Saisie d’une demande en vue de l’engagement de la responsabilité quasi-délictuelle d’une partie à un contrat administratif à raison d’un manquement à ses obligations par un tiers à ce contrat, la cour administrative d’appel de Lyon rappelle opportunément que le périmètre du recours Tarn-et-Garonne ne saurait excéder la question de la validité du contrat. Elle confirme également l’approche restrictive du principe de l’effet relatif prônée par le Conseil d’État, alimentant ainsi le débat sur la pertinence du maintien de la solution selon laquelle un tiers à un contrat administratif ne peut invoquer un manquement contractuel à l’appui d’un recours en responsabilité quasi-délictuelle, alors que la Cour de cassation a récemment réaffirmé une solution inverse.
À la question de savoir quel est le plus relatif des principes du droit contractuel, on est tenté de répondre : le principe de l’effet relatif (v. J.-L. Aubert, « À propos d’une distinction renouvelée des parties et des tiers », RTD civ., 1993, p. 263). Passé le calembour, l’affirmation se vérifie avec d’autant plus d’acuité si l’on considère la jurisprudence - relativement - récente. Cette relativité est d’abord générale si l’on compare les jurisprudences de la Cour de cassation et du Conseil d’État. La première admet depuis un arrêt société Myr’Ho de 2006 que « le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un dommage » (Cass. plén., 6 octobre 2006, société Myr’Ho, n°05-13.255), une solution qui, bien que contestée (v. par ex. J.-S. Borghetti, « Responsabilité des contractants à l’égard des tiers : Boot shop en bout de course ?, RDC, 2017, p. 425), n’en a pas moins été réaffirmée récemment par le Quai de l’Horloge (Cass. plén., 13 janvier 2020, n°17-19.963, société QBE Insurance Europe Limited). Dans l’intervalle de temps entre ces deux arrêts, le Conseil d’État manifestait avec force son attachement à une conception rigide, sinon « brute » (J. Bousquet, « L’effet relatif des contrats administratifs. À propos de décisions récentes », RFDA, 2020, p. 443), de l’effet relatif en déniant au tiers à un contrat administratif la possibilité d’invoquer une faute contractuelle à l’occasion d’un recours en responsabilité quasi-délictuelle à l’encontre de l’un des contractants, demeurant ainsi aveugle à Myr’Ho (CE, Section, 11 juillet 2011, n°339409). Une relativité, ensuite, restreinte, si l’on ne considère que la jurisprudence administrative, puisque dans une décision du 11 octobre 2021, le Conseil d’État a rendu possible l’invocation d’une faute contractuelle à l’occasion d’un recours en responsabilité quasi-délictuelle intenté par un tiers à l’encontre d’un contractant, selon un champ cependant réduit aux participants à une même opération de travaux publics (CE, 11 octobre 2021, n°438872, société CMEG). Un effet relatif… relatif au sein même de la jurisprudence administrative, donc.
