficiaient ainsi de la présomption de non-salariat prévue par les dispositions du I de l’article L. 8221-6 du code du travail.

Compte tenu des conditions d’exercice de leur activité par ces moniteurs d’auto-école dans le cadre de la plateforme numérique « Le permis libre » et notamment des modalités de tarification et de facturation décidées unilatéralement par la société R&L, du recours, par la société, à des stipulations pour autrui engageant les moniteurs à l’égard des élèves, des outils de contrôle et de surveillance des moniteurs mis en place et des sanctions pouvant être prononcées par la société R&L à l’encontre de ceux-ci, il existait un lien de subordination juridique permanente entre les moniteurs d’auto‑école dispensant des heures de conduite par l’intermédiaire de cette plateforme et la société R&L, exploitante de la plateforme, traduisant en l’espèce une relation de salariat.

66, Travail et emploi, Travail dissimulé, Fermeture administrative d’établissement, Article L. 8272-1 du code du travail , dissimulation d’emploi salarié, Lien de subordination juridique permanente entre des enseignants de conduite de véhicules à moteur inscrits sous le statut d’indépendant et une société titulaire d’un agrément pour l’enseignement de la conduite à titre onéreux exploitant une plateforme numérique d’auto-école en ligne et se présentant comme mettant en relation ces enseignants avec des candidats au permis de conduire : existence.

Notes

1 Cf. CE, juge des référés, 11 novembre 2014, société Ideac, n° 385569, inédit Rappr. Cass. soc. 13 novembre 1996, n° 94-13.187 Bull. 1996, V, n° 386 ; Cass. soc. 20 octobre 2015, n° 14-16.179 ; Cass. soc. 26 septembre 2018, n° 17-15.448 ; Postérieurement au jugement : Cass. soc. 28 novembre 2018, n° 17-20.079 pour la plateforme numérique Take Eat Easy. Retour au texte

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