Malgré tout, cette décision CMEG a pu paraître comme « l’élément déclencheur d’une petite révolution » (J. Bousquet, « L’évolution contenue de la relativité contractuelle », AJDA, 2022, p. 642), l’étincelle qui pourrait embrasser la conception canonique de l’effet relatif des contrats que porte la jurisprudence administrative. Un litige consécutif à l’incendie d’un village de vacances plus tard nous confirme que ce n’est pas dans ce sens que s’oriente la jurisprudence lyonnaise, jouant ici davantage le rôle du pompier fixant le feu aux limites établies par le Conseil d’État. Le feu des faits est plus prosaïque, quoique plus ravageur. Il toucha, le 16 juin 2013, le bâtiment principal d’un village de vacances de Saint-Jorioz, exploité par l’association Ternélia entre Lac et Montagnes aux termes d’une convention du 19 novembre 2010 conclue pour 25 ans entre ladite association et la communauté de communes de la rive gauche du lac d’Annecy, portant sur la restructuration et la gestion du village, assortie d’un bail emphytéotique administratif sur certaines dépendances du village. Le contentieux se noua autour de ce que le bâtiment détruit, propriété de l’intercommunalité, était assuré à ce titre par la compagnie Groupama Rhône-Alpes Auvergne, mais aussi par la SMACL, assureur de l’association. C’est d’ailleurs cette dernière qui, conformément à un protocole transactionnel du 4 décembre 2014, indemnisa l’association à hauteur de 4 350 000 euros non sans avoir tenté préalablement et en vain d’obtenir un partage de cette charge avec l’assureur de la communauté de communes, dans ce que la presse locale qualifiait en 2016 de « guerre des assurances » (France 3 Auvergne-Rhône Alpes, « Le village de vacances Ternélia à Saint-Jorioz attend toujours d’être indemnisé par les assurances », 2 fév. 2016). Un conflit larvé que la SMACL décidait finalement d’exporter devant le prétoire du juge administratif, lui réclamant de condamner sur le terrain quasi-délictuel la Groupama à lui verser la somme de 2 683 345 euros en application du contrat administratif liant cette compagnie à la communauté de communes. Sans succès devant le tribunal administratif de Grenoble (TA Grenoble, 21 janv. 2020, n°1604938, SMACL), pas plus devant la cour administrative d’appel de Lyon dans l’arrêt ici commenté, les deux décisions estimant la requête dénuée de fondement.
Si l’on excepte les fondements subsidiaires avancés par la SMACL, tirés du code des assurances et manifestement inapplicables à l’espèce, l’assureur justifiait sa requête sur une interprétation particulièrement extensive de la jurisprudence Tarn-et-Garonne (CE, Assemblée, 4 avril 2014, n°358994, département de Tarn-et-Garonne) aux termes de laquelle : « indépendamment des actions contre les clauses réglementaires d’un contrat, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction » (ces écritures sont citées par M. Savouré dans ses conclusions, que nous remercions pour leur aimable communication). Une telle interprétation permettrait, selon la SMACL, d’ouvrir la possibilité pour un tiers à un contrat administratif non seulement de contester la validité du contrat, mais encore d’invoquer une faute contractuelle à l’appui d’un recours en responsabilité quasi-délictuelle. Sans doute émue par un argumentaire aussi hardi qu’audacieux, la cour administrative d’appel de Lyon rejeta le recours. Rappelant d’abord l’évidence : que le recours Tarn-et-Garonne est seulement un recours en contestation de la validité du contrat administratif qui ne saurait concerner la phase d’exécution (I). Ne s’engouffrant pas ensuite dans la brèche ouverte par la jurisprudence CMEG et maintenant un regard borgne sur Myr’Ho (II).
I – Le regard clairvoyant : en Tarn-et-Garonne, tant de frontières
En estimant, suivant ainsi la position retenue par le tribunal administratif de Grenoble, que « si les tiers à un contrat administratif sont susceptibles de former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction, ce recours, ouvert aux tiers susceptibles d’être lésés dans leurs intérêts de façon suffisamment directe et certaine par la passation du contrat ou de ses clauses, n’a pas pour objet, comme le demande la SMACL, d’engager la responsabilité quasi-délictuelle d’une partie à ce contrat, mais de contester la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non-réglementaires qui en sont divisibles », la cour administrative d’appel de Lyon ne fait que rappeler la portée de la jurisprudence Tarn-et-Garonne. Il n’y a là rien de bien nouveau. Mais si l’on incurve quelque peu le regard porté sur cet arrêt, il a le mérite de rappeler le champ d’application du recours Tarn-et-Garonne, oublié par la SMACL dans ses écritures, peut-être du fait de son évidence, ou du discours doctrinal sur ce recours qui n’aborde que rarement la question de son champ d’application, se contentant le plus souvent à la question des conditions de recevabilité ou de l’office du juge. De ce point de vue, au moins deux éléments peuvent être sources de confusion et faire occulter le fait que le recours Tarn-et-Garonne n’est qu’un recours en contestation de la validité du contrat administratif ne permettant pas d’engager la responsabilité quasi-délictuelle d’un cocontractant à raison de manquements dans l’exécution d’un tel contrat.
Le premier élément consiste à présenter le recours Tarn-et-Garonne comme une atténuation du principe de l’effet relatif des contrats. Ceci ressort explicitement des conclusions du commissaire du gouvernement D. Casas sur l’arrêt Tropic, le commissaire du gouvernement estimant que l’ouverture d’un recours devant le juge du contrat pour les concurrents évincés, qu’il propose, serait « sensible au regard des conséquences qui s’attachent normalement au principe de l’effet relatif des contrats » (D. Casas, « Un nouveau recours de pleine juridiction contre les contrats administratifs », RFDA, 2007, p. 696). De façon semblable, B. Dacosta, dans ses conclusions sur Tarn-et-Garonne, justifie l’ouverture généralisée du recours à l’ensemble des tiers par la nécessité de ne pas « s’en tenir à la théorie de l’effet relatif » (B. Dacosta, « De Martin à Bonhomme, le nouveau recours des tiers contre le contrat administratif », RFDA, 2014, p. 736). Une partie de la doctrine abonde également dans ce sens, estimant qu’un tel accès au juge du contrat aboutit à « tempérer l’effet relatif’’ supposé du contrat administratif » (F. Jury, « Les droits des tiers dans le contentieux des contrats administratifs : un droit au juge en trompe-l’œil », RFDA, 2019, p. 55). Dans ces conditions, le justiciable audacieux peut se dire que la dérogation au principe de l’effet relatif est peut-être plus large et estimer que le recours Tarn-et-Garonne permet bel et bien au tiers d’invoquer un manquement contractuel à l’occasion d’un recours en responsabilité quasi-délictuelle. L’ennui c’est que l’affirmation selon laquelle le recours Tarn-et-Garonne constitue une atténuation au principe de l’effet relatif des contrats apparaît erronée (v. en ce sens, J. Bousquet, « L’effet relatif des contrats administratifs. À propos de décisions récentes », op. cit. ; C. Thomassin, Le recours des tiers contre le contrat administratif, Th. dactyl., Univ. Lorraine, 2022, p. 199 ; V. Lamy, Recherche sur la commune intention des parties dans les contrats administratifs, Mare & Martin, 2022, p. 133). Et pour cause, l’effet relatif n’a d’autre portée que celle que lui confère le code civil, dont l’article 1199 dispose aujourd’hui que « le contrat ne créé d’obligation qu’entre les parties. Les tiers ne peuvent ni demander l’exécution du contrat ni se voir contraints de l’exécuter ». Il n’intervient donc qu’au stade de l’exécution et n’a pour seul effet que de cantonner l’effet obligatoire du contrat aux seules parties. La comparaison avec le droit civil est d’ailleurs éloquente. En droit civil, le principe de l’effet relatif n’a jamais été une limite à la possibilité pour les tiers de demander l’annulation d’un contrat face à une nullité absolue. C’est ainsi qu’à la question de savoir quels critères permettent de distinguer les tiers et les parties, J. Ghestin répond qu’« il ne peut s’agir tout d’abord du pouvoir de demander l’annulation du contrat […] l’annulation peut évidemment être demandée par des tiers » (J. Ghestin, « Nouvelles propositions pour un renouvellement de la distinction des parties et des tiers », RTD civ., 1994, p. 777).
Le second élément consiste en une méprise sur la possibilité pour les tiers de demander une indemnisation dans le cadre du recours Tarn-et-Garonne. Le Conseil d’État a en effet prévu, comme c’était déjà le cas sous les sunlights de la jurisprudence Tropic (CE, Ass., 16 juil. 2007, n°291545, société Tropic travaux), que le juge de la validité du contrat peut « s’il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu’il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l’indemnisation du préjudice découlant de l’atteinte à des droits lésés ». Une lecture rapide a pu faire croire à notre compagnie requérante que le recours Tarn-et-Garonne permettait plus généralement aux tiers d’intenter une action en responsabilité quasi-délictuelle fondée sur des manquements à des obligations contractuelles. Il n’en est rien, l’indemnisation visée par la décision Tarn-et-Garonne est intimement liée au préjudice découlant des vices affectant la validité du contrat et ne saurait se confondre avec les conséquences préjudiciables d’une mauvaise exécution de celui-ci. Certes, de telles conclusions indemnitaires ne constituent pas nécessairement des demandes accessoires ou complémentaires à un recours demandant au principal l’annulation ou la résiliation du contrat, elles peuvent faire l’objet d’une requête autonome. Mais dans tous les cas, une telle requête ne peut que tendre « exclusivement à une indemnisation du préjudice subi à raison de l’illégalité de la conclusion du contrat » (Ph. Terneyre, « Responsabilité contractuelle », Rép. de la responsabilité de la puissance publique, Dalloz, 2018, n°28). Elle ne découle donc pas d’une faute contractuelle commise au stade de l’exécution par l’une des parties.
II – Le regard borgne : cachez ce Myr’Ho que je ne saurais voir
Si la cour administrative d’appel de Lyon rappelle ainsi opportunément que le périmètre du recours Tarn-et-Garonne fait défense au requérant de franchir les frontières de la validité du contrat dans ses réclamations, elle suit également le Conseil d’État dans son appréciation toujours aussi restrictive de l’effet relatif. En jugeant que « la qualité de tiers à ce contrat de la SMACL […] fait obstacle à ce que la SMACL, en son nom propre ou en qualité de subrogée dans les droits de l’association, se prévale d’une inexécution du contrat dans le cadre d’une action en responsabilité quasi-délictuelle », la cour administrative d’appel de Lyon rappelle la rigidité de la conception de l’effet relatif des contrats telle que prônée par le Conseil d’État. Bien sûr, cette disjonction d’avec la position de la Cour de cassation n’est pas sans autoriser des tempéraments. L’on connaît ceux, classiques, de la stipulation pour autrui (CE, 22 juil. 1927, Syndic. des employés et contremaîtres des secteurs électriques de la Seine, Lebon, p. 826) et de l’action oblique (CE, 21 janv. 1957, Lebon, p. 411) et le Conseil d’État a récemment inventé celui déjà mentionné concernant les participants à une même opération de travaux, qui peuvent - mutuellement - engager leurs responsabilités quasi-délictuelles en évoquant des manquements contractuels.
Cependant, l’on peut conjecturer que la brèche ainsi ouverte sur Myr’Ho n’a que peu de chances de s’ouvrir davantage, du moins dans un avenir relativement proche. Les conclusions de M. Le Corre sur la décision CMEG semblent d’ailleurs le confirmer. Avec toute la déférence qu’il sied d’avoir vis-à-vis de la jurisprudence antérieure du Conseil d’État, la rapporteure publique estime que la possibilité qu’elle propose à la formation de jugement de faire sienne doit rester strictement cantonnée aux rapports entre participants à une même opération de travaux publics, eu égard à « l’existence de liens matériels spécifiques » entre eux (M. Le Corre, « Concl. sur CE, 11 octobre 2021, société CMEG, n°438872). S’agissant des raisons du maintien d’une telle interprétation du principe de l’effet relatif, elles sont exposées par N. Boulouis dans ses conclusions sur l’arrêt de Section du 11 juillet 2011 précité et sont intimement liées aux particularités propres au droit administratif des contrats qui aurait généré un système « protégeant les tiers sans pour autant avoir besoin de revisiter les piliers du droit des contrats (G. Clamour, « Tiers et responsabilité(s) liée(s) au contrat public », in Mél. L. Richer, LGDJ, 2013, p. 325). Il s’agit, plus particulièrement, de la possibilité pour un tiers d’engager la responsabilité quasi-délictuelle d’un contractant à raison d’une méconnaissance d’une clause réglementaire ou encore de la reconnaissance d’une possible superposition des fautes - une faute contractuelle pouvant parfois s’analyser aussi comme une faute délictuelle ou quasi-délictuelle (N. Boulouis, « Concl. sur CE, Section, 11 juillet 2011, n°339409 précité). Cependant, une partie de la doctrine émet « de très sérieux doutes quant à l’effectivité de ces substituts administrativistes » (J. Bousquet, « L’effet relatif des contrats administratifs. À propos de décisions récentes », op. cit.) puisqu’ils sont enfermés dans des catégories établies et dont il ne serait pas nécessairement de bon ton d’étendre jusqu’à les dénaturer - l’on pense notamment à la notion de clause réglementaire, qu’il est difficile d’étendre, ou à celle de faute extracontractuelle, qui est loin d’être fongible dans celle de manquement à une obligation contractuelle.
Il convient alors de s’interroger sur la finalité d’une transposition en droit administratif de la jurisprudence de 2006. En droit civil, celle-ci a précisément eu une fonction de recherche d’équité, ceci afin de permettre aux tiers à un contrat d’obtenir une réparation pour des préjudices découlant de la mauvaise exécution de celui-ci. L’ennui, c’est que suivre une conception aussi absolue pourrait avoir des conséquences assez lourdes en droit administratif eu égard au rayonnement plus important des contrats administratifs. Cela risquerait en effet de générer une certaine insécurité quant aux risques contentieux inhérents à une opération contractuelle en les décuplant potentiellement à l’excès. La solution se trouve sans doute, non dans l’affirmation de principe semblable à celle opérée par la Cour de cassation et dont la généralité est souvent décriée, étant entendu que « la diversité des situations concrètes des tiers par rapport au contrat invite au contraire à établir des distinctions » (J.-S. Borghetti, op. cit.), mais dans une appréhension différenciée en fonction de catégories de tiers et non du domaine du contrat (comme le fait la jurisprudence CMEG). Telle est d’ailleurs la solution proposée par l’avocat général dans son avis sur l’arrêt de la Cour de cassation Sté QBE, qui estime opportun de distinguer entre trois catégories de tiers en fonction de leur lien avec le contrat (J.-R. de la Tour, « Avis sur Cass. plén., 13 janvier 2020, n°17-19.963, spéc. p. 21-22). Une première catégorie serait composée des tiers inclus dans un groupe ou une chaîne de contrats, pour lesquels l’action en responsabilité contractuelle serait ouverte. La seconde catégorie comprendrait les « tiers intéressés », c’est-à-dire ceux ayant un « intérêt légitime à la bonne exécution du contrat » et qui bénéficieraient d’une option entre responsabilité contractuelle et extracontractuelle, conformément à la proposition déjà effectuée par le projet de réforme de la responsabilité civile de 2017 (art. 1234). Enfin, les autres tiers se verraient appliquer le principe de l’effet relatif dans toute sa force et ne pourraient obtenir réparation que dans l’hypothèse où le manquement contractuel invoqué est également constitutif d’une faute extracontractuelle. Évidemment, la solution proposée ne saurait être pleinement satisfaisante s’agissant des contrats administratifs puisque les concernant, il y aurait aussi lieu de tenir compte du lien qu’entretient le contrat avec l’intérêt général ou le service public.
L’entreprise mérite que la réflexion se poursuive (v. J. Bousquet, Responsabilité contractuelle et responsabilité extra-contractuelle en droit administratif, LGDJ, Bibl. de droit public, t. 310, 2019), d’autant qu’elle ne serait pas une nouveauté du contentieux contractuel administratif. La jurisprudence Grenke location nous rappelle qu’il est possible d’appliquer aux contrats administratifs des règles différenciées à raison de leur lien avec le service public (CE, 8 octobre 2014, n°370644, société Grenke location). Et il n’y a qu’à relire la décision Tarn-et-Garonne pour constater que le Conseil d’État est parfaitement à l’aise avec l’idée d’établir des sous-catégories dans la catégorie générale des tiers au contrat. Il n’y a plus qu’à